Depuis la Russie, Edward Snowden a participé hier à un symposium qui se tenait au Japon sur le thème de la surveillance dans la société moderne. Il y a averti l’assistance que le pays était sous surveillance de la NSA, qui savait presque tout des habitants.
En juin 2013, le robinet des révélations était ouvert par Edward Snowden. Métadonnées téléphoniques, programme Prism, surveillances des données étrangères passant par l’infrastructure américaine, missions sur le sol étranger, espionnage des communications des chefs d’État étrangers : les informations ont été nombreuses et accompagnées de divers documents.
Depuis, le lanceur d’alertes participe de temps à autre à des conférences portant justement sur le concept de surveillance et sa place dans la société moderne. C’était le cas hier au Japon, à l’université de Tokyo, Snowden y participant par l’intermédiaire d’une solution vidéo depuis la Russie, où il a trouvé refuge après avoir obtenu l’asile politique.
L'omniprésence de la NSA
Abordant le cas du Japon, Snowden a déclaré que la NSA (National Security Agency) surveillait le pays depuis longtemps : « Ils connaissent votre… opinion religieuse. Ils savent qui vous avez aimé. Ils savent de qui vous vous souciez… C’était notre travail d’établir le modèle de vie de n’importe quel individu ».
Cet emploi de la première personne du pluriel renvoie vers la période durant laquelle Snowden a été prestataire pour la NSA. Il a ainsi indiqué avoir vécu au Japon de 2009 à 2011 et qu’il était alors employé chez Dell. Son expertise technique lui a valu de participer à des missions, dont la mise en place d’un programme de surveillance sur la base aérienne américaine de Yokota, située à Fussa. Plus de 200 personnes étaient présentes, parmi lesquelles des journalistes et des avocats.
Une « presse libre dans une société ouverte »
Le lanceur d’alertes les a exhortées à réfléchir non seulement à la place que devait occuper la surveillance dans nos vies modernes, mais également la presse à creuser et à chercher des réponses : « L’objectif d’une presse libre dans une société ouverte n’est pas simplement de répéter ce que le gouvernement a à dire ». Elle doit remettre en question les réflexions et décisions, interroger sur les thématiques abordées.
Ce message particulier concerne en fait un cas précis. Snowden a cité en effet la loi de protection des secrets spécifiquement désignés. Votée en 2013, entrée en vigueur en 2014, elle permet aux institutions de classifier des informations comme secrets d’état si elles estiment qu’elles sont trop sensibles.
Le Japan Times, qui rapporte les propos du lanceur d’alerte, indique que ces informations peuvent aussi bien concerner la diplomatie que la défense, en passant évidemment par le contre-terrorisme. De plus, toute personne provoquant leur fuite s’expose à une peine de dix ans de prison, cinq ans en cas d’enquête sur les données. La loi a été préparée en 2013 dans le sillage des premières révélations de Snowden, et elle vise directement les lanceurs d’alerte.
Toujours des sables mouvants sous les pieds des lanceurs d'alerte
Les révélations de 2013 ont globalement provoqué de nombreuses interrogations sur le sort qui pouvait être réservé à ceux qui violent un secret pour révéler des failles dans un système, ou une situation dont ils estiment qu’elle devrait être connue du grand public. En France, la place à leur accorder n’est toujours pas fixée. En avril, le Conseil d’État demandait ainsi de définir un cadre juridique clair pour qu’ils puissent opérer, tout en évitant les débordements.
Quant à Snowden, il reste pour l’instant toujours coincé en Russie. Il a redit encore lors de la conférence hier son envie de rentrer aux États-Unis. Mais il ne le fera que lorsque la garantie lui aura été apportée qu’un procès équitable avec jury aura lieu, et non la promesse d’un tribunal militaire comme c’est le cas actuellement.