Dans le cadre du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (loi Sapin 2), un député souhaite armer l’Autorité des marchés financiers d’un outil spécifique pour faire bloquer les sites d’investissements illégaux.
Dans le texte actuellement en discussion, le député PS Romain Colas s’inspire du blocage en vigueur contre les sites de jeux d’argent en ligne non agréés (loi ARJEL). Son amendement est en effet calibré, selon son exposé des motifs , pour « procéder au blocage rapide et définitif des sites internet illégaux, c’est à dire ceux détenus par des prestataires de services d’investissement qui ne disposent d’aucun agrément pour exercer en France ».
Juridiquement, il veut modifier le Code monétaire et financier pour permettre au président de l’AMF d’adresser aux « opérateurs offrant des services d’investissement en ligne non autorisés » une injonction de respecter la loi française.
D’abord des notifications, puis le juge
Parallèlement, cette mise en demeure serait adressée aux FAI et hébergeurs afin de les enjoindre « de prendre toute mesure propre à empêcher l’accès au contenu du service de communication au public en ligne proposé par l’opérateur mentionné au premier alinéa ». Soit donc d’en bloquer l’accès ou du moins de le rendre impossible d’une manière ou d’une autre.
En cas d’inexécution dans les huit jours, il aurait la possibilité de saisir le président du tribunal de grande instance de Paris aux fins d’ordonner, en la forme des référés, « l’arrêt de l’accès à ce service ». Le député prévoit enfin une dernière hypothèse, celle du contournement de la décision de blocage par l’éditeur du site. Dans un tel cas, la même autorité devrait à nouveau saisir la justice pour mettre à jour l’injonction initiale.
L’AMF peut obtenir le blocage d'un site
Cet amendement n’est pas franchement une révolution. En 2014, déjà, l’AMF avait déjà obtenu le blocage d’accès d’un site non agréé. Seulement, faute de disposition idoine, elle s’était alors reposée sur l’article 6-I-8 de la loi de 2004 sur la confiance dans l’économie numérique. Cette disposition rédigée en des termes très généreux permet à l'autorité judiciaire de prescrire, en référé ou sur requête, aux FAI et hébergeurs, « toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d'un service de communication au public en ligne ». L'AMF avait trouvé là un levier pour torpiller le site en cause.
L’avantage de cet amendement serait d’accompagner au plus près cette procédure qui, contrairement au blocage des sites pédopornographiques ou d’apologie du terrorisme, ne fait pas l’impasse sur le juge.