Au travers d’une proposition de loi déposée en fin de semaine dernière, le député Olivier Falorni souhaite rendre obligatoire l’installation de caméras de surveillance dans les abattoirs français. Un dispositif qui fait craindre à certains qu’il se transforme en outil de surveillance des salariés.
Après la diffusion de nombreuses images « chocs » (animaux égorgés sans étourdissement suffisant, vaches abattues en gestation, maltraitances diverses...), une commission d’enquête parlementaire s’est penchée sur les conditions de travail dans les abattoirs français, avant de remettre ses conclusions (PDF) au mois de septembre.
Ce sont ces préconisations qu’Olivier Falorni (ex-PS) – suivi par une trentaine de députés de tous bords – entend mettre en œuvre avec cette proposition de loi. Outre un renforcement des contrôles et l’instauration de comités locaux de suivi, l’élu veut notamment rendre obligatoire l’installation de caméras dans toutes les zones des abattoirs dans lesquelles des animaux vivants sont manipulés.
Ces yeux électroniques surveilleraient plus exactement « tous les lieux d’acheminement, d’hébergement, d’immobilisation, d’étourdissement, d’abattage et de mise à mort des animaux ». Celui qui avait battu Ségolène Royal lors des législatives de 2012 insiste sur le fait qu’il ne s’agit « en aucun cas de vidéo-surveillance », mais de « contrôle vidéo ».
La protection animale comme « finalité exclusive »
« La finalité exclusive de cette installation est la protection animale », précise à cet égard son texte. Autrement dit, ces images ne pourront pas servir à vérifier si les salariés font bien leur travail ou ne s’adonnent pas à d’autres activités. Seuls seront autorisés à visionner les vidéos (conservées pendant un mois au maximum) les services de contrôle vétérinaire, la direction de l’établissement ainsi que les représentants du personnel.
D’après Olivier Falorni, cette réforme « est aujourd’hui nécessaire pour rétablir le lien de confiance entre les consommateurs et les abattoirs ». Sa proposition de loi prévoit toutefois que ces images pourront également être utilisées « à des fins de formation des salariés », à condition qu’un accord collectif soit trouvé à ce sujet.
Une situation exceptionnelle qui justifie la surveillance des salariés
Mais qu’en dit la CNIL ? Auditionnée par la commission d’enquête parlementaire, l’institution a fait savoir qu’elle n’était « pas très favorable à la surveillance permanente des salariés », mais qu’elle admettait ce genre de dispositif « dans des cas exceptionnels » – par exemple pour lutter contre le vol. Dans le cas présent, la protection animale serait une finalité acceptable aux yeux de la gardienne des données personnelles.
Il faudrait toutefois que les installations déployées dans les différents abattoirs soient proportionnées : « Très concrètement, et de façon assez casuistique, la délégation de la CNIL qui viendrait s’assurer du respect de ce principe vérifiera l’orientation des caméras, leur nombre, leurs horaires de fonctionnement, leur capacité à conserver les images, à enregistrer le son, la possibilité de visionnage à distance, etc. » a expliqué aux députés un représentant de l’autorité administrative indépendante.
La proposition de loi d’Olivier Falorni se montre cependant muette sur l’accompagnement (notamment financier) des abattoirs, qui fait pourtant figure de point-clé de cette réforme.