Après des mois d’attente, le gouvernement a publié au Journal officiel du vendredi 22 avril l’arrêté portant approbation de la nouvelle version du « Référentiel général d’interopérabilité » applicable aux administrations (voir ici). Les dispositions relatives aux formats liés à l’édition de documents – ODF vs OOXML – n’ont pas changé (lire ci-dessous).
La publication du nouveau « référentiel général d’interopérabilité » applicable aux administrations françaises semble plus que jamais imminente. La France vient en effet de notifier son texte à Bruxelles (PDF), dévoilant pour l’occasion les pistes retenues par l’exécutif.
Inchangée depuis 2009, l’actuelle version du référentiel général d’interopérabilité (RGI) s’apprête à être dépoussiérée. Cette sorte de guide pratique doit pour mémoire être respecté par toutes les « autorités administratives » du pays, qu’il s’agisse de ministères, de collectivités territoriales, d’établissements publics, etc. L’objectif ? Que les échanges par voie électronique de l’administration (avec d’autres administrations, des particuliers, des entreprises...) soient le plus simples possible – histoire de gagner du temps et de l’argent. En clair, il s’agit d’éviter qu’un document émis par un service ne puisse être lu sur l’ordinateur de son destinataire.
Si ce texte vise de très nombreux standards (compression, codecs audio et vidéo...), c’est celui relatif aux traditionnels documents de type traitement de texte ou tableur qui attire depuis plusieurs mois le regard de nombreux acteurs. Et pour cause, la V1 du RGI place aujourd’hui sur un même pied d’égalité le format ouvert Open Document Format et Office Open XML, ce format lié à Microsoft qui avait jadis suscité le courroux de l’Association de promotion du logiciel libre (April).
Les formats ouverts ODF à privilégier par rapport aux « .docx » ou « .pptx »
Comme le laissaient présager les travaux préparatifs de la Direction interministérielle des systèmes d’information de l’État (DISIC), les autorités ont manifestement décidé de privilégier le format ODF – qui se décline en « .odt », « .ods », « .odb »... La V2 du RGI notifiée hier à la Commission européenne place en effet ce format en « recommandé », tandis que l’OOXML de Microsoft (« .docx », « .xlsx »...) reste « en observation », notamment du fait de « sa complexité », et de « son manque d’ouverture ».
Les pouvoirs publics ne sont toutefois pas allés jusqu’à classer OOXML en « retiré », auquel cas le standard aurait du être systématiquement évité ou abandonné par les administrations. Autrement dit, l’édition de documents « .docx » risque d'être tolérée dans de nombreux cas...
L’hypothèse d’une telle différentiation avait néanmoins satisfait l’April cet été, l’association estimant que cela permettait de « mieux discréditer » le format OOXML. « Les termes employés dans le RGI sont posés mais la critique contre OOXML est sans appel. La DISIC a démontré qu'elle agit dans l'intérêt à long terme de l'ensemble des citoyens français et de leurs administrations » affirmait alors Frédéric Couchet, le délégué général de l’organisation – qui diffusait pour l’occasion une version de travail du nouveau référentiel.
L’Association francophone des utilisateurs de logiciels libres (AFUL) y voit également un signal positif. « Ne pas indiquer OOXML dans ce RGI v2 pourrait laisser penser que c'est un oubli, ou que l'on se retrouve en zone grise. En effet, ce format de Microsoft n'est-il pas présenté comme le « standard du marché » ? Mais au contraire, le mettre explicitement « en observation », et surtout avec un tel commentaire explicatif, est une véritable pierre dans le jardin de Microsoft » réagit Laurent Séguin, président de l’organisation, contacté par nos soins. Avant d’ajouter : « Il ne faut pas non plus se tromper de combat. L'objectif du RGI sur les formats de bureautique n'est pas de trancher sur une lutte de Libre Office contre Microsoft Office, mais bien de régler la question de la pérennité des documents produits et de leur totale indépendance vis-à-vis d'un logiciel précis. L'usage strict des standards ouverts devient par exemple encore plus critique dans un contexte de préservation du patrimoine informationnel électronique (l'archivage électronique à valeur probatoire). »
Du côté des autres standards, on remarque que le ZIP est recommandé pour l'archivage, le PDF pour la lecture de documents, les MPEG-TS, MP4 et MKV pour les vidéos, le MP3 ou le FLAC pour l’audio, les TIFF, PNG et JPEG pour les images (le GIF est quant à lui placé en « fin de vie »), etc.
Période de statu quo jusqu'à mars 2016
Restera maintenant à voir si le texte notifié à la Commission européenne évolue d’ici à sa publication au Journal officiel. Ce qui n’arrivera pas avant l’année prochaine, Bruxelles ayant jusqu’au 3 mars 2016 pour se prononcer sur cette V2. D’autre part, le Conseil national d’évaluation des normes doit lui aussi donner son avis sur ce texte sensible politiquement, les enjeux étant particulièrement importants du côté de Microsoft (voir notre article).
Ironie de l’histoire : le texte notifié par la France est diffusé par la Commission européenne au format... « .doc » !