La France se dote d'un registre public des trusts, accessible en ligne le 30 juin

La France se dote d’un registre public des trusts, accessible en ligne le 30 juin

Antisocial

Avatar de l'auteur
Xavier Berne

Publié dans

Internet

11/05/2016 4 minutes
16

La France se dote d'un registre public des trusts, accessible en ligne le 30 juin

Afin de lutter contre le blanchiment d’argent et l’évasion fiscale, le gouvernement vient d’annoncer l’ouverture, au 30 juin prochain, d’un registre public des trusts – un peu sur le modèle du registre du commerce et des sociétés. Il pourrait toutefois ne pas toujours être très facile de profiter de cet outil de transparence visant (pour l'instant) 16 000 entités.

C’est aux députés écologistes que l’on doit la mise en place de ce registre, puisqu’ils avaient réussi à faire adopter en juin 2013 un amendement (sur lequel Bernard Cazeneuve avait émis un avis défavorable) à cet effet. Ce dispositif placé sous la responsabilité du ministère de l’Économie et des finances « recense nécessairement les trusts déclarés, le nom de l'administrateur, le nom du constituant, le nom des bénéficiaires et la date de constitution du trust », précise désormais la loi du 6 décembre 2013 relative à la fraude fiscale, en référence à ce montage dont les rouages sont décrits plus précisément ici.

« Le trust n’est ni une personne physique ni une société ni quoi que ce soit, expliquait de son côté le commissaire Georges Moréas en 2010. C’est une entité, une réalité abstraite. Un acte par lequel une personne confie ses biens à une autre personne, afin que celle-ci les gère au profit d’une troisième personne, avant de les remettre à une quatrième personne – celle qui, à l’expiration du trust, empoche la mise. » 

Lors des débats parlementaires, le député Éric Alauzay (EELV) faisait valoir que « la constitution de trusts donne lieu à des phénomènes massifs d’évasion fiscale. Selon Transparency International France, 80 % des flux illicites mondiaux liés à l’évasion fiscale transiteraient par les trusts. Ces montages permettent également de diluer la responsabilité des entreprises. Ainsi, l’Erika avait été affrété par une société bahaméenne appartenant à un trust géré par un cabinet juridique panaméen. Afin que les entreprises ne se dédouanent pas de leurs responsabilités sociales et environnementales, il nous semble donc essentiel que soit institué un registre public. »

Un registre accessible sur requêtes, loin des principes de l'Open Data

Bien que prévu par la loi, l’instauration de cette sorte d’annuaire attendait encore un décret d’application avant de pouvoir prendre son envol. Celui-ci a été publié au Journal officiel du mercredi 11 mai (voir ici). « Ce registre est destiné à contenir l’information sur l’ensemble des trusts générant des conséquences fiscales sur le territoire français » résume-t-on à Bercy, où l’on promet sa mise en ligne pour le 30 juin. « Actuellement, 16 000 entités sont identifiées comme des trusts et connues de notre administration fiscale. Le public aura désormais accès à ces informations. » Mais dans quelles conditions ?

Le décret, appelé justement à préciser les « modalités de consultation du registre », indique que l’internaute devra passer par « une procédure sécurisée d'authentification fixée par arrêté du ministre chargé du budget [non publié à ce jour, ndlr] » – ce qui laisse à penser qu’une création de compte sera nécessaire. À partir d’un site de la Direction générale des finances publiques, il faudra ensuite effectuer une recherche simple ou avancée (dénomination du trust, nom de l’administrateur, etc.).

Fait notable : les interrogations du registre feront l'objet d'un enregistrement journalier, qui se traduira par la conservation, pour chaque connexion et pour une durée d’un an, de l’ « identifiant » de l’usager, de son adresse IP, ainsi que de la date et l’heure de sa recherche.

Les promoteurs de l’Open Data regretteront probablement que l’État ne publie pas un fichier au format libre et ouvert qui aurait permis une réexploitation bien plus aisée de ces informations...

