Fibre : l'Arcep prépare de nouvelles obligations pour Orange, qui réagit

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Fibre : l'Arcep prépare de nouvelles obligations pour Orange, qui réagit
Crédits : Gregory_DUBUS/iStock

Dans ses orientations sur le marché fixe, le régulateur des télécoms prévoit des mesures à même d'équilibrer le marché fibre, qui bénificierait trop à Orange. Une esquisse de régulation asymétrique, à laquelle l'opérateur historique a vivement réagi dès sa publication.

Il y a de l'eau dans le gaz entre l'Arcep et Orange. Hier soir, le régulateur des télécoms a publié une série de mesures qu'il songe prendre à l'égard de l'opérateur historique, sur laquelle nous aurons l'occasion de revenir. Ce document propose une régulation spécifique pour l'entreprise dans de nombreux domaines, notamment sur la fibre, qu'il domine depuis plusieurs années dans les déploiements et la commercialisation (voir notre analyse).

Sur deux ans, l'entreprise a compté pour près des trois quarts des recrutements sur la fibre grand public. Orange affirme clairement à ses actionnaires que le FTTH est un outil de reconquête des clients, notamment dans les grandes villes, là où la concurrence est la plus rude.

Dans un entretien aux Échos, le président de l'Arcep, Sébastien Soriano, affirme vouloir attaquer « les derniers bastions du monopole d'Orange », par exemple sur l'accès au génie civil, l'une des forces de l'opérateur. L'autorité répond aussi aux inquiétudes récurrentes de petits acteurs des télécoms pour entreprises, qui se sentent exclus des zones denses, fautes d'offres adaptées en dehors des réseaux publics, plutôt situés en zones rurales.

Ouvrir les infrastructures d'Orange en zones très denses

En un sens, l'Arcep reconnaît donc la position qu'a pris Orange sur la fibre. Si elle réfléchit depuis plusieurs mois à d'éventuelles mesures, sous pression de concurrents de l'opérateur historique, l'institution semblait toujours réticente à toucher au sujet jusqu'ici. Dans son document, elle enchaine les éléments pour affirmer cette domination.

« Orange est le principal opérateur d’infrastructure en zones très denses », où sont la majorité des abonnés fibre en France, explique-t-il. L'entreprise a réalisé 44 % des colonnes montantes dans les bâtiments de ces zones, alors que Free et SFR y déploient aussi en propre. Pour mémoire, près de 40 % des lignes éligibles à la fibre jusqu'à l'abonné en France n'ont accès qu'à un opérateur (surtout en zones peu denses).

En zone très dense, le régulateur propose donc d'imposer à Orange une non-discrimination à l'accès à son réseau fibre, en amont des points de mutualisation en pied d'immeuble. L'autorité craint que, sans cela, il puisse favoriser un fournisseur d'accès sur un autre. L'autorité semble donc vouloir inciter Orange à mutualiser son réseau avant les pieds d'immeubles, qui sont jusqu'ici l'endroit privilégié. Pour Free, le positionnement de ces points avantage l'opérateur historique, qui réfute tout problème à ce niveau.

Un réseau fibre qui doit devenir plus accessible aux entreprises

Le discours est essentiellement le même sur le marché des télécoms pour entreprises, qu'Orange domine. « Aussi, afin de s’assurer qu’Orange ne cherche pas à préserver le statu quo sur le marché entreprise, l’autorité envisage d’imposer à cet acteur de faire droit aux demandes raisonnables de fourniture d‘offres de gros passives adaptées » dans « de bonnes conditions économiques », écrit encore l'institution.

Autrement dit, Orange devrait ouvrir son réseau fibre aux autres opérateurs pour entreprises. Une mesure importante, qui doit faciliter l'arrivée d'autres FAI dans certaines zones, notamment très denses. Pourtant, dès la publication du document par l'Arcep, des petits opérateurs pour entreprises ont regretté l'approche prônée par le régulateur.

Selon eux, il ne serait pas allé assez loin, les offres passives (où Orange ne fournit que la fibre, les équipements pour gérer le trafic étant à la charge du FAI) étant estimées prohibitives. Ils disent préférer des offres activées, clés-en-main, où ils n'ont plus qu'à fournir leur propre box aux clients finaux. Pour certains, cette annonce ressemble à un coup d'épée dans l'eau, quand pour d'autres, il s'agit sûrement d'un premier pas avant de peut-être aller plus loin.

Cela ne semble pourtant pas prévu. Depuis plusieurs mois, l'Arcep appelle de ses vœux l'émergence d'un troisième opérateur d'infrastructure capable de concurrencer Orange et SFR sur le marché entreprise, notamment dans les zones denses, décrites comme inaccessibles par certains petits opérateurs. L'autorité déclare aussi que de nouveaux acteurs pourraient « activer » d'éventuelles offres passives « adéquates » d'Orange et SFR, pour les revendre à de plus petits opérateurs. Charge donc à ces nouvelles entreprises d'émerger et de trouver un modèle économique.

Orange dit respecter la concurrence et se préparer à l'étendre

Coïncidence : l'Arcep organisait l'un de ses groupes de travail entre collectivités et opérateurs (Graco) ce matin. Un événement dont Orange est un fidèle. Cette fois pourtant, déclare l'autorité, l'opérateur historique s'est abstenu de venir, à cause des annonces d'hier soir.

Dès l'arrivée du document, Pierre Louette, secrétaire général d'Orange, a répondu que son avance dans la fibre a été prise dans les règles, et que l'opérateur n'est pas « responsable des erreurs stratégiques des concurrents ». Il fait notamment référence au choix de privilégier le câble côté SFR et de choix technologiques de Free à ses débuts, qui aurait ralenti ses déploiements, avant qu'il ne se concentre sur Free Mobile. En clair, Orange a pris une avance légitime, affirme-t-il.

Dans la foulée, il a accordé un entretien au Monde, publié dans la matinée. Il y répète essentiellement ce discours, en tous points similaires à celui que nous avait tenu Yves Parfait, directeur des activités fibre de l'opérateur, l'an dernier.

Sur le marché entreprises, Orange déclare être en pourparlers avec Kosc, un consortium mené par OVH, qui a repris le réseau DSL de Completel, l'un des principaux opérateurs pour entreprises, dont Numericable a dû se séparer en rachetant SFR. « Il y aura ainsi, comme le souhaite le régulateur, un nouvel opérateur de gros sur le marché » annonce Orange au Monde.

« Quant au fait de proposer des « offres activées » (prêtes à l’emploi) aux autres opérateurs, cela n’est pas imposé par l’Arcep. Cela demanderait d’ailleurs pas mal d’investissement complémentaire dont l’utilité est a priori très marginale » estime encore l'opérateur historique. Le spectre d'une telle obligation, déjà imposée sur le réseau cuivre du temps de l'ADSL, est la perspective que l'entreprise souhaite éviter à tout prix.

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