Rogue One est sorti en France cette semaine. L'occasion de découvrir le premier film « A Star Wars Story » de la saga depuis le rachat par Disney. Et contrairement à Star Wars VII : le réveil de la force, nous avons été plutôt emballés.
Lorsque Disney a décidé de reprendre en main la licence Star Wars, et de multiplier les films dérivés sous le label « A Star Wars Story » en complément d'une nouvelle trilogie, nous n'étions pas totalement rassurés.
Déjà parce que le précédent « Marvel » a montré que le géant du divertissement était capable du pire, comme du meilleur, dès lors qu'il s'agit de développer un univers tous azimuts. Ensuite parce qu'il avait été décidé de faire presque totalement table rase de l'univers étendu au profit d'un nouveau canon, où l'on retrouve la marque d'une société américaine qui multiplie les blockbusters et qui cherche à plaire au monde entier, notamment à nos têtes blondes.
Star Wars : a bisounours story
Ainsi, n'allez pas chercher un opus qui va aller principalement explorer les aspects sombres des Siths, la montée en puissance du Nouvel Ordre en se focalisant sur ses personnages phares.
Ceux-ci ne sont en effet que des éléments de décor qui servent à conter les nouvelles aventures de la famille Skywalker/Solo, ou des moments clefs d'une saga qui fait battre le cœur de près de trois générations d'amateurs de batailles spatiales (entre autres). De fait, il faut ainsi se retourner vers les romans ou les comics afin de découvrir plus en profondeur ce qui constitue pourtant une partie majeure de l'univers Star Wars : l'Empire puis le Nouvel ordre. Dommage.
Seule exception un temps évoqué : celle de Boba Fett. Le chasseur de prime qui a joué un rôle majeur dans la prélogie et dans la trilogie originale, a bien failli avoir droit à son propre film. Mais finalement, celui-ci a semble-t-il été repoussé pour le moment. Prochain dérivé attendu, dont le tournage débutera l'année prochaine : Han Solo.
Rogue One : l'exception qui confirme la règle
Star Wars VII : le réveil de la force ne nous avait ainsi pas totalement convaincus. Celui-ci n'avait pris aucun risque, si ce n'est celui de calquer son scénario sur l'épisode IV. Et même si la réalisation en faisait un film agréable à regarder, il n'avait pas su éveiller en nous les grandes émotions que nous nous attendions à retrouver face à la renaissance de la franchise.
C'est donc avec les plus grandes craintes que nous sommes allés voir Rogue One, d'autant plus que Disney n'a pas toujours montré un grand soin à ses œuvres dérivées. Heureusement, nous avions tort. Rogue One est une réussite. Bien entendu, tout n'est pas parfait, mais ce film arrive à trouver le juste équilibre entre tout ce qui fait la force d'un bon Star Wars sans jamais tomber dans tous les travers du Réveil de la force.
Pour rappel, ce nouvel opus prend place chronologiquement entre Star Wars Rebels et l'épisode IV (Un nouvel espoir). Son histoire est d'ailleurs résumée dans le prologue déroulant de ce dernier :
« Au cours de la bataille, les Rebelles ont réussi à dérober les plans secrets de l'arme absolue de l'Empire : l'ETOILE NOIRE, une station spatiale dotée d'un armement assez puissant pour annihiler une planète tout entière.
Poursuivie par les sbires sinistres de l'Empire, la Princesse Leia regagne sa base dans son vaisseau cosmique, porteuse des plans volés à l'ennemi qui pourront sauver son peuple et restaurer la liberté dans la galaxie... »
Ici, c'est donc l'histoire de la fin de la conception de l'Étoile de la mort (DS-1) qui va nous être contée, ainsi que l'aventure qui a mené un escadron de rebelles, Rogue One, à réussir à en dérober les plans. Ceux qui finiront dans les mains de la princesse Leia puis dans la carcasse de ce bon vieux R2-D2.
Respecter l'épisode IV
Tout d'abord on apprécie le respect de l'épisode IV. Tout a été recréé à l'identique sans tomber dans une volonté de modernisation à outrance, de la salle de contrôle de l'Étoile de la mort en passant par la composition des vaisseaux, les interfaces ou les costumes des pilotes. Même si, sur le coup, il paraît un peu étrange de revoir ces combinaisons orange dans un film de 2016.
Cette volonté de coller au film original se retrouve d'ailleurs dans l'apparition de plusieurs personnages sous leurs traits de l'époque grâce à une reconstitution numérique plutôt réussie. Un dispositif qui avait déjà été utilisé par Disney dans Tron : l'héritage.