Écrit par Xavier Berne

Tiens, en parlant de ça :

Sommaire de l'article

Introduction

Un registre accessible sur requêtes, loin des principes de l'Open Data

Commentaires (16)


C’est une bonne idée à la base, et comme d’hab la mise en branle (je pèse mes mots) est fastidieuse et volontairement (?) compliquée. 



Reste que les partisans de l’open data dont je suis, devront se fader à la main les 16000 enregistrements pour les mettre sous format open.



Un peu comme lors de la mise en transparence du patrimoine des députés. On avait tout relu et resaisi via un formulaire en ligne. Ils (les députés) n’avaient pas réussi à contourner le truc en faisant les délarations à la main.



M’enfin ça reste chiant.


ça ne pose pas un souci vis à vis des conditions de consultation ? (traçabilité, compte, IP, tout ça). Il y a un droit explicite à la reproduction/diffusion ? (si oui, pourquoi avoir mis les conditions sus-citées ?)








WereWindle a écrit :



ça ne pose pas un souci vis à vis des conditions de consultation ? (traçabilité, compte, IP, tout ça). Il y a un droit explicite à la reproduction/diffusion ? (si oui, pourquoi avoir mis les conditions sus-citées ?)





Aucun problème, il y’aura 1000 bénévoles (par exemple) pour chopper les 16000 entrées, donc 1000 ip, 1000 inscrit c’est pas un prob.



Les données étant issues de l’état elles doivent être librement exploitables. C’est pour cela qu’on peut se demander parfois s’ils ne le font pas exprès de rentre l’accès difficile.



Un peu comme Richard Stalman qui râle à juste titre quand un logiciel libre à un code source incompréhensible pour un humain, ou obfusqué, il est bien libre juridiquement, mais inexploitable concrètement. Sauf à se faire suer à le rendre exploitable. Ce qui complique la tâche.



Ne pas oublier le sort des données des cadeaux de laboratoires aux médecins : on peut chercher un médecin en particulier, consulter les informations, mais le “scraping” du site et la publication des données est interdite tant que le nom des médecins figure. Motif ? Protection de la vie privée des médecins….



Il n’est donc pas exclu qu’il y ait ce genre de limitation à la publication intégrale de ce registre, par exemple au titre du secret des affaires.



Mais clairement, il faudra tester.








ColinMaudry a écrit :



Ne pas oublier le sort des données des cadeaux de laboratoires aux médecins : on peut chercher un médecin en particulier, consulter les informations, mais le “scraping” du site et la publication des données est interdite tant que le nom des médecins figure. Motif ? Protection de la vie privée des médecins….



Il n’est donc pas exclu qu’il y ait ce genre de limitation à la publication intégrale de ce registre, par exemple au titre du secret des affaires.



Mais clairement, il faudra tester.





c’est un peu à cela que je pensais, oui



Ça et potentiellement, ça a peut-être été un point concédé pour faire passer l’amendement.

 

Ça, ou en 2013 l’open data n’était pas aussi mis en avant qu’aujourd’hui (je dis pas que ça l’ai beaucoup hein attention) et ils n’y ont pas pensé alors.


Je réfléchis, et je repense à “Radio Londres, le fait qu’à l’étranger ils ne se gênent pas pour publier les résultats provisoires et les sondages le jour des élections, étant hors juridiction française.



Si les données des labos et des trusts étaient publiées en clair sur un serveur russe ou équatorien, je vois pas bien ce que les autorités françaises pourraient faire, à part faire du blocage DNS.








ColinMaudry a écrit :



Ne pas oublier le sort des données des cadeaux de laboratoires aux médecins : on peut chercher un médecin en particulier, consulter les informations, mais le “scraping” du site et la publication des données est interdite tant que le nom des médecins figure. Motif ? Protection de la vie privée des médecins….



Il n’est donc pas exclu qu’il y ait ce genre de limitation à la publication intégrale de ce registre, par exemple au titre du secret des affaires.



Mais clairement, il faudra tester.





