Demain, Canal+ lancera une promotion à travers une offre limitée à 20 euros, sans engagement. Celle-ci sera le top départ d'une refonte bien plus globale, qui va prendre place au cours des prochains mois et ne manquera sans doute pas de créer du remous.
Cela n'aura finalement pas tardé. Après une première offensive ce week-end, le groupe Canal+ commence à en dire plus sur ses nouvelles offres. Et cette fois, cela passe directement par Maxime Saada, qui s'exprime dans Le Figaro.
Une offre à 20 euros par mois pour Canal+, mais sous conditions
Le directeur général y fait deux annonces principales concernant la chaîne phare du groupe : un nouveau décodeur est attendu pour 2017 (sans doute pour faire oublier le Cube S) et une offre spéciale limitée à 50 000 abonnés sera lancée demain. Celle-ci sera sans doute un test avant la refonte prévue pour octobre. Elle proposera la chaîne Canal+ seule, sans engagement et à 20 euros par mois.
Attention néanmoins, pour ce prix il sera seulement possible de l'utiliser sur PC, tablette et smartphone (via MyCanal). Il sera intéressant de voir comment la Xbox One sera considérée, puisque celle-ci dispose aussi d'une application MyCanal, mais n'est pas reconnue comme un décodeur à part entière.
Outre ce test, on apprend peu de choses sur la refonte des offres, si ce n'est qu'elle sera « modulaire et plus accessible qu'aujourd'hui ». Cela n'est pas vraiment une surprise, puisqu'il s'agit là des deux plus grands archaïsmes de l'offre actuelle du groupe, comme nous l'expliquions dans un précédent article.
Lutter non plus contre Netflix, mais contre les GAFA
Canal+ semble néanmoins avoir trouvé en Vivendi une occasion d'élargir le spectre de sa marque, ce qui lui permet de marquer sa différence avec des offres telles que celles de Netflix qui se concentre sur le cinéma et les séries. Ainsi, le groupe se rêve sans doute plutôt en concurrent des GAFA et leurs services multi-thématiques.
« Plus largement, nous souhaitons devenir le leader du home entertainment à partir de l'ensemble des actifs de Vivendi en créant prochainement une plateforme Canal sur tous les écrans, qui proposera via abonnement ou à l'acte des films, des séries, des émissions, des docs des chaînes du groupe ou de tiers disponibles en téléchargement, en linéaire ou en streaming… Avant d'y ajouter la musique ou les jeux vidéo » indique ainsi Maxime Saada à nos confrères.
Pourra-t-on demain jouer à des jeux Ubisoft en streaming à travers une offre CanalGaming si la prise de contrôle de l'éditeur arrive à son terme ? Un service CanalMusic sera-t-il proposé en concurrence à Spotify ou Deezer (désormais passé sous pavillon américain) ? C'est sans doute certaines des idées sur laquelle planche le groupe. Espérons que le service de SVOD CanalPlay aura droit à son petit lifting et à une stratégie plus claire et plus offensive au passage.
Renforcer l'offre via une chronologie des médias plus favorable
Quoi qu'il en soit, l'autre bataille sera celle de la croissance des abonnés sans détruire son chiffre d'affaires. Outre des offres ponctuelles à tarif réduit et sans engagement, le groupe va miser sur la vente en gros par les opérateurs pour séduire un nouveau public, comme nous l'expliquions hier. Il lui faudra aussi rester ferme sur ce qui fait le cœur de son offre payante : le sport, les séries, le cinéma.
Sur ce dernier point, le « grand argentier du cinéma » semble décidé à jouer de son influence pour obtenir une retouche de la chronologie des médias. Pour mémoire, ce dispositif orchestre le rythme de sortie des films sur les différents supports, du cinéma jusqu’aux chaînes gratuites. À ce jour, suite à l’accord du 6 juillet 2009, les services de vidéo à la demande (vente ou location) profitent de la première fenêtre de tir ouverte 4 mois après la sortie nationale en salle.
Canal+, et les autres services de cinéma de premières diffusions qui ont conclu un accord avec les organisations professionnelles, interviennent dix mois après cette date. Maxime Saada, aimerait avancer cette période à six mois, au motif que si « nous sommes convaincus que le cinéma constitue l'avantage compétitif durable de Canal+, […] il est indispensable de le revaloriser auprès de nos abonnés ». En somme, des sorties plus fraiches sur l’un des gros financeurs du secteur afin de renforcer l'intérêt de son offre.

Seulement, cette mécanique ne va pas être neutre, déjà pour la première fenêtre d’exposition. Si elle reste intacte, la VOD n’aura que deux mois d’oxygénation, contre quatre donc aujourd’hui. De même, la fenêtre suivante, à savoir les services de télévision en clair et les services payants autres que de cinéma, arrive à 22 mois, laissant donc à Canal+ 16 longs mois d’exclusivité contre 12 actuellement, et ainsi de suite pour les autres fenêtres.
En clair, l’impact sur les autres fenêtres risque d’être douloureux si rien ne bouge : les primo arrivants devant plus rapidement laisser place à la chaîne, ceux arrivant en troisième position étant priés de lui laisser plus de temps. « Nous sommes engagés dans une refonte de notre modèle, et nous avons besoin que nos partenaires se mobilisent. En contrepartie, nous nous engageons à sécuriser le financement du cinéma. La filière a toujours été avec nous. Elle doit parier sur la relance de Canal+ » prévient Maxime Saada, sans doute conscient qu'il ouvre là le front d'une nouvelle bataille qui est tout sauf gagnée d'avance.