Il s'agit parfois de caméos ou d'une présence plus insistante comme le Grand Moff Wilhuff Tarkin qui est à la tête du triumvirat qui contrôle la station. Un personnage clef de cette époque, dont l'histoire a été développée dans un roman de James Luceno sorti en France cet été, que l'on se plait à retrouver tel qu'on l'avait connu, tant au niveau physique que de son caractère.
On retrouve aussi de nombreux clins d'œil à la saga au sein du film dont les héros principaux sont tous de nouveaux personnages. Mais cela se fait de manière souvent discrète, sans insistance lourde (excepté la notion d'espoir).
Des combats, un destin
La présence de Tarkin reflète un autre aspect appréciable du film : celui qui tend à nous montrer les problématiques qui peuvent exister tant du côté des Rebelles que de l'Empire.
Certes, cela est abordé de manière assez superficielle, n'étant pas le sujet principal, mais il est intéressant de découvrir les luttes intestines pour le pouvoir et la difficulté de faire régner l'ordre par la simple terreur, surtout avec des équipes aussi mauvaises en sécurité basique que celles de l'Empire, et ses personnages à tendance VDM.
Mais aussi, combien il est difficile de faire travailler ensemble des peuples qui font face à un ennemi aussi implacable, et qui peuvent être tentés par des approches radicalement différentes, pour ce qui est des rebelles.

Il ne s'agit d'ailleurs pas vraiment de politique ici, cette thématique étant bien plus développée dans la prélogie, que de choix qui s'entrechoquent, et qui font avancer chacun vers le destin qui est le sien. La notion de destinée, très présente dans l'univers de Star Wars, est d'ailleurs assez développée ici.
Si Skywalker et Solo ne sont pas encore de la partie, le personnage de l'ingénieur en chef de l'Étoile de la mort intègre le fait que bien d'autres familles ont été impliquées, chacune avec leurs tragédies et leurs moments d'héroïsme. Une notion parfois complexe.
La force dans le cœur plus que dans le sabre
C'est sans doute ce point que nous avons préféré dans Rogue One. Ici, la facilité aurait été de nous sortir la Force et du sabre laser à toutes les sauces. Mais les jedis font alors presque partie du passé, leurs armes sont rangées et ils constituent plus un mythe qu'une solution à cette époque de l'histoire. Ils ont laissé leur place sur le terrain à des héros plus ordinaires.
Si la Force est présente, ce n'est que pour guider ceux qui choisissent de croire en elle. Elle n'est pas une manière de s'en sortir, mais de nourrir la bravoure de ces héros qui vont permettre d'accomplir ce qui parait au départ impossible. Et ce, quels qu'ils soient au sein de l'équipe improbable qui constitue Rogue One.
Ici, c'est plus l'éloge du courage qui est fait. Celui qui peut manquer aux membres d'une alliance à des moments clefs, celui qui peut inciter au sacrifice pour une cause noble, ou à désobéir à des ordres qui n'ont pas de sens. Un courage qui nourrit l'espoir qui sera au centre de l'épisode IV.

De l'espoir pour les prochains Star Wars
Gareth Edwards signe donc un très bon Star Wars, et montre que se passer de J.J. Abrams pour une telle licence peut être une bonne idée. L'équilibre entre batailles spatiales (avec quelques techniques badass), au sol et développement de l'histoire nous a semblé plus que correct.
On retrouve aussi un bon mix d'émotions avec des moments drôles, prenants ou assez tristes, sans que l'on ne tombe jamais dans l'excès. On appréciera aussi que l'on nous ait évité le coup de la « love story dégoulinante » dans une bataille cruciale pour la rébellion.

Certains plans sont tout bonnement magnifiques et le rythme de l'ensemble est plutôt bon aidé par une bande originale toujours aussi appréciable, malgré quelques longueurs et un début franchement poussif. Les dix premières minutes multiplient en effet les scènes d'expositions et autres scénettes assez courtes, ce qui peut vite agacer.
On regrettera aussi que certains personnages ne prennent pas plus de place, ou que le film n'aille pas forcément plus loin dès lors qu'il s'agit de montrer la psychologie des membres de l'équipe ou leur profondeur. Mais rien n'est jamais facile lorsqu'il faut placer autant d'éléments dans 134 minutes.
K-2SO superstar
Le casting est néanmoins plutôt réussi, et sait allier de grands noms à des acteurs moins connus, tout en laissant toute la place à ces derniers. On apprécie aussi tout le génie de Disney dès qu'il s'agit de nous faire adorer des personnages robotiques, ici K-2SO (qui a bien entendu droit à sa multitude de produits dérivés).
Celui-ci a des airs de C-3PO dans sa capacité à la franchise déplacée, mais sans la partie diplomatique ou la logorrhée, et avec le côté rentre-dedans d'un R2-D2. Il fera ainsi rire les plus petits, mais aussi les plus grands, qui y verront sans doute l'émanation d'un collègue ou le déclic pour un nouveau style de gestion des relations aux autres.

Rendez-vous en 2017 pour la suite
Bref, si ce Star Wars reste avant tout un blockbuster, il fait plutôt partie de la bonne tranche de cette catégorie. N'hésitez donc pas à aller le voir, cette période de vacances étant propice à une découverte en famille.
Il viendra sans doute nourrir l'imaginaire d'une nouvelle génération de fans de la saga, et de bien meilleure manière que l'épisode VII. Reste maintenant à espérer que Star Wars : Episode VIII, qui sera réalisé par Rian Johnson, aura su s'inspirer de ce succès. Réponse le 15 décembre prochain.
À l'heure où nous écrivons ces lignes, Rogue One : A Star Wars Story a droit à une note de 4,5 chez Allociné, 7,1 chez Sens Critique et 8,3 chez IMDb.