Pour lutter contre les contenus haineux, il n’y a pas mille solutions. Ou bien les intermédiaires se retrouvent plus directement responsables des contenus transmis, ou ils adoptent un code de conduite gorgé d’engagements. Cette voie a été consacrée hier par la Commission européenne.
Un code de conduite (PDF) a été dévoilé hier par l’institution bruxelloise avec quatre acteurs importants du Net : Facebook, Twitter, YouTube et Microsoft. Ce dispositif a pour ambition d’ « empêcher la propagation des discours haineux illégaux en ligne ».
Dans un contexte de menace terroriste, Vĕra Jourová, commissaire européenne pour la justice, estime en effet que « Les médias sociaux font malheureusement partie des moyens utilisés par les groupes terroristes pour radicaliser des jeunes, et par les racistes pour répandre la violence et la haine ». La Commission note d’ailleurs que « les récentes attaques terroristes et l’utilisation des médias sociaux par les groupes terroristes pour radicaliser les jeunes ont conféré une urgence particulière à ce dossier ».
Avec cet engagement, « les entreprises des technologies de l'information signataires de ce code de conduite s'engagent à continuer la lutte contre les discours de haine illégaux en ligne ». Aucune grande nouveauté donc, sinon qu’il est simplement précisé que les acteurs signataires « poursuivront notamment la mise au point de procédures internes et assureront la formation du personnel pour que la majorité des signalements valides puissent être examinés en moins de 24 heures ». Elles devront continuer d’ailleurs à renforcer leurs partenariats avec la société civile tout en travaillant à l’élaboration de contre-discours.
Dans le détail, ces acteurs promettent… :
- Des procédures « claires et efficaces d'examen des signalements de discours haineux illégaux », tout en interdisant « la promotion de l'incitation à la violence et aux comportements haineux ».
- La mise en place d’équipes spécialisées
- Un traitement en moins de 24 heures suivi au besoin d’un retrait ou d’un blocage d’accès
- Une information et une sensibilisation des utilisateurs
- D’informer les autorités sur leurs procédures de signalement, « afin d'accélérer et d'améliorer la communication » via des points de contacts
- Des partenariats avec des organisations de la société civile (OSC) composées d’experts afin que ceux-ci puissent signaler les contenus problématiques par le biais de rapporteurs de confiance
- Des collaborations intensifiées « pour renforcer les échanges de bonnes pratiques »
- La préparation de contre-discours indépendants, au besoin en passant par les OS
- Etc.
Contenants, contenus
On remarquera d’ailleurs que l’approche de la Commission est nettement plus prudente que celle poussée par les ayants droit. Ceux-ci aimeraient que les hébergeurs techniques soient plus directement responsables des contenus abrités dans leur serveur. L’enjeu est évidemment la mise en place de procédure de filtrage pro active, afin d’espérer nettoyer les réseaux de la présence de MP3 ou fichiers AVI frelatés.
De même, les États membres tout comme les acteurs du Net n’ont pas attendu l’action de la Commission européenne pour agir ou à tout le moins échanger sur ce sujet. En France, comme le relèvent de récentes auditions parlementaires, « un formulaire type de réquisition a été établi pour chaque opérateur — Twitter, Facebook, Google… — et intégré au logiciel de rédaction de procédure utilisé par les enquêteurs. Cette réquisition est transmise à l’Office « cyber », puis elle est adressée à l’opérateur. En cas d’urgence, un appel suffit ». Ce n'est qu'un exemple, mais selon Mireille Ballestrazzi, directrice centrale de la police judiciaire au ministère de l’Intérieur, « ce dispositif fonctionne bien. Je dois dire que le choc provoqué par les attentats du 13 novembre a été tel que nombre d’opérateurs n’ont pas attendu qu’on les sollicite et ont retiré d’eux-mêmes certaines images. »