Bouygues Telecom : la réorganisation des RTT divise les syndicats

Du oui, du non et du ni oui ni non
Economie 8 min
Bouygues Telecom : la réorganisation des RTT divise les syndicats

Le projet d'accord sur la réorganisation du temps de travail chez Bouygues Telecom fait couler beaucoup d'encre. Sur la base du volontariat, certains salariés pourront travailler moins d'heures par semaine, avec une baisse du nombre de RTT. Du côté des syndicats, il y a du pour, du contre et un qui ne s'y opposera pas.

Il y a une dizaine de jours, Bouygues Telecom annonçait à nos confrères de l'AFP qu'il comptait mettre sur pied une réorganisation du temps de travail, avec une modification des RTT pour près de 5 500 salariés du groupe. Un changement qui s'inscrit probablement dans la ligne d'un mouvement de fond lancé par l'opérateur mi-2014 afin de s'assurer « un avenir autonome ». La CFTC, le syndicat majoritaire ne s'y opposera pas, tandis que FO signera cet accord. De son côté, la CFDT le dénonce et demande son retrait

Bouygues Telecom veut un accord pour réorganiser le temps de travail

Après plusieurs réunions avec les représentants syndicaux, le groupe a lancé une consultation des instances du personnel, qui est ouverte jusqu'au 21 septembre. Selon un porte-parole cité par nos confrères, l'objectif est de « ramener progressivement tout le monde à 35 heures hebdomadaires, sans changer le nombre d’heures travaillées à l’année ». 

Contacté par nos soins, Bouygues Telecom confirme qu'il souhaite bien mettre en place « une révision de l'organisation du temps de travail ». L'opérateur nous explique que certains sont encore actuellement sur des contrats datant de 2000 avec 39 heures par semaine, donc avec des RTT en contrepartie.

« Ces gens bénéficient de beaucoup de RTT, 23 à l'année. Aujourd'hui la norme dans ces métiers-là, chez nos concurrents, chez les prestataires, chez n'importe qui, est de 35 heures et 0 RTT, car on respecte alors le temps de travail légal » nous explique Bouygues Telecom. L'opérateur souhaite trouver un accord afin d'arriver « progressivement » à 35 heures travaillées par semaine.

Il faut par contre distinguer plusieurs cas. Les téléconseillers qui sont à 39 heures avec 23 jours de compensation et qui pourront passer à 37 heures avec 12 RTT, ou bien descendre à 35 heures sans aucune RTT. Dans les deux cas avec une « incitation » sous la forme d'une hausse de salaire de 2 %.

Pour les autres catégories d'employés et de techniciens, seul le palier à 37 heures avec 12 RTT est proposé. Enfin, concernant les cadres au forfait jour, les directeurs et leurs adjoints, le groupe leur propose de baisser le nombre de RTT (entre 2 et 8 de moins) en échange d'une hausse de salaire (de 1,5 à 3 % suivant les cas).

Tous les syndicats ne sont pas sur la même longueur d'onde

Bouygues Telecom nous explique que ce projet d'accord ne prévoit aucun changement sur la durée de travail annuel des employés, ainsi que sur leur rémunération (hormis la hausse de 2 % s'ils acceptent la nouvelle organisation bien évidemment). Un point qui nous a d'ailleurs été confirmé par deux représentants syndicaux. 

Pour Nicolas Faber de la CFTC, « ce n'est pas une diminution ou une suppression des RTT chez Bouygues Telecom ». Même son de cloche chez FO avec Bernard Allain qui explique que « les 35 heures ne sont pas du tout remises en cause ». Tous les syndicaux ne sont par contre pas sur la même longueur d'onde face à cet accord et les tensions commencent à se faire sentir, notamment avec la récente annonce de la CFDT.

La CFDT dénonce cet accord qui serait « un plan de départ déguisé »

En effet, la troisième organisation syndicale de Bouygues Telecom est récemment montée au créneau pour dénoncer « un accord risqué pour les salariés »Le syndicat ajoute qu'ils « ont déjà fait beaucoup d'efforts : l'acquisition d'environ 1,9 million de clients supplémentaire s'est faite en contrepartie de la suppression de 2 600 postes » depuis décembre 2012.

Elle demande donc l'arrêt de ce projet qu'elle présente comme « un plan de départ déguisé ». Décidément très remonté dans son tract, le syndicat pointe également un risque pour la santé des salariés, car il est question « d'enlever des jours de repos RTT à des salariés ayant une importante charge de travail ».

De plus, cela ferait peser un « risque sur les emplois des salariés déjà en place : la direction aurait intérêt à remplacer un CDC avec 23 JRTT par un nouvel embauché avec 0 JRTT ». Il en serait de même pour les autres catégories de salariés concernées par ce plan de réorganisation :

De plus, cela aura pour effet de créer « un cadre social à deux vitesses » puisque les nouveaux employés de Bouygues Telecom seront automatiquement recrutés avec les modalités de cet accord. Quoi qu'il en soit, les contreparties proposées seraient « inéquitables », car cela reviendrait à « renoncer à 23 JRTT ou à 11JRTT pour 2% », une équation partielle qui laisse de côté la baisse du temps de travail dans la semaine.

