Aux États-Unis, le service de CDN Cloudflare est impliqué dans deux affaires pour l'usage de ses services par des sites accusé de proposer du contenu piraté. Dans un cas, le plaignant réclame plusieurs millions de dollars à la société, quand dans l'autre, celle-ci se bat contre une injonction à couper le service sur plusieurs noms de domaine.
Pour certains ayants droit, Cloudflare est un allié actif du piratage. Le service de CDN et de protection contre les DDoS Cloudflare est ainsi attaqué sur deux fronts. D'un côté, le site pour adultes ALS Scan l'accuse de soutenir des sites « pirates » et de ne pas agir après de multiples signalements, quand de l'autre, des maisons de disque lui demandent de couper l'accès qu'il fournit aux contenus de MP3Skull.
Plus de 10 millions de dollars réclamés par ALS Scan
Dans une plainte déposée à la mi-juillet, publiée hier par Torrentfreak, ALS Scan affirme ainsi que Cloudflare contribue à la diffusion illicite de ses contenus, via son réseau de contenu et le masquage des informations des propriétaires des sites concernés.
« Les problèmes auxquels ALS fait face ne se limitent pas à la multiplication de sites proposant de sites pirates. Un nombre important de fournisseurs de services contribuent au développement de ces sites pirates en les soutenant et en commerçant avec eux » explique l'entreprise dans sa plainte. C'est la raison de son attaque de Cloudflare. Le réseau publicitaire JuicyAds est aussi concerné.
Le problème principal pour ALS Scan est que les deux services n'auraient pas cessé leurs activités avec cinq sites « pirates », signalés à plusieurs reprises par le plaignant. Cela même si ces sociétés disent bien couper le service des clients faisant l'objet de multiples demandes de « takedown » (retrait). Selon Torrentfreak, JuicyAds aurait finalement cessé de fournir ses publicités pour plusieurs sites signalés, après le dépôt de la plainte d'ALS Scan. Le tout s'articule dans le cadre du DMCA, la loi américaine qui régit les questions de copyright dans le numérique.
Si ALS en vient à s'attaquer à Cloudflare, c'est que les sites en question ont été peu coopératifs avec l'ayant droit. Celui-ci explique que si certains sites agissaient bien après des demandes de suppression de contenu, les mêmes ou d'autres réapparaissaient dès le lendemain aux mêmes endroits. ALS ne réclame pas moins de 10 millions de dollars, en plus des éventuels bénéfices réalisés via leur activité avec les sites « pirates ». Pour mémoire, l'un de ses clients les plus connus est The Pirate Bay. Selon Torrentfreak, Cloudflare et JuicyAds n'ont pas encore répondu à la plainte.
MP3Skull, pomme de la discorde entre majors et Cloudflare
Un autre dossier, lui, illustre bien l'intérêt du DMCA pour des acteurs comme Cloudflare. Le service a refusé d'agir à l'encontre de l'un de ses clients, condamné en début d'année pour violation du copyright. En mars, un tribunal américain a ainsi prononcé une injonction permanente contre le site et ceux qui « prennent une part active ou participent » à son activité. Le site doit donc disparaitre de la toile, après que les responsables du site n'ont pas pris la peine de se défendre en justice. Fin juin, l'avocat des maisons de disque plaignantes a demandé à Cloudflare de couper les services fournis à des adresses liées à MP3Skull.
C'est là que l'histoire se complique : dans une lettre du 12 août, Cloudflare indique au tribunal qu'il refuse la demande, même s'il peut être considéré comme contribuant à l'activité de MP3Skull, rapporte l'Electronic Frontier Foundation (EFF). Pour le CDN, il n'est pas question d'agir sans que les ayants droit ne passent par le DMCA. Dans le cadre du DMCA, un tribunal doit ainsi vérifier qu'une mesure à l'encontre d'un intermédiaire n'est pas trop lourde à appliquer pour lui.
Dans l'affaire MP3Skull, seule une demande de suppression des liens avec les domaines et adresses concernés a été émise, sans passer par la procédure du DMCA. Pour l'EFF, la clause qui concerne ceux qui agissent de concert avec un accusé n'est pas censée viser les entreprises qui lui fournissent un service. Elle doit encore moins outrepasser les mesures du DMCA, estime l'organisation. L'an dernier, elle avait d'ailleurs aidé Cloudflare à combattre une décision de justice qui lui aurait imposé de couper les services des clients utilisant un nom de domaine contenant « grooveshark », rappelle-t-elle.
Dans sa lettre, Cloudflare demande ainsi au tribunal de rejeter la demande des plaignants de bloquer les domaines liés à MP3Skull, ou de suivre les règles strictes imposées par le DMCA. Réponse au prochain épisode.