Renseignement : la surveillance hertzienne sera examinée par le Conseil constitutionnel

Exégètes 1 Bernard et Jean-Jacques 0
Droit 3 min
Renseignement : la surveillance hertzienne sera examinée par le Conseil constitutionnel
Crédits : Marc Rees

Le Conseil d'État vient de rendre sa décision, reproduite ci-dessous : la surveillance des communications hertziennes en France pose véritablement un problème. Et pour cause, comme l'ont épinglé la Quadrature du Net, FDN et FFDN notamment, ces opérations intrusives ne sont visiblement pas encadrées par les textes. La parole est maintenant au Conseil constitutionnel.

Depuis la loi de 1991 sur le secret des correspondances, revue et corrigée par la loi sur le renseignement, une étrangeté pourrit ces textes sur la sécurité. Normalement, lorsqu’un service du renseignement veut espionner telle cible, même celle éloignée d’une menace terroriste, il doit passer par un round d’autorisation et d’avis.

Il faut notamment celle du Premier ministre, puis l’avis consultatif de la Commission de contrôle des techniques du renseignement (CNCTR). Toutefois, cet encadrement a pour limite celles du fil. Explication : l'article L.811-5 du Code de la sécurité intérieur nous dit que la surveillance des échanges hertziens n’est pas concernée par cet encadrement :

« Les mesures prises par les pouvoirs publics pour assurer, aux seules fins de défense des intérêts nationaux, la surveillance et le contrôle des transmissions empruntant la voie hertzienne ne sont pas soumises aux dispositions du présent livre, ni à celles de la sous-section 2 de la section 3 du chapitre Ier du titre III du livre Ier du code de procédure pénale ».

La Quadrature du Net, de French Data Network, la Fédération FDN et l’association Igwan.net ont tous déposé voilà quelques mois une demande de question prioritaire de constitutionnalité (QPC) devant le Conseil d’État, dernière étape avant le Conseil constitutionnel. Leur reproche  ? Un cruel défaut d’encadrement de la surveillance de tous les moyens électroniques passant par les airs.

Les Exégètes et une problématique jugée « sérieuse »

Le 6 juillet dernier, ils ont trouvé tout le soutien du rapporteur public qui, dans ses conclusions, a découvert une « formule obscure restée inchangée » pour laquelle « il n'est pas évident de trouver de justification ». Et celui-ci d’expliquer également que cette surveillance sans contrainte « est susceptible de s'appliquer à toutes les communications mobiles ». On peut y ajouter tous les échanges avec une clef Wi-Fi et une box, ou n'importe quel autre moyen ne nécessitant pas de liaison filaire, ce qui fait un peu beaucoup en 2016.

Dans son arrêt rendu aujourd’hui, le Conseil d’État juge sérieuse la problématique soulevée par les « Exégètes », à savoir que par « ces dispositions, qui soustraient la surveillance et le contrôle des transmissions empruntant la voie hertzienne à tout dispositif d’encadrement et de contrôle », le législateur a laissé un trou béant. Il n’a pas exercé pleinement sa compétence, celle visant notamment à garantir le droit au respect de la vie privée, tout en négligeant le droit au recours effectif. Face à une telle mesure intrusive, un citoyen est en effet privé de tout moyen d’action en justice, alors en outre qu'il n'a aucun moyen de savoir qu'il est surveillé. 

La parole au Conseil constitutionnel

La haute juridiction a considéré à l'instant que les conditions justifiant la QPC, à savoir une problématique adossée à un litige en cours, non encore auscultées par le Conseil constitutionnel et surtout présentant un caractère « sérieux » étaient toutes remplies.

Le Conseil constitutionnel a désormais trois mois pour vérifier la conformité constitutionnelle de ce curieux article. Théoriquement, il pourra le déclarer conforme, appliquer une réserve d’interprétation ou bien l’annuler. Dans cette dernière hypothèse, toute la surveillance des communications hertziennes retombera dans le droit commun. Avec l’espoir que la Commission nationale de contrôle des techniques du renseignement puisse jouer son rôle, ce qui n’est pas évident en l’état, son budget n’étant pas pour l’instant calibré à une telle surcharge de travail.

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