FO le signera « sans l'ombre d'une hésitation » 

Chez Force Ouvrière par contre, c'est la « surprise ». Bernard Allain, délégué central FO chez Bouygues Telecom, annonce qu'« il y a un buzz incroyable autour de cet accord ». Il nous explique « que l’on soit à 39 heures ou à 35 heures, on reste sur la même durée annuelle, 1 607 h ».

FO, deuxième syndicat de Bouygues Telecom, présente cet accord comme étant « un compromis basé sur le volontariat », ce dernier point est d'ailleurs très important pour le syndicat, qui n'aurait pas du tout été du même avis dans le cas contraire. FO annonce dans la foulée qu'il signera « sans l'ombre d'une hésitation » cet accord.

Bernard Allain nous explique également que, « si aucun accord ou compromis n’avait été trouvé, la direction avait annoncé très explicitement son intention de dénoncer les accords actuels, et imposer (après la période de dénonciation) le passage, sans volontariat, au système réduit ». De plus, « le fait que l’entreprise signe cet accord avec un syndicat (FO) rend difficile un rétropédalage de sa part[...] Ce n’est donc pas une protection stricte, c’est un « compromis temporel ». D’ailleurs les deux autres syndicats, tout en ne signant pas, ne font pas usage de leur droit d’opposition ».

Néanmoins, Bernard Allain pense que les volontaires ne seront pas légion, car « le système actuel permet de la souplesse dans la gestion des RTT par les salariés ». Ils peuvent les prendre dans leur totalité, ou bien en mettre une partie de côté dans un compte épargne temps.

Selon FO, la signature est prévue pour septembre et pourrait être appliquée dès le mois d'octobre. De leur côté, les nouveaux salariés embauchés à partir de cette date travailleront 35 heures, ce qui ne semble pas gêner outre mesure le syndicat, alors que c'est un des points noirs pour la CFDT. 

Force Ouvrière nous a transmis un tableau expliquant les conditions actuelles, ainsi que celles qui seront en vigueur à partir du 1er octobre pour les nouveaux employés et du 1er janvier pour les anciens : 

 FO Tract Bouygues Telecom

La CFTC ne se signera pas, mais ne s'y opposera pas

Nous avons également contacté Nicolas Faber, représentant syndical de la CFTC, le premier syndicat de Bouygues Telecom avec 40,3 % des voix lors du 1er tour. Notre interlocuteur explique que son organisation ne « ne signera pas cet accord, mais qu'elle ne s'y opposera pas », à cause d'une différence de position « plus sur la forme que sur le fond ».

Deux éléments le poussent à ne pas signer : « l'incompréhension de la part des collaborateurs sur ce projet et les motivations de la direction qui nous ont semblé en retrait par rapport à ce qu'on attendait de leur part ». Sur ce dernier point, notre interlocuteur ajoute que la direction n'a par exemple pas été en mesure de donner des exemples convainquant de projets qui n'avaient pas pu aboutir à cause de l'actuelle organisation du temps de travail. C'est d'autant plus l'incompréhension que « l'implication des salariés sur les quatre premiers mois de l'année a été totale ».

Si, dans le même temps, elle ne s'y oppose pas, c'est que « cet accord a été négocié ». Il est basé sur le volontariat et il y a une contrepartie financière pour ceux qui souhaitent sauter le pas vers le cette nouvelle organisation. Concernant le cas des nouveaux employés, c'est finalement assez simple pour Nicolas Faber : « ils signeront un contrat de travail avec les conditions qui sont écrites aujourd'hui, ils ont le choix de dire j'y vais ou je n’y vais pas ».

Sauf surprise, cet accord passera

Dans tous les cas, le représentant de la première organisation syndicale de Bouygues Telecom explique que « l'accord est applicable dans la mesure où il y a une organisation qui a plus de 30 %, qui l'a validé et qui a dit qu'elle le signerait ». Il ajoute qu'une « autre organisation qui n'a pas la capacité de signer cet accord à elle toute seule veut impérativement faire capoter le sujet et je trouve ça, je dirais, irresponsable ».

Il faudra maintenant attendre la fin des discussions et la signature effective de cet accord pour qu'il soit mis en place. Le calendrier prévoit pour le moment que les salariés pourront transmettre leur choix (sur la base du volontariat) à la direction à partir du 1er janvier. Il n'est par contre pas encore indiqué pendant combien de temps cette procédure sera mise en place. Dans tous les cas, le choix de passer sur 37h ou 35h est définitif et les employés n'auront pas la possibilité de revenir dessus.

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