Deux sénateurs Les Républicains viennent de déposer une proposition de loi visant à encadrer plus strictement l’usage des drones de loisir en France. Immatriculation, balises et formation des pilotes deviendraient obligatoire au-delà d'un certain seuil de poids (qui serait fixé ultérieurement par décret ministériel).
« Pour répondre à des risques croissants », affirment les auteurs du texte, il s’avère aujourd’hui « nécessaire » de modifier substantiellement la réglementation en vigueur. La « quasi-collision » entre un drone et un avion de ligne, le 19 février dernier aux abords de Roissy, a visiblement marqué les esprits des parlementaires – de même que les incidents autour de plusieurs centrales nucléaires.
Un texte largement inspiré des travaux du SGDSN
Avec cette proposition de loi, Xavier Pintat et Jacques Gautier veulent à la fois « améliorer l'information et la formation des télépilotes », « faciliter la détection, voire la neutralisation de drones potentiellement dangereux », tout en permettant à la filière de poursuivre son développement économique... Pour cela, les deux élus se sont très largement inspirés du rapport présenté en octobre 2015 au Parlement par le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (voir notre article).
Ses principales pistes y sont en effet reprises. Avec toutefois une nuance : les parlementaires n’ont pas voulu préciser à quels drones ces nouvelles obligations s’appliqueront. « La réglementation doit pouvoir, comme la technologie, évoluer rapidement, en concertation avec les professionnels. C'est pourquoi la présente proposition de loi renvoie à des décrets pour la fixation des seuils qu'elle institue, qui ne seront pas nécessairement identiques et pourront évoluer année après année » expliquent à cet égard Xavier Pintat et Jacques Gautier.
Voici les mesures que souhaitent introduire les parlementaires :
- Immatriculation. Une liste des appareils soumis à un enregistrement obligatoire (à l’instar de ce qui prévaut depuis quelques mois aux États-Unis) sera fixée par décret en Conseil d’État. Le SGDSN préconisait quant à lui une immatriculation assez simple pour les appareils au poids compris entre 1 et 25 kg, et plus drastique au-delà.
- Balises et LED à partir de 2018. Afin d'identifier rapidement les drones « coopératifs », les aéronefs dépassant un certain poids devront « emporter des dispositifs de signalement électronique et lumineux », indique la proposition de loi. Le SGDSN proposait l’année dernière que les drones de plus de 1 kg soient équipés « d’un radar/balise permettant de transmettre par ondes de type GSM (Global system for mobile communication) ou RFID (Radio frequency identification) certains renseignements (identité du propriétaire, numéro de téléphone, numéro d’enregistrement du drone, coordonnées géographiques en trois dimensions de la position de l’appareil) ». Le signalement lumineux devrait quant à lui aider les autorités à repérer des appareils qui voleraient de nuit. Pour laisser le temps aux professionnels de s’adapter, cette nouvelle obligation n’entrerait en vigueur qu’au 1er janvier 2018, ont tenu à préciser Xavier Pintat et Jacques Gautier.
- Formation pour les télépilotes. Les utilisateurs de drones de loisirs, à l’exception de ceux qui seraient affiliés à une fédération sportive d’aéromodélisme, devront « être formés aux règles élémentaires de la circulation aérienne ainsi qu'aux caractéristiques spécifiques et aux règles d'emploi de ces aéromodèles ». Un décret fixera le contenu de cette formation, ses modalités de contrôle, ainsi que les sanctions applicables en cas de manquement. Les deux sénateurs expliquent dans leur exposé des motifs qu’il pourrait s’agir d’un « tutoriel sur Internet, en lien avec la procédure d'enregistrement » – exactement comme le proposait le SGDSN.
- Notices intégrées. Afin d’étendre la diffusion des « règles-clés » à respecter par les télépilotes, les fabricants et importateurs de drones seront tenus d'inclure « dans les emballages de leurs produits, ainsi que dans ceux de leurs pièces détachées, une notice d'information relative à l'usage de loisir de ces aéromodèles ». Ce document rappellera, comme le fait aujourd’hui la notice de la DGAC, « les principes et les règles à respecter pour utiliser ces appareils en conformité avec la législation et la réglementation applicables ».
Xavier Pintat et Jacques Gautier veulent enfin que le législateur impose « des sanctions suffisantes pour dissuader les usagers non réellement malveillants de réaliser des survols illicites, et, ainsi, faciliter l'identification des événements susceptibles de constituer une menace réelle ». Leur proposition de loi permet en ce sens aux autorités de confisquer le drone d’une personne qui aurait survolé « par maladresse ou négligence » une zone interdite (aéroport, base militaire...), en plus des sanctions pénales d’ores et déjà applicables.
Des seuils qui seront arbitrés par le gouvernement
Restera maintenant à voir si cette proposition de loi arrive à être examinée par le Parlement, ce qui est assez rarement le cas pour les textes d’origine parlementaire (qui sont bien plus nombreux que les créneaux disponibles pour les étudier...). La fixation des seuils sera ensuite – en cas d’adoption – une étape clé pour la mise en œuvre du nouveau dispositif. Les deux sénateurs ont d’ailleurs déjà leur petite idée sur la question, même si cette décision reviendra in fine au gouvernement : « un premier seuil déclenchera l'obligation d'enregistrement de l'aéronef et de formation de l'utilisateur, ces deux formalités pouvant être couplées ; un second seuil, probablement plus élevé, déclenchera l'obligation d'adjoindre au drone un dispositif de signalement électronique et lumineux, de nature à permettre son identification ».