Il y’aura peut être, même sans doute des limitations, on vera comment ça se goupille ;)





nekogami a écrit :



Ça et potentiellement, ça a peut-être été un point concédé pour faire passer l’amendement.

 

Ça, ou en 2013 l’open data n’était pas aussi mis en avant qu’aujourd’hui (je dis pas que ça l’ai beaucoup hein attention) et ils n’y ont pas pensé alors.





possible aussi. Raison de plus d’enfoncer le clou encore&nbsp;<img data-src=" />



c’est marrant on interdit des sites manifestement encourageant ou facilitant la mise à disposition d’oeuvre sous droits par contre des trusts dont on se demande bien qu’elle est la raison d’être à part au mieux brouiller les pistes et plus certainement faire de l’évasion/blanchiment, là pas de souci, tu peux y aller. Bon on fait une mesure à la mort le noeud du genre, on va le rendre public ça va vous empêcher de le faire…. si la moralité empêchait quoi que ce soit, y aurait pas eu de crise des subprimes, l’esclavage, etc… etc…. etc…

Donc pour moi si les trusts sont des outils reconnus de blanchiment et évasion fiscale, ben tu les interdis et basta au lieu de faire ça : en gros c’est on fait semblant de s’attaquer au pb, vous pouvez continuer tranquile.


On dit que 80% de l’évasion fiscale passe par des Trust pas que 80% des trusts servent à l’évasion fiscale.

De la même manière que 95% des morts sur les routes sont dû aux voitures c’est pas une bonne raisons pour interdir les voitures.








nekogami a écrit :



De la même manière que 95% des morts sur les routes sont dû aux voitures c’est pas une bonne raisons pour interdir les voitures.





Vivre tue ? Il faut interdire de vivre ! <img data-src=" />







boogieplayer a écrit :



Un peu comme lors de la mise en transparence du patrimoine des députés. On avait tout relu et resaisi via un formulaire en ligne. Ils (les députés) n’avaient pas réussi à contourner le truc en faisant les délarations à la main.



M’enfin ça reste chiant.





N’empêche, on s’étais bien marré ce jours là… mais j’admet que je ne suis pas sur de vouloir recommencer une nouvelle fois. Mais il fallait ouvrir les premières portes… et il en reste encore. Restons vigilant et soutenons les initiatives mêmes imparfaites.



<img data-src=" />


Comme disait un copain banquier, lorsqu’un système anti-fraude est finalement mis en place c’est le signe que tous les V.I.P sont déjà passés sur un nouveau système de fraude.



Et faut bien avouer que lorsque tu regardes les derniers scandales de fraude fiscale, on voit bien qu’il y a des opérations de “nettoyage” juste avant que des règles/lois soient appliquées.


+1 loopback



Si une nouvelle loi posait vraiment des problèmes à la minorité puissante qui cache, on se doute qu’un intense travail de lobbying serait mis en place. De beaux arguments sur la croissance, la compétitivité et autre seraient lâché en assemblée, et ce serait passé à la trappe, ou alors un amendement changerait un mot ou une virgule pour rendre le tout inapplicable.





ah et j’ai oublié l’argument “regardez ce qu’on a déjà fait, les paradis fiscaux c’est fini”.


tu remarqueras bien mon “si” , n’étant pas expert de la question, j’ai bien pris la précaution de dire “si”.



Enfin, il me parait assez clair que la volonté politique n’est pas de lutter efficacement contre ces pratiques d’évasion ou de circuits ténébreux : on l’a bien vu avec la “lutte” contre les paradis fiscaux : lutte un peu molle pour le mieux. Ca bouge petit à petit sous la pression populaire mais on est loin des grands discours de naboléon ou flamby et internationalement, idem, on ne voit pas un engouement démesuré sur la question.


J’avais bien vu le si mais pas prit de la même manière.



Ensuite, oui la lutte contre les paradis fiscaux est lente, mais ne pas oublié que c’est une lutte qui, si elle veut faire un minimum doit être international.



Typiquement, au panama ils s’en fichent bien que le peuple français veuille qu’ils arrêtent.

&nbsp;