Contrat monétique : nouvelle baffe pour l’hébergeur 1fichier.com

À fond l’Afone
Droit 4 min
Contrat monétique : nouvelle baffe pour l’hébergeur 1fichier.com
Crédits : karelnoppe/iStock/Thinkstock

Afone Paiement a rompu le 7 septembre dernier ses relations avec Dstorage, éditeur français de 1Fichier.com. La cause ? Une alerte Mastercard « d’infraction à la réglementation » rapportée par une banque partenaire, le Crédit Mutuel. Le dossier a été tranché par la justice à la défaveur de l'hébergeur.

Après échange avec 1fichier, qui lui a rappelé le caractère licite de sa solution d’hébergement, la société a rétabli un temps la solution de paiement. Le même jour, elle a cependant trouvé un autre moyen pour se séparer de ce client mis à l’index par le géant du paiement : une lettre de résiliation du contrat, avec préavis de deux mois.

Selon DStorage, pas de doute : Afone Paiement a agi de mauvaise foi dans cette décision. Elle a justifié d’abord d’une alerte Mastercard pour ensuite s’accrocher à la branche contractuelle. Le prestataire de paiement rétorque qu’il ne s’agit que d’une stricte application du droit des contrats. Et ces deux mois lui sont suffisants pour trouver un remplaçant pour ses opérations CB. Circulez.

Un droit de résiliation sans motivation

Saisi du dossier dans le cadre d’un référé, le président du tribunal de commerce d’Angers n’a pas vu l’ombre d’un problème (la décision ci-dessous). Le contrat liant 1fichier.com à Afone est un contrat à durée indéterminée, qui prévoit en outre dans ses clauses que chaque partie peut résilier par lettre recommandée « sans avoir à motiver sa décision ».

Pour lui, il n’y a donc qu’un strict respect des conditions contractuelles sans la moindre mauvaise foi. Afone Paiement nous indique, sans entrer dans les détails, que « comme le prévoyaient les Conditions Générales et le Droit Commercial, nous avons mis un terme à cette relation en appliquant un préavis acceptable (et même très généreux en l'occurrence) par rapport à l'ancienneté de ladite relation. Nous regrettons sincèrement que DStorage ait choisi la voie judiciaire pour s'y opposer, nous aurions amplement préféré conserver son estime et sa satisfaction, ce qui semble ne pas être le cas. »

DStorage subit ainsi une nouvelle déconvenue dans son business model. L'an dernier, la Société Générale avait déjà cassé son contrat monétique, en prétextant des contenus illicites dénoncés par Mastercard et des ayants droit... indiens. L'éditeur de 1fichier.com avait vainement tenté d'obtenir gain de cause devant le tribunal de commerce de Paris.

« Follow the money »

En 2015, ayants droit et intermédiaires de paiement ont signé une charte pour mettre en mouvement l’approche dite « Follow The Money ». En clair : couper les vivres aux sites dénoncés par les sociétés de défense des titulaires de droits afin de les pousser vers la sortie. Visa, mais également Mastercard ont ainsi constitué un comité avec l’Alpa, l’association de lutte contre la piraterie audiovisuelle, du SNE (Syndicat national de l’édition), de la SACEM, de la SCPP (majors du disque) ou encore de la SPPF (producteurs indépendants).

Dans le document signé Rue de Valois, « les participants tiennent compte des observations du comité dans le retrait des sites considérés comme contrevenants et s’engagent à prendre les mesures qu’ils jugeront nécessaires pour sensibiliser leur profession et en assurer l’effectivité, notamment, dans le respect de la réglementation, via l’établissement de listes d’adresses URL ou en utilisant éventuellement des outils technologiques ».

Cette fameuse liste d’URL est prévue par la charte, mais n’existe pas aux yeux du ministère. Plus exactement, Me Ronan Hardouin, avocat de DStorage, a fait récemment une demande CADA pour l’obtenir, mais selon l'exécutif « aucune autorité administrative, à sa connaissance, n'a élaboré ni ne détient une telle liste ». Frédéric Delacroix, délégué général de l’ALPA, nous a pour sa part indiqué qu’il n’y a « pas concrètement de fichier Excel dressant la liste de ces sites ». Cependant, « il y a forcément des noms de sites et d’autres informations qui sont transmis ».

En somme, un hébergeur qui serait possiblement mis à l’index par ce comité ne peut savoir sur le terrain de la CADA s’il fait partie des pestiférés. Sur le terrain juridictionnel, les clauses sont telles qu’elles permettent à un acteur de paiement de se délester de son cocontractant, peu au goût de Mastercard. 

L’hébergement et les contrats Mastercard et Visa

Selon la réglementation Mastercard, l’entreprise considère l'hébergement de fichiers comme une activité à haut risque, notamment lorsque l'intermédiaire autorise la dissémination des liens sur des sites tiers et que des fichiers hébergés dans ses serveurs se retrouvent dans les moteurs de recherche. Des menaces de lourdes sanctions financières pèsent sur les solutions partenaires qui viendraient à outrepasser ces dispositions (jusqu’à 25 000 dollars par mois).

Visa impose d’ailleurs une réglementation similaire en Europe, pour les acteurs qui utiliseraient ses solutions dans ce secteur (p.528 de ce document).

Selon nos informations, une banque de première importance va prochainement être trainée devant les tribunaux, toujours à la demande de DStorage, lequel cherche toujours une solution d’accompagnement au développement de son activité. 

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