Les sénateurs rejettent la définition positive du domaine public

#Anéfé 2016
Droit 3 min
Les sénateurs rejettent la définition positive du domaine public
Crédits : Sénat (CC BY-NC-ND 2.0)

Comme les députés, les sénateurs ont rejeté l'amendement cette fois porté par des élus GCRC et visant à introduire une définition positive du domaine public dans notre droit. 

Dans le cadre du projet de loi sur le numérique, ces parlementaires voulaient eux aussi inscrire cet article dans le Code de la propriété intellectuelle :

 « Art. L. … – Le domaine public regroupe l’ensemble des œuvres et des idées qui n’appartiennent à personne et dont l’usage et la jouissance sont communs à tous. Les œuvres non assujetties au droit d’auteur, au droit de propriété intellectuelle ou aux droits voisins et celles dont les créateurs souhaitent leur inscription dans le domaine public entrent de plein droit dans ledit domaine. »

Aujourd’hui, « seules la doctrine et une définition négative permettent de désigner ce qui relève du domaine public » regrettaient-ils. Or, cette lacune ne permet pas de sanctionner les pratiques de copyfraud, soit la revendication abusive de droits, sur des éléments tombés dans cette belle escarcelle.

Seulement, leur amendement 463 a été rejeté en quelques secondes. Selon la Commission des lois, « cette définition est fort délicate à établir compte tenu des antagonismes en présence et des différences d’interprétation juridique entre experts. (…) La réflexion doit donc encore se poursuivre plus sereinement pour aboutir à une solution satisfaisante et acceptée par les parties en présence ». Un avis négatif partagé par Axelle Lemaire, au nom du gouvernement, « pour les mêmes raisons ».

Fait notable, en septembre 2015 à l’Assemblée nationale, la députée Isabelle Attard avait également proposé un texte similaire à l'occasion des débats sur le projet de loi Création. Cependant, « Mme la ministre [de la Culture] m’a renvoyée au projet de loi pour une République numérique que prépare Axelle Lemaire » raconte l’élue sur son blog. On connait la suite : les députés, puis aujourd'hui les sénateurs ont refusé ce mouvement.

Une partie de ping-pong

Dans cette partie de ping-pong, la balle s’est ainsi volatilisée comme par magie entre les deux projets de loi, soufflée par ce vent de contradictions entre « experts ».

L’actuelle secrétaire d’État au numérique avait marqué tout son intérêt à cette définition, a ainsi dû ravaler ses convictions sur l’autel des intérêts supérieurs. Au ministère de la Culture, justement, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique avait conclu lui aussi au rejet de cette introduction législative. Manque de chance, un rapport commandé par ses soins avait certes dénombré de possibles contradictions avec d’autres lois en vigueur, mais son auteur, l’avocat Jean Martin, avait conclu que la définition positive du domaine public préservait bien « les principaux fondamentaux du droit d’auteur ».

Une situation cocasse, épinglée alors par la secrétaire d’État elle-même : 

Les peu scrupuleux

Sans surprise, dans un billet publié toujours en septembre 2015, Pascal Rogard plaidait lui-aussi pour l’éradication de cette définition positive, relevant au passage que « les nouvelles technologies sont aussi pour certains acteurs peu scrupuleux l'occasion de privatiser le domaine public pour se l'approprier et en tirer des bénéfices ». 

On ne sait à qui fait référence le directeur général de la SACD, mais en 2012, un certain Rogard Pascal avait proposé devant la mission Lescure, l’instauration d’« une redevance sur le domaine public audiovisuel pour financer la conservation, la numérisation et la mise à disposition des œuvres ». Par réflexe naturel, il avait néanmoins ajouté que « ce n’est pas une redevance qui va aux ayants droit. Les ayants droit c’est terminé, c’est la fin de la propriété intellectuelle ».

Contacté, il nous précisait sa pensée : «  Une œuvre audiovisuelle dans le domaine public n’est pas comme un livre ou une pièce de théâtre. Si on veut la conserver pour les générations futures quelqu’un doit intervenir pour conserver, protéger et même restaurer. Et quand un éditeur veut diffuser ces œuvres, il devrait payer une redevance pour financer tous ces travaux. »

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