Un rapport sénatorial plaide pour une expérimentation du revenu de base

Tout revenu et tout bronzé
Droit 4 min
Un rapport sénatorial plaide pour une expérimentation du revenu de base
Crédits : starfotograf/iStock

Et si certains départements proposaient un revenu de base inconditionnel, d’au moins 500 euros par mois, aux habitants de quelques territoires ? C’est en tout cas ce que propose un rapport présenté hier au Sénat.

« Le revenu de base en France : de l’utopie à l’expérimentation. » Le titre du rapport du sénateur Daniel Percheron (PS) a le mérite d'annoncer d’emblée la couleur. Alors que la robotisation et l’automatisation des tâches risquent de menacer de nombreux emplois à plus ou moins long terme, les auditions menées par le parlementaire ces trois derniers mois l’ont conduit à la conclusion qu’il n’était pas opportun d’introduire aujourd’hui dans notre pays un revenu universel, qui serait versé à chaque individu sans aucune condition (d’âge, d’emploi ou de ressources, notamment).

« Le revenu de base n’a pas fait aujourd’hui la preuve de ses avantages par rapport à d’autres évolutions de notre système social » retient ainsi le rapporteur, soulignant que les expériences menées à l'étranger « ne sauraient être des modèles à reproduire sans discussion ni adaptation et ne sont pas davantage à même de démontrer à elles seules la pertinence de l’instauration d’un revenu de base dans notre pays ».

Daniel Percheron demeure néanmoins séduit par les potentiels avantages d’une telle réforme : lutte contre la pauvreté (notamment en résolvant le problème du non-recours aux aides sociales), baisse des coûts administratifs de gestion, plus de problèmes de fraude, etc. À ses yeux, ce dispositif permettrait surtout « d’accompagner la mutation de notre économie à l’heure de la robotisation et du numérique ». Le revenu de base est ainsi présenté comme « un « filet de sécurité » atténuant les effets de la restructuration de l’emploi, voire un substitut aux revenus liés à l’emploi pour les personnes qui ne sont plus en mesure d’en occuper un compte tenu d’exigences de qualification qui les dépassent ».

Expérimenter pour évaluer

Pour avancer sur ce dossier, la mission d’information en appelle à une expérimentation – similaire à celle menée dans le passé pour le RSA –, dont elle fixe les grandes lignes. D’une durée de trois ans, cette évaluation n’aurait lieu que dans « plusieurs territoires situés dans des départements volontaires » (probablement quelques communes, pourquoi pas de tailles diverses). Le nombre de bénéficiaires devrait être « suffisant pour que les données récoltées soient signifiantes, c’est-à-dire entre 20 000 et 30 000 personnes », tous territoires confondus.

Sur l’épineuse détermination du montant du revenu de base qui serait versé à ces personnes, Daniel Percheron souhaite que celui-ci soit au moins égal au RSA (environ 525 euros). Cette aide viendrait se substituer aux minimas sociaux (RSA, ASS, AAH...) perçus par les personnes faisant l’objet de l’expérimentation, « jusqu’à concurrence de leur montant, laissant au bénéficiaire tout reliquat supérieur, et qui ne serait pas imposable compte tenu des difficultés constitutionnelles d’une expérimentation en matière fiscale ». Le coût de l’opération serait pris en charge par l’État, pour une addition « de l’ordre de 100 à 150 millions d’euros par an ».

Différents types d’allocation pourraient être évalués :

  • Un revenu de base inconditionnel : chaque bénéficiaire serait libre de l’utiliser à sa guise.
  • Un revenu de base inconditionnel mais « avec obligation d'utiliser l'allocation à des fins spécifiques » : le bénéficiaire devrait utiliser ces fonds par exemple pour des achats alimentaires, des actions de formation, des frais de transport...
  • Un revenu de base « conditionné au respect d'une obligation spécifique » : le bénéficiaire pourrait par exemple être tenu de suivre une action de formation ou des mesures de recherche d'emploi actives. « Deux variantes seraient possibles : dans l'une, le revenu serait versé mais susceptible d'être retiré par la suite en cas de méconnaissance des obligations ; dans l'autre, le versement n'interviendrait qu'une fois constaté que l'intéressé a commencé à remplir ses obligations. »

Ce n’est qu’à l’issue de ce test grandeur nature, destiné notamment à mesurer et comparer « les effets concrets de plusieurs modalités d’un revenu de base sur plusieurs segments de la société, en particulier les 18-25 ans et les 50-65 ans », que l’introduction d’une telle réforme au niveau national pourrait être envisagée.

Épineuse question du coût

Resterait alors à se pencher sur l’épineuse question du coût de ce revenu de base à l’échelle nationale. Selon le montant mensuel envisagé (les principales propositions allant de 500 à 1 000 euros par mois), « le coût « brut » de l’introduction d’un revenu de base serait compris entre 300 et 700 milliards d’euros par an », estime le rapport. Ce coût serait cependant moindre si le revenu de base remplaçait diverses aides existantes – de type RSA, allocations familiales, etc. « Son coût « net » dépend donc du degré de substituabilité par rapport aux prestations sociales existantes – tout ou partie des minima sociaux, en y ajoutant le cas échéant les aides au logement ou les prestations familiales, voire des prestations contributives » conclut Daniel Percheron.

« Le financement par l’impôt reste la solution techniquement la plus réaliste » note-t-il.

Avant d’en arriver là, le Parlement devra nécessairement donner son feu vert à des dispositions législatives définissant les modalités de l’expérimentation voulue par Daniel Percheron. Au regard du calendrier politique et de la frilosité du gouvernement et de l'opposition sur ce dossier, un tel vote semble toutefois peu probable sous l’actuelle législature...

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