L’activation « à la demande » des caméras-piétons (déjà) de retour à l’Assemblée

C'est rare d'avoir une saison 2 si rapidement en France
Droit 4 min
L’activation « à la demande » des caméras-piétons (déjà) de retour à l’Assemblée
Crédits : michaklootwijk/iStock

Alors que les nouvelles dispositions législatives applicables aux caméras-piétons utilisées par les forces de l’ordre sont en vigueur depuis 10 jours, certains députés PS proposent d’ores et déjà de les modifier... L’objectif ? Arriver à faire en sorte que ces appareils embarqués soient activés « à la demande » par les gendarmes et policiers, voire en permanence.

Expérimentés depuis 2013, ces joujoux électroniques à 1 200 euros pièce sont désormais encadrés par l’article L241-1 du Code de la sécurité intérieure – introduit par la récente loi de réforme pénale (publiée le 4 juin au Journal officiel). Policiers et gendarmes se voient ainsi tenus d’enclencher leurs caméras mobiles « lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident, eu égard aux circonstances de l’intervention ou au comportement des personnes concernées ». L’enregistrement n’étant pas permanent, chaque agent reste donc libre d’allumer ou non sa caméra.

Un angle-mort qui avait vivement attiré l’attention de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH). « Le pouvoir d'appréciation laissé à l'agent de police ou de gendarmerie quant à l'opportunité du déclenchement de la caméra ou encore l'orientation de la prise de vue sont problématiques. » Dans un avis en date du 17 mars, l’institution expliquait que le ministère de l'Intérieur estimait « qu'il s'agissait d'un faux problème car, en cas de difficultés, l'agent qui n'aurait pas activé la caméra devrait en répondre à son supérieur hiérarchique, le plaçant dans une " situation inconfortable " ». Par mesure de « totale transparence, et afin de garantir que ce dispositif protège tant les forces de l'ordre que les usagers », l’autorité demandait néanmoins au législateur « d'élargir l'initiative du déclenchement de l'enregistrement aux personnes faisant l'objet d'une intervention ».

Les sénateurs avaient obtenu gain de cause en CMP

C’est d’ailleurs le chemin qu’avait suivi l’Assemblée nationale, sous l’impulsion d’Élisabeth Pochon (PS). « Il m'a semblé nécessaire qu'il puisse y avoir une réciprocité de demande de déclenchement » s’était justifiée la député en commission, dès le mois de février.

La suite est connue : le Sénat a refusé qu’il puisse y avoir une activation « à la demande » des personnes concernées par une intervention des forces de l’ordre, au motif que la rédaction retenue serait porteuse d’insécurité juridique. « Il semble en effet difficile de définir les conditions dans lesquelles il sera considéré que la demande de déclenchement sera légitime : faut-il donner droit à toute demande même exprimée de manière violente ? Par ailleurs, en cas de non fonctionnement de la caméra, la procédure judiciaire éventuellement issue de l'intervention sera-t-elle caduque ? » s’était inquiété Philippe Paul (Les Républicains).

Le projet de loi de réforme pénale ayant été engagé sous procédure accélérée, une commission mixte paritaire fut initiée après une seule lecture par chambre (au lieu de deux en temps normal). Députés et sénateurs sont ainsi arrivés à un compromis général, lequel entérinait la position du Sénat – qui était aussi partagée par le gouvernement – sur l’activation des caméras-piétons... Au grand dam d’Élisabeth Pochon.

Le sujet revient au galop

La députée socialiste n’aura cependant pas tardé à remettre l’ouvrage sur le métier. Dans le cadre du projet de loi « Égalité et citoyenneté », débattu aujourd’hui et demain en commission spéciale, la parlementaire a déposé un amendement (co-signé par une dizaine d’élus PS) visant à revenir sur l’article L 241-1 du Code de sécurité intérieure. Chaque caméra-piéton devrait ainsi être activée :

  • Lors de tout contrôle ou vérification d’identité.
  • À la demande des personnes concernées par les interventions des agents de la police nationale et des militaires de la gendarmerie nationale.
  • À l’initiative des agents de la police nationale et des militaires de la gendarmerie nationale, lorsqu’un incident se produit ou, eu égard aux circonstances de l’intervention ou au comportement des personnes concernées, est susceptible de se produire.

« Chacun se sentant protégé par la présence d’une caméra filmant l’intervention, l’obligation de l’activer lors de chaque contrôle encouragera chacun au respect. Sécurisation de l’action des forces de l’ordre et apaisement des relations entre les forces de l’ordre et la population sont les objectifs affirmés du présent amendement » affirme Élisabeth Pochon.

Vers un enregistrement permanent ?

Un second amendement, porté cette fois par le rapporteur Razzy Hammadi, se veut encore plus radical : les caméras-piétons devraient enregistrer en permanence et en tous lieux les interventions des forces de l’ordre. « Il y a tout lieu de penser que le caractère systématique de ces enregistrements permettra d'apaiser les tensions et de préserver au mieux les droits des auteurs de l'intervention comme ceux des personnes qui en font l'objet, en levant la suspicion inévitablement attachée à un déclenchement discrétionnaire des caméras mobiles », explique le député PS.

Pour mémoire, ces caméras embarquées sont certes destinées à apaiser les relations entre la population et les forces de l’ordre, mais aussi – et surtout – à fournir des preuves en cas de procédure judiciaire (à l’encontre donc d’un contrevenant) ou disciplinaire (si c’est un fonctionnaire qui est mis en cause). Si tel n’était pas le cas, les images capturées doivent être effacées au bout de six mois. « Les personnels auxquels les caméras individuelles sont fournies ne peuvent avoir accès directement aux enregistrements auxquels ils procèdent » précise par ailleurs le Code de la sécurité intérieure.

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