Google travaille actuellement à renforcer la manière dont son application de recherche comprend et répond à ce qui lui est demandé. Pour accélérer le processus, la société recourt à une méthode assez inhabituelle : elle nourrit son moteur de romans d’amour.
La clé du langage naturel, celui utilisé dans la vie de tous les jours, semble à portée de main mais la route est encore longue. C’est toute la différence entre les opérations cognitives, effectuées si rapidement que l’on ne se rend même pas compte, et une intelligence artificielle qui doit décomposer les signaux en de multiples éléments reconnaissables. Une chercheuse de Microsoft indiquait d’ailleurs en mars qu’un nourrisson pouvait effectuer plus rapidement certaines « opérations » que le plus puissant des ordinateurs.
Cette quête est pourtant obsédante pour certaines entreprises. Pouvoir s’adresser à son ordinateur ou son smartphone de manière naturelle permettrait notamment de rendre plus fluide son utilisation. Google – puisque c’est de ce moteur dont il s’agit – travaille en ce sens mais raisonne avant tout par mots-clés.
Cinquante nuances de craie
Comment donc faire pour reconnaître le langage naturel et la multiplicité des facteurs que nous prenons en compte de manière automatique ? Andrew Dai, ingénieur en charge de ces recherches, a indiqué récemment à BuzzFeed que les réponses de l’application Google étaient actuellement « très factuelles ». Mais la situation pourrait évoluer à l'avenir, avec l'espoir de réponses « plus familières, ou avec un ton, un style ou un registre différent » qu'aujourd'hui.
The Verge, qui s’est penché aussi sur le sujet, a pu obtenir des exemples de Jason Freidenfelds, autre responsable de Google. Si l’on pose ainsi la question « Quand a été construite la tour Eiffel ? », Google donne la date (1889). En enchainant avec une deuxième question, « Qui l’a construite ? », Google devine que le sujet est toujours le même et s’adapte.
Mais la firme de Mountain View voudrait aller beaucoup plus loin. « Nous devenons bons pour comprendre les sentiments et la manière dont une personne aime quelque-chose par la façon dont elle le décrit » assure Freidenfelds. Mais dès que l’on introduit certains mécanismes, comme le sarcasme, ou même l’ironie simple, les bots de reconnaissance perdent pieds : ils ne sont plus capables de comprendre l’idée qui a été réellement exprimée.
2 865 romans d'amour
Pour corriger le tir, Google a une approche assez originale : faire ingérer à ses robots des romans d’amour. Ces fameux « bouquins à l’eau de rose » ne traitent justement que des rapports humains et des sentiments. En quelques mois, Google a fait ainsi lire à son moteur principal de reconnaissance de langage 2 865 ouvrages pour l’habituer à détecter de précieuses nuances.
Ce que Google n’explique pas en revanche, c’est la façon dont les ingénieurs s’y sont pris. Le moteur de reconnaissance est un réseau de neurones artificiels qui doit être doté d’un certain nombre de mécanismes décrivant la manière dont les informations vont être extraites, analysées et comprises. Sans ces mécanismes, cela revient à donner ces romans à une bûche.
Se rapprocher autant que possible du style de la question
Par contre, Google est plus bavard sur le résultat espéré. Les bots devront globalement reconnaître le style et l’intonation de la question. La réponse sera formulée et comparée à ce qui a été demandé pour se rapprocher au maximum du ton perçus. De quoi rendre l’utilisation probablement plus sympathique, avec une expérience plus personnelle et familière. La firme a également indiqué à The Verge que ce travail pourrait être répercuté plus tard sur d’autres services, comme Smart Reply dans Gmail.
On est encore loin évidemment d’une « intelligence » autonome qui déciderait d’elle-même de changer de ton en fonction d’une multitude d’autres facteurs. On pense notamment au film Her, où ce qui n’est initialement qu’une fonctionnalité d’aide finit, à force d’apprendre, par devenir une personnalité propre et consciente.