Le projet OpenOffice va mal. Le vice-président d’Apache OpenOffice a indiqué dans un courrier que la fermeture du développement était envisagée. La raison invoquée est simple : il n’y a pas assez de développeurs compétents pour maintenir un bon rythme, posant un vrai problème sur la gestion des failles.
OpenOffice est pour beaucoup l’incarnation du logiciel libre à succès. Ses sources étaient pourtant fermées à ses débuts, ne devenant ouvertes qu’en 2001. Son utilisation n’a fait que croitre durant une décennie, posant la suite bureautique en alternative viable à Office de Microsoft dans de nombreux cas. En 2011 cependant, le rachat de Sun par Oracle provoque un fort mécontentement. Des développeurs choisissent alors de « forker » le projet et de créer LibreOffice, qui sera accompagné plus tard de la Document Foundation pour en accompagner le développement.
Le rythme de parution des nouvelles versions d’OpenOffice s’est depuis ralenti de manière très sensible. Comme noté par Ars Technica, il n’y a eu que deux nouvelles versions en 2014, et une seule en 2015, d’ailleurs la dernière en date (4.1.2). Pendant ce temps, LibreOffice a aligné quinze nouvelles moutures en 2015. Si le nombre de versions ne fait pas tout, il est un signe évident d’activité intense.
Un souci de sécurité révélateur
Cette chute dans le rythme a fini par poser un vrai problème quand une faille s’est déclarée. Son découvreur l’avait signalée en début d’année, et si un patch était bien en cours d’élaboration, le bulletin de sécurité n’a été publié qu’en juillet, et le correctif fin août. La brèche était pourtant sérieuse, pouvant provoquer une exécution arbitraire de code dès qu’un document spécialement conçu était ouvert. À ce titre, le bulletin de sécurité d’OpenOffice était représentatif de la situation : avant que ne soit publié le précieux correctif, il était recommandé d’utiliser LibreOffice ou Office pour contourner le problème.
L’affaire a provoqué une remise en cause au sein du comité d’OpenOffice, et ce d’autant plus que l’Apache Software Foundation réclamait peu après une marche régulière de bulletins mensuels. Conséquence, le vice-président d’OpenOffice, Dennis Hamilton, s’interroge. Dans une lettre intitulée « Qu’impliquerait une fermeture d’OpenOffice ? », il évoque la possibilité de clôturer le projet et ce que cela signifierait.
Les conséquences d'une fermeture éventuelle
Le code source resterait en place, mais tout signe d’OpenOffice comme produit destiné aux utilisateurs finaux serait gommé. Il n’y aurait plus de travaux sur le code, plus de nouvelles versions, plus de comptes Twitter et Facebook, plus de mailing lists et bien entendu plus de comité de gestion. L’idée d’une fermeture reste hypothétique, mais que le président se pose la question reste significatif, surtout quand il donne des pistes sur la manière de procéder.
Dans la conversation qui a suivi, l’ingénieur logiciel Jim Jagielski (cofondateur de l’Apache Software Foundation) propose de ne plus considérer OpenOffice comme un produit fini. Son idée serait de transformer la suite en un framework bureautique, un moteur qui pourrait alors être repris dans d’autres projets, destinés eux à l’utilisateur final.
Une partie des développeurs n'est pas d'accord
Certains dans la discussion semblent dans tous les cas d’accord pour dire qu’il existe actuellement trop peu de développeurs compétents pour permettre au projet de garder un rythme sain : une demi-douzaine à peine travaillent à temps plein sur le code. Cependant, tous n’acceptent pas l’idée d’une fin pour OpenOffice. Beaucoup reprochent à Hamilton le simple fait d’avoir exposé publiquement ces questionnements, qui risquent de prendre un aspect « prophétique une fois que le sujet touchera la presse ». Certains critiquent le calendrier d’une telle lettre, tandis que d’autres estiment que même si OpenOffice devait disparaître, les efforts devraient quand même se concentrer sur une nouvelle version, car de nombreux apports sont prêts.
En clair, rien ne permet pour l’instant d’affirmer qu’OpenOffice va s’arrêter. Il est cependant évident que les interrogations sont vives, particulièrement sur la gouvernance du projet et ses priorités. On ne sait par ailleurs pas quand une nouvelle version sera publiée. Pendant ce temps, LibreOffice continue son travail et de tirer la couverture, à tel point que bon nombre de distributions Linux l’intègrent par défaut en remplacement d’OpenOffice.