Pour la Cour des comptes, le fonctionnement actuel du vote par Internet « n'est pas satisfaisant »

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Droit 5 min
Pour la Cour des comptes, le fonctionnement actuel du vote par Internet « n'est pas satisfaisant »

Les Français résidant à l’étranger sont les seuls à pouvoir aujourd’hui voter par Internet, notamment lors des législatives. La Cour des comptes, qui estime qu'un recours accru à cette solution pourrait être bénéfique au Trésor Public, juge toutefois que son fonctionnement n’est pas encore « satisfaisant ».

L'organisation des élections pour les Français établis hors du territoire national coûte cher. Trop cher même, estime la Cour des comptes dans un référé rendu public mardi 10 janvier. Chaque inscrit a en effet occasionné une dépense de 20,5 euros à l’étranger (lors des présidentielles et législatives de 2012), contre 7,45 euros en France.

Au total, les magistrats de la Rue Cambon évaluent à 34,3 millions d’euros le budget consacré à l'organisation des élections pour les Français de l’étranger, au titre des quatre scrutins qui se sont déroulés entre 2011 et 2014 : législatives, présidentielles, consulaires et européennes.

Des élections qui coûtent cher et mobilisent peu

Dans une analyse avant tout financière, la Cour des comptes souligne que « diverses faiblesses » alourdissent le coût de ces scrutins. Le tout sans grand effet, son référé pointant la « faible participation des Français de l'étranger aux élections, malgré les nombreuses facilités offertes ».

En raison de l’éloignement des bureaux de vote (en principe dans les quelques consulats du pays en question), les citoyens résidant hors du territoire national peuvent effectivement voter par correspondance, voire par Internet – uniquement pour les élections législatives et consulaires. La Cour des comptes s’arrête tout particulièrement sur ces deux dispositifs, jugeant notamment qu’il conviendrait de supprimer le premier.

Ce « système abandonné depuis 1975 pour les votants présents sur le territoire national se heurte aux nombreuses défaillances des systèmes postaux étrangers », argumente l’institution. Résultat, de « nombreux Français » ne reçoivent pas leur « matériel de vote » en temps et en heure. « Cette faculté, conditionnée à une inscription préalable, provoque un travail supplémentaire pour les services consulaires, obligés de consacrer des locaux au dépouillement de ces votes pour une participation minime (moins de 2 % des électeurs avaient fait ce choix en 2012). » Le vote par correspondance est enfin jugé trop coûteux : « 25,50 € par votant en 2012 et 120 € par votant pour les législatives partielles de 2013 ».

La Cour voudrait plus de garanties pour le vote par Internet

Quant au vote par Internet, la Cour des comptes juge que son fonctionnement « n'est pas satisfaisant ». Le choix du prestataire « n'a pas été entouré de toutes les précautions souhaitables », affirment les magistrats. « Des difficultés techniques, déjà identifiées en 2011, n'ont pas été entièrement surmontées, ni en 2012 ni en 2014 [on se souvient à cet égard des problèmes avec Java, ndlr]. S'y sont ajoutés des problèmes concernant l'accès au portail de vote : difficile durant les dernières heures du scrutin consulaire de 2014, cet accès a été impossible au cours de la dernière heure. »

Pour les juges, ces incidents « posent la question de la capacité des serveurs à absorber un flux pourtant restreint de votes (7 % des inscrits avaient fait en 2014 le choix du vote par Internet) ». Ils plaident surtout « pour un rôle accru du bureau de vote électronique, garant de l'intégrité du scrutin ». La Cour des comptes note à cet égard que si aucun audit de sécurité n’a pour l’instant permis de déceler de « failles particulières », « il n'existe pas en la matière de garantie totale ».

L’institution propose par conséquent que le fameux bureau de contrôle du vote électronique publie à l’avenir un rapport « sur la régularité et la conformité du vote ». Car au final, les magistrats restent profondément séduits par cette solution technique, dont le développement permettrait selon eux « de réduire les coûts d'organisation des scrutins ».

Le retour de la dématérialisation de la « propagande électorale »

Dernière recommandation formulée par la Rue Cambon : ne plus envoyer de plis électoraux (programmes et bulletins de vote) aux Français de l’étranger, au profit d’une dématérialisation de la « propagande électorale » – comme on dit dans le jargon. « Outre qu'il ne constitue pas le moyen le plus fiable, en raison des défaillances de certains systèmes postaux étrangers, y compris dans des pays industrialisés, et des nombreuses erreurs d'adressage, l'envoi papier se révèle très coûteux » se justifient les magistrats. Ces derniers précisent que les plis traditionnels ont coûté plus de 1,9 million d’euros pour les scrutins de 2012, soit près de 15 % des dépenses totales.

Le Quai d'Orsay renvoie la balle au législateur

Comme le veut le fonctionnement de la Cour des comptes, la réponse apportée par le gouvernement au référé de l’institution (daté du 24 octobre 2016) a été rendue publique hier (PDF). Le ministre des Affaires étrangères dit partager « l'essentiel des constats de la Cour et approuve[r] ses recommandations ».

Jean-Marc Ayrault rétorque toutefois que leur mise en œuvre « relève pour la plupart du législateur ». C’est notamment le cas de la suppression du vote par correspondance et de la dématérialisation des plis électoraux (cette seconde réforme suscitant depuis plusieurs années une vive opposition de la part des parlementaires), pour lesquelles il faudrait absolument passer par une loi.

En revanche, le Quai d’Orsay promet de modifier les règles entourant le bureau du vote électronique. « Conformément à la recommandation de la Cour », l’exécutif annonce qu’il prévoit d'insérer dans un décret « une disposition indiquant que le BVE consignera toutes les informations relatives à la régularité et à la conformité du vote dans un rapport qui rendu public ».

Rappelons enfin que François Fillon a promis durant la primaire de la droite de généraliser le vote électronique, qui ne serait donc plus réservé qu’aux Français de l’étranger.

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