Le brouillage des portables « n'est pas à l'ordre du jour » de l’Éducation nationale

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Droit 4 min
Le brouillage des portables « n'est pas à l'ordre du jour » de l’Éducation nationale
Crédits : BraunS/iStock

Cette année encore, aucun brouilleur d’onde ne sera utilisé afin d’éviter les tricheries au bac. Le ministère de l’Éducation nationale affirme que le déploiement de tels appareils « n'est pas à l'ordre du jour », y compris afin d’empêcher d’une manière plus générale les élèves d’utiliser leurs mobiles en cours.

Convié hier à une audition relative au brouillage des communications électroniques, Mathieu Jeandron, le Directeur du numérique pour l’éducation, a détaillé devant l’Assemblée nationale les nombreuses raisons qui poussaient la Rue de Grenelle à écarter (de longue date) cette solution. « Dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges, l'utilisation durant toute activité d'enseignement et dans les lieux prévus par le règlement intérieur, par un élève, d'un téléphone mobile est interdite », indique pourtant l’article L511-5 du Code de l’éducation – ce qui exclut de fait les lycées.

Une « disproportion claire » entre bénéfices et dommages collatéraux du brouillage

« Évidemment, il ne s'agit pas d'avoir un discours angélique sur ce qui peut se passer dans les établissements », a tout d’abord soutenu Mathieu Jeandron. Selon lui, le brouillage des téléphones présente cependant bien trop de « problèmes collatéraux » : « Nous développons de plus en plus les usages pédagogiques des outils numériques. Ces usages seraient limités également par le brouillage, sans compter les questions de coût que ça représenterait pour aller équiper plusieurs dizaines de milliers d'écoles, d'établissements publics d'enseignement... » Autre souci, connu également de l’administration pénitentiaire : en cas de proximité avec d’autres bâtiments, ceux-ci peuvent se trouver impactés par le brouillage...

« Sans compter l'inefficacité de la mesure, a poursuivi le Directeur du numérique pour l’éducation. Certes, Periscope ne pourrait pas être utilisé en direct, mais rien n'empêche dans ce cas-là un élève de filmer ce qui se passe en cours et de le poster le soir à la maison avec quasiment la même efficacité. »

Même pour les examens, le jeu n’en vaudrait pas la chandelle d’après Mathieu Jeandron. L’intéressé a pointé une nouvelle fois le coût d’un tel dispositif, ainsi que sa complexité de mise en œuvre pour seulement « quelques jours  [d’utilisation] par an ». Les organisateurs et surveillants communiquent par ailleurs par téléphone durant le bac par exemple, ce qui se révèle ici aussi un effet collatéral pour le moins épineux...

Le ministère mise sur la prévention et la dissuasion

« On a donc une disproportion claire entre les bénéfices d'une mesure de brouillage et les effets collatéraux » a conclu Mathieu Jeandron. Avant de souligner : « Derrière, ça ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire. Nous travaillons par exemple avec la CNIL sur l'internet responsable, nous avons tout un tas de choses au programme sur l'éducation aux médias et à l'information », etc. Le ministère de l’Éducation nationale mise ainsi sur des actions de prévention et des mesures de dissuasion, notamment celles prévues dans les règlements intérieurs (sanctions disciplinaires).

jeandron
Crédits : Assemblée nationale

Pour les examens, la Rue de Grenelle compte « sur l'efficacité de la surveillance, l'efficacité des mesures de dissuasion – puisqu'un tricheur serait amené à être exclu de tout examen pendant longtemps ». Même si Mathieu Jeandron ne l’a pas évoqué hier, rappelons que des détecteurs de téléphones sont censés circuler aléatoirement dans les centres d’examens (voir notre article). « La deuxième chose c'est que l'évolution, l'arrivée du numérique et les attentes – y compris des employeurs – en matière de compétences font que progressivement, la partie d'évaluation des compétences tout au long de la scolarité se développe et, sans remplacer à ce stade les examens finaux, constitue une partie croissante de l'évaluation pour l'obtention des diplômes et évidemment il est hors de question de supprimer le numérique dans ce genre d'évaluation de compétences. »

Un brouillage qui serait de toute manière illégal ?

Mathieu Jeandron n’a pas évoqué une barrière d’ordre juridique pourtant avancée en novembre 2012 par le ministre de l’Éducation nationale pour justifier le non-recours aux brouilleurs. Au travers d’une réponse écrite à un député, Vincent Peillon expliquait à l’époque que l'article L33-3-1 du Code des postes et des communications électroniques prohibe expressément « l'utilisation de tout dispositif destiné à rendre inopérants des appareils de communications électroniques de tous types, tant pour l'émission que pour la réception ». Il est toutefois précisé que le recours aux brouilleurs reste admis, à titre dérogatoire, « pour les besoins de l'ordre public, de la défense et de la sécurité nationale, ou du service public de la justice ». Or « les établissements scolaires ne sont pas mentionnés dans cette liste limitative », faisait valoir le premier ministre de l’Éducation du quinquennat Hollande.

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