Le gouvernement vient de notifier à la Commission européenne un projet de décret d’application de la loi Travail, relatif à la « responsabilité sociale » des plateformes ayant recours à des travailleurs indépendants. Ses dispositions sont censées entrer en vigueur au 1er janvier 2018.
Face au développement des sociétés de type Uber, le législateur a tenu au travers de la loi « El Khomri » à reconnaître la « responsabilité sociale » de ces nouveaux acteurs. À partir du moment où le service d’intermédiation « détermine les caractéristiques de la prestation de service fournie ou du bien vendu et fixe son prix », celui-ci devra bientôt prendre en charge une partie de l’assurance souscrite par le travailleur indépendant en matière d’accidents du travail, ou bien encore de contribuer financièrement à sa formation.
Ces dispositions, appelées à être précisées par décret, pourraient entrer en vigueur dans un peu plus d’un an. La France a en effet notifié hier un projet de décret (PDF) à Bruxelles, lequel prévoit, « par souci de sécurité juridique », une application à compter du 1er janvier 2018.
Application à partir de 5 000 euros de chiffre d’affaires annuel
Ce texte précise surtout le seuil de chiffre d’affaires à partir duquel ces nouvelles obligations seront opposables aux plateformes : « 13 % du plafond annuel de la sécurité sociale », soit 5 020,80 pour l’année 2016, précise l’exécutif, à titre d’illustration.
Au cas où le travailleur serait actif sur plusieurs plateformes, chacune d’entre elles devra effectuer un remboursement « au prorata du chiffre d’affaires que le travailleur indépendant a réalisé par son intermédiaire, rapporté au chiffre d’affaires total qu’il a réalisé au cours de l’année civile par l’intermédiaire des plateformes ».
Des démarches effectuées en ligne, gratuitement
Sur un plan plus pratique, le projet de décret explique que chaque agent devra adresser une demande de remboursement auprès de la (ou des) plateforme(s) concernée(s), et justifier à cette occasion « des dépenses qu’il a exposées », ainsi que de son chiffre d’affaires total. « Cette procédure doit être réalisable gratuitement et par voie électronique », souligne le texte gouvernemental, insistant au passage sur le fait que les plateformes devront informer les travailleurs indépendants de leurs droits et sur la manière de les exercer.
Dans une brève étude d’impact, l’exécutif reconnaît qu’à ce stade, « aucune statistique officielle ne permet de quantifier précisément la part de travailleurs dont l’activité est directement liée à l’utilisation d’une plateforme électronique ». Citant plusieurs rapports, le ministère du Travail estime à « plusieurs centaines de milliers » le nombre de personnes travaillant, à titre principal ou accessoire, par l’intermédiaire d’une société de type Uber. Le nombre d’individus concernés par cette réforme serait donc forcément inférieur.
Le gouvernement demeure quoi qu’il en soit convaincu que ces changements auront « un impact important en termes d’emploi car, en reconnaissant juridiquement le statut des travailleurs du numérique indépendants et, le cas échéant, économiquement dépendants, elle contribuera à leur émergence dans l’économie formelle ».
Restera maintenant à voir dans quelle mesure évoluera le décret qui sera finalement publié au Journal officiel (pas avant trois mois, du fait d’une période dite de statu quo), sachant que la Commission européenne et les États membres sont désormais invités à transmettre leurs éventuelles réserves à la France.