L'Assemblée nationale a rejeté dans la nuit de jeudi à vendredi la proposition de loi visant à assurer l'aménagement numérique du territoire. Lors des discussions relatives à ce texte (déjà approuvé par le Sénat au début de l'année), la ministre déléguée à l’Économie numérique, Fleur Pellerin, a vivement critiqué ce projet devenu selon elle « totalement obsolète », offrant en outre « une réponse idéologique et court-termiste ». La locataire de Bercy a en revanche vanté les projets de l'actuel gouvernement, qui devraient conduire à terme au déploiement de la fibre optique sur tout le territoire d'ici dix ans.
Le 6 juillet 2011, le sénateur Hervé Maurey (UDI-UC) remettait un rapport d’information intitulé « Aménagement numérique des territoires : passer des paroles aux actes ». L’élu formulait ainsi plusieurs propositions pour accompagner et intensifier la couverture numérique du territoire national, donnant au passage un rôle central à l’État. Quelques mois plus tard, en novembre 2011, le parlementaire reprenait l’essentiel de ses conclusions en déposant - aux côtés du sénateur UMP Philippe Leroy - une proposition de loi visant à assurer l'aménagement numérique de la France.
Comme nous l’expliquions en février dernier, ce texte avait notamment pour objectif de contractualiser les engagements des opérateurs, mettant par exemple en place un droit à une connexion haut débit. Il dotait également les collectivités territoriales d’instruments supplémentaires afin d’assurer le déploiement du très haut débit dans les zones où les opérateurs privés n’ont pas pris d’engagement. Sur la partie mobile, la proposition de loi redéfinissait la manière d’appréhender la couverture en matière de téléphonie mobile, afin de rendre compte de la couverture ressentie par les populations à l'échelle locale. Elle incitait également au partage des installations de réseau 4G (mutualisation) à l’instar de la 3G.
Rejet par l’Assemblée nationale
Après son adoption par le Sénat le 14 février 2012, le texte a été transmis à l’Assemblée nationale. La fin de la précédente législature et l’arrivée d’une nouvelle majorité ont quelque peu retardé l’examen du texte par les députés, qui se sont finalement prononcés dans la nuit de jeudi à vendredi sur le texte. Résultat : les élus ont décidé de rejeter la proposition de loi, comme l’indique l’AFP.
Les discussions autour de la proposition de loi ont donné lieu à des explications de la part de la ministre déléguée à l’Économie numérique. Fleur Pellerin a ainsi expliqué dans l’hémicycle que le contexte avait « radicalement changé » depuis l’adoption du texte par le Sénat, et qu’une « ambition nouvelle » existait désormais sur le sujet. La locataire de Bercy a en effet précisé que la couverture de l’ensemble du territoire en très haut débit d’ici 2022 faisait partie des engagements de François Hollande : « le Gouvernement est mobilisé et le cap est fixé » a-t-elle assuré. Il s’avère d’ailleurs que la mission sur le très haut débit, dirigée par Antoine Darodes, a été officiellement lancée par le gouvernement il y a une dizaine de jours.
Les plans du gouvernement dévoilés en février 2013
Sur le fond, Fleur Pellerin a surtout critiqué ce texte en ce que celui-ci « ne répond pas aux défis » posés par le chantier du très haut débit. Pire : il offre « une réponse idéologique et court-termiste, là où nous préparons des réponses concrètes et pérennes », a fait valoir la locataire de Bercy. La ministre a d’autre part indiqué avoir décelé de « nombreuses fragilités juridiques » à la proposition de loi soumise hier au vote des députés. « Les mesures qu’elle contient sont soit inutiles, soit inefficaces, soit même parfois sujettes à discussion quant à leur constitutionnalité. Ces fragilités juridiques ne seraient pas si graves, si elles ne faisaient courir un risque tout aussi grave à tous les acteurs engagés sur ce chantier structurant ».
D’après la ministre, cette proposition de loi « devenue totalement obsolète » se trouve aujourd'hui remplacée par les projets de l’actuel gouvernement, dont le calendrier gouvernemental est « à présent très clair ». « La structure de pilotage est désormais une réalité, a assuré Fleur Pellerin, sa constitution est en cours et pourra s’appuyer sur des compétences issues des administrations d’état-major, des collectivités locales et des services déconcentrés de l’État ». Après une « large concertation » impliquant l’État et l’ensemble des parties prenantes (opérateurs et collectivités), une feuille de route sera définie dans les mois à venir, avant d'être dévoilée d’ici février 2013 à l’occasion du séminaire gouvernemental dédié au numérique.