Intel annonce une « nouvelle » usine aux États-Unis, en évitant toute dissonance avec Trump

Comme un goût de déjà-vu
Economie 5 min
Intel annonce une « nouvelle » usine aux États-Unis, en évitant toute dissonance avec Trump
Crédits : Intel

Intel vient d'annoncer la réouverture de sa Fab 42, dans l'Arizona. Elle doit produire les futures puces en 7 nm du fondeur, pour sept milliards de dollars d'investissement. Le projet, présenté avec Donald Trump, arrive en plein débat sur un décret anti-immigration et au milieu d'une restructuration concernant 12 000 emplois.

La photo était belle. Le PDG d'Intel, Brian Krzanich, debout aux côtés de Donald Trump, assis à son bureau présidentiel, les rideaux dorés en fond. Hier, le géant de Santa Clara a annoncé à la Maison blanche l'ouverture d'une « nouvelle » usine, pour un investissement de sept milliards sur plusieurs années.

Il s'agit de la Fab 42, dans l'Arizona, qui doit accueillir la production des prochaines puces 7 nm du fondeur, et promet la création de près de 3 000 emplois directs « à son apogée » et 10 000 emplois indirects. « Nos usines soutiennent l'emploi, des emplois technologiques à haut salaire qui sont les moteurs économiques des Etats où elles sont implantées » se félicite Brian Krzanich, aux côtés du président.

L'usine doit être prête dans trois ou quatre ans, alors que qu'Intel affirme déjà employer 50 000 personnes aux États-Unis.

Une ouverture d'usine en trompe-l'œil

Cette opération de communication est une aubaine pour Donald Trump, qui a fait du retour des emplois sur le sol américain l'un de ses axes de campagne. Cela même si la Maison blanche n'a fourni aucune incitation particulière à Intel pour la « création » de cette usine, comme elle l'a déclaré à CNBC.

Krzanich a tout de même critiqué la politique fiscale menée par les prédécesseurs de Trump, accusée de désavantager le géant des semi-conducteurs face à ses concurrents mondiaux. Dans une lettre à ses employés (PDF), le PDG réitère sa critique et affirme soutenir la direction en matières fiscale et d'investissement de la nouvelle administration.

Si l'annonce de la Fab 42 a été menée en grandes pompes, l'installation est loin d'être nouvelle. Sa construction a été annoncée en 2011, pour un investissement de cinq milliards de dollars. Elle devait déjà accueillir la production de puces, à l'époque jusqu'à 14 nm. À l'époque, le projet avait été dévoilé lors de la visite dans l'Oregon par Barack Obama.

En 2014, Intel a mis un coup d'arrêt à l'usine, sans garantie que les cinq milliards de dollars promis aient été effectivement investis. La principale raison serait la chute des ventes de PC, qui a amené Intel à revoir ses plans. L'installation a été oubliée, et certains outils auraient été dirigés vers l'usine de l'Oregon, selon The Oregonian. À Reuters, le groupe affirmait que l'usine était bien construite, mais qu'aucun équipement de production n'avait encore été mis en place.

La machine doit donc être relancée. Le nouvel investissement de sept milliards de dollars se justifie, entre autres, par les nouveaux équipements que nécessitera la production de puces en 7 nm. Il reste donc à voir si ces promesses seront cette fois tenues, notamment en termes d'emploi.

Intel opposé au décret anti-immigration, sans en parler

La proximité affichée entre le PDG du fondeur et le président républicain soulève une autre question. Le secteur technologique américain est en ébullition depuis plus d'une semaine. Cela à cause d'un décret présidentiel « anti-immigration », censé interdire l'entrée aux États-Unis des ressortissants de sept pays à majorité musulmane, de manière permanente pour la Syrie.

130 entreprises, dont Intel, ont signé une requête pour maintenir la suspension du décret et en abandonner l'idée. Le fondeur est même l'une des premières sociétés à s'être opposée au texte. Face à eux, le département de la Justice compte faire appel de la suspension du décret, pour reprendre le contrôle strict des frontières. Une idée qui ne plaisait pas à Brian Krzanich il y a encore quelques jours.

Dans un tweet daté du 29 janvier, le PDG d'Intel affirme « qu'en tant qu'entreprise cofondée par un immigré, nous soutenons l'immigration légale. Nous apporterons tout le soutien d'Intel aux employés touchés par le décret ». Le message est assez classique pour un patron de la « tech » américaine, au point que ce sont les absences qui ont été les plus remarquées ces derniers jours.

Que ce soit dans ses communiqués ou aux côtés de Trump, le PDG d'Intel n'a pas évoqué une seule fois le sujet. L'heure était bien aux congratulations sur la création d'emplois via cette usine, et non aux questions politiques. Tout juste l'entreprise évoque-t-elle le sujet dans la lettre à ses employés, indiquant vouloir contribuer au débat plutôt que d'être dans l'opposition.

12 000 emplois à supprimer et un revirement sur une « levée de fonds »

L'annonce de la création de 3 000 emplois directs avec la Fab 42 amène à pointer une autre contradiction. Début 2016, le groupe a annoncé une restructuration impliquant 12 000 départs, que l'entreprise est en train de mener.

Sur le premier trimestre 2017, Intel s'attend d'ailleurs à 300 millions de dollars de charges liées à cette opération. La santé financière de l'entreprise n'est pourtant pas en danger. Elle a affiché un bénéfice de 10,3 milliards de dollars en 2016, et prévoit 12,3 milliards pour 2017.

Cette nouvelle rencontre entre Krzanich et Trump est aussi l'occasion de revenir sur un épisode datant de l'an dernier. En juin, alors que Donald Trump partait favori à la primaire républicaine, le patron d'Intel a été remarqué pour une soirée qu'il organisait en sa faveur. Au New York Times, Intel affirmait que cette soirée de levée de fonds incluait « un échange complet d'idées », avant que l'événement ne soit annulé sans explication.

À Fortune, Krzanich déclarait plus tard qu'il s'agissait d'abord d'une « conversation » sur des sujets comme la diversité. Elle s'est ensuite avérée être une soirée de levée de fonds. C'est à ce moment qu'il aurait décidé d'annuler. « Ce n'est pas notre affaire de soutenir une personne » a-t-il ajouté. Comme le notait le New York Times, afficher son soutien à Trump était rare, dans un secteur où Hillary Clinton semblait bien être la préférée.

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