En 2015, seules 7 % des entreprises françaises disposaient d'une connexion en fibre, contre 16 % en très haut débit pour les particuliers. Une situation qui perdure, alors que les dépenses télécoms des sociétés ont baissé sur l'année. L'État mise sur la mutualisation des réseaux et l'arrivée de nouveaux opérateurs pour dynamiser ce marché.
Malgré les grands mouvements de ces dernières années, certaines situations évoluent peu dans les télécoms. Dans un rapport pour l'année 2015 (PDF), l'Arcep constate une nouvelle fois la très faible pénétration de la fibre chez les entreprises. Quand les grands groupes disposent en majorité d'au moins une de ces connexions, leur usage reste très minoritaire chez les petites entreprises.
Au total, à peine 7 % des sociétés disposent d'une connexion fibre, contre 16 % en très haut débit (câble, fibre et VDSL2) sur l'ensemble du marché au même moment. Ces offres comptent pour 11 % des ventes de services de capacité (connexions aux entreprises) en 2015, contre 10 % en 2014. Le reste s'appuie largement sur le réseau téléphonique (ADSL et SDSL) avec des offres proches de celles du grand public ou fournissant bien plus de services. Autant dire qu'à ce rythme, le chemin est potentiellement long, surtout quand l'Arcep estime que la fibre pour entreprises « est un peu un marché de luxe ».
Plus de connexions, mais moins de dépenses
Il y a deux ans, le régulateur des télécoms nous disait peu connaître ce marché professionnel. Pourtant, le constat sur la fibre était déjà établi par l'autorité. Sur l'année, les sociétés ont compté pour 30 % des revenus télécoms des opérateurs, pour un total de 9,7 milliards d'euros. Une baisse de 3,7 % par rapport à 2014.
« D’une manière générale, les entreprises dépensent de moins en moins pour les services de télécommunications » constate le régulateur. Les services fixes comptent pour plus des deux tiers des dépenses télécom des sociétés, contre un peu moins d'un tiers pour le mobile.
Dans le détail, la téléphonie et les accès Internet fixes ont rapporté 4,2 milliards d'euros au secteur, soit une chute de 4,6 % depuis 2014. En cause, le nombre de lignes téléphoniques, qui fond de 300 000 sur un an, pour atteindre 9,4 millions. Les services de capacité voient aussi leurs revenus baisser de 0,4 %, pour atteindre 2,4 milliards d'euros. Les nombres d'accès Internet fixe et aux services de capacité restent stables à deux millions et 600 000. Ce dernier a très peu bougé depuis 2008, note le régulateur.

Les revenus des services mobiles pour entreprises baissent aussi de 5,4 % d'une année sur l'autre, pour atteindre 2,6 milliards d'euros en 2015. Ils représentent tout de même 18 % du chiffre d'affaires des opérateurs mobiles. Malgré un nombre de lignes en hausse (+300 000), à 8,2 millions en incluant les communications entre machines (MtoM), la facture de chaque client baisse. Une tendance similaire à celle observée chez les particuliers, qui n'est pourtant pas directement imputable à Free Mobile. « Celui-ci [s'est] positionné uniquement sur le marché grand public » rappelle l'autorité.
Des mesures pour ouvrir le marché de la fibre
Le cas de la fibre est sans conteste la principale inquiétude de l'Arcep sur les professionnels. La faible pénétration est due à quantité de facteurs, dont le fait qu'elle s'appuie sur des lignes dédiées (FTTO), au coût de déploiement et d'abonnement prohibitif pour les PME et TPE. Si le niveau de service (déploiement sur mesure, débit garanti, temps de rétablissement...) est élevé, il ne semble intéresser que peu de sociétés.
Ouvrir la fibre à toutes les entreprises est l'un des grands axes stratégiques de l'Arcep, comme expliqué cet été. Le régulateur, qui veut « connecter les PME », compte s'appuyer sur la mutualisation des lignes professionnelles avec le réseau fibre grand public (FTTH) pour abaisser les coûts. En baissant le niveau de service, l'opération doit mener à des prix divisés plusieurs fois. L'autorité veut aussi ouvrir le marché à de plus petits opérateurs, face aux mastodontes nationaux Orange et SFR.
Dans une consultation publique l'été dernier, l'Arcep appelait explicitement à faire émerger un troisième opérateur capable d'investir dans un réseau fibre sur ce marché, et de lancer de nouvelles offres de gros (dont passives) pour accéder aux infrastructures existantes. Cela en privilégiant les négociations entre acteurs plutôt que l'obligation.

Les opérateurs indépendants veulent se fédérer
Le gouvernement est aussi actif sur le sujet. En 2015, dans le cadre du plan France THD, il a ouvert la vente de lignes mutualisées avec le réseau grand public dans des zones jusqu'ici réservées aux lignes dédiées (FTTO) d'Orange. À l'époque, Bercy nous expliquait vouloir passer le prix d'une ligne 100 Mb/s d'environ 1 500 euros mensuels à 300 euros. Le marché pourrait notamment s'ouvrir avec l'arrivée progressive de réseaux d'initiative publique (RIP), avec l'émergence d'opérateurs locaux pour entreprises.
Sur ce sujet, les petits opérateurs pour entreprises comptent mener un lobbying plus important à partir de cette année. Comme ils l'expliquent aux Échos, l'heure est au regroupement pour ces entreprises, alors que les fédérations ont le vent en poupe dans les télécoms. La concurrence doit aussi passer par l'émergence de nouveaux opérateurs d'opérateurs, comme le consortium Kosc (comprenant OVH), qui a repris le réseau cuivre de Completel.