Après les plaintes de BlackBerry sur les retraits de WhatsApp et de Facebook sur sa plateforme, voilà que le constructeur annonce que le réseau social fait demi-tour. Dans la pratique, cela ressemble pourtant à une façon de ne pas trop perdre la face.
BlackBerry 10 est une plateforme condamnée. L’abandon ne se fera pas du jour au lendemain, et le constructeur devrait probablement sortir encore plusieurs nouveaux modèles utilisant le système. Cependant, l’avenir de l’entreprise se situe du côté d’Android, comme l’ont prouvé les investissements sur la sécurité du Priv, et la confirmation plus récente que la plateforme de Google serait beaucoup plus utilisée à l’avenir.
Le signal du désintérêt
En attendant que BlackBerry puisse commercialiser de nouveaux modèles Android – en particulier dans le milieu de gamme – la société canadienne est coincée avec une plateforme qui, même si elle présente des qualités, n’est guère suivie par les éditeurs tiers. Un virage particulier à négocier, dont on a eu un premier aperçu quand WhatsApp a annoncé la fin du support de BlackBerry 10 d’ici quelques mois.
Cette décision a été suivie de la même par Facebook, à qui appartient d’ailleurs WhatsApp. Sans que la précision ait été donnée, on pouvait se douter que le choix impacterait aussi bien l’application principale que Messenger. Or, qu’on le veuille ou non, WhatsApp, Facebook et Messenger sont un trio d’applications très utilisées, la première ayant dépassé le milliard d’utilisateurs actifs en début d’année.
Très mauvais signal envoyé par les éditeurs : le désintérêt de la plateforme est si visible que BlackBerry indiquait dans un billet de blog récent qu’en dépit de pourparlers sur ce sujet, ni Facebook ni WhatsApp n’avaient souhaité revoir leur position. Et voilà que BlackBerry revient sur le sujet avec un nouveau billet, cette fois pour annoncer que la situation a évolué et que Facebook a bien voulu lâcher du lest. Pour autant, il n’y a pas de quoi crier victoire.
Un site web encapsulé
La société de Mark Zuckerberg veut effectivement bien faire un effort, mais il sera très léger : une application basée sur la version web mobile sera prochainement proposée. BlackBerry peut présenter cette décision comme une victoire (le constructeur remercie ses utilisateurs d’avoir mené campagne sur Twitter avec les hasgtags #WeAreBlackBerry et #ILoveBB10Apps), mais il n’y a clairement pas de quoi parader.
La version web mobile permet certes de faire tout ce que fait une application mobile ou presque, elle n’en reste pas moins déjà disponible dans n’importe quel navigateur. Proposer une application qui n’est finalement qu’un simple conteneur d’un client web n’est en rien comparable à ce qui existait auparavant du côté de l’ergonomie. Par contre, l’application native accusait son âge et ne permettait pas d’exploiter toutes les fonctionnalités de Facebook. Par exemple, les réponses aux commentaires n’étaient pas gérées. Par ailleurs, les utilisateurs peuvent au moins être certains de recevoir immédiatement tout nouvel ajout qui sera réalisé par Facebook à son site principal.
L'ancien Facebook arrêtera de fonctionner dès demain
Et l’annonce tombe au bon moment : l’application originelle sera supprimée dès demain de la boutique BlackBerry (World) et elle ne fonctionnera plus sur les smartphones existants. Quand le problème surviendra, il faudra que les utilisateurs appliquent une mise à jour, soit pour BlackBerry OS (la version classique, également concernée), soit pour BlackBerry 10. L’ancienne application sera alors migrée vers la nouvelle.
Quel que soit l’angle de vue, on ne peut considérer ce « retournement » comme une victoire pour BlackBerry. Le constructeur le sait, tout ce qu’il lui reste à faire est de limiter les dégâts jusqu’à ce que les modèles Android arrivent, avec eux la possibilité d’aller puiser directement dans le Play Store, à l’instar de ce que fait déjà le Priv. On remarquera également que même si cette « nouvelle » application contient toutes les fonctionnalités, WhatsApp n’a fait aucun virage de son côté, laissant donc le problème entier face à la solution de messagerie la plus utilisée au monde.
L'application Android est parfaitement utilisable
On rappellera par ailleurs que les possesseurs de BlackBerry 10, s’ils appliquent toutes les mises à jour, ont un sous-système Android relativement efficace à disposition. De nombreuses applications y fonctionnent, pour peu qu’ils récupèrent les fichiers APK pour les installer. De fait, beaucoup préfèreront se servir de la version Android, d’autant qu’elle reçoit très régulièrement des nouveautés. D’autres encore préfèreront ouvrir finalement la version web classique, s’ils estiment par exemple que les notifications sont sans intérêt.
Dans tous les cas, la période qui vient s’annonce complexe pour le Canadien. Il lui faut absolument proposer des modèles Android sur l’entrée et le milieu de gamme, car il ne peut compter que sur le Priv pour redresser la tête. Ce smartphone s’affiche à un tarif moyen de 750 euros, et son axe très clair sur la sécurité n’en fait pas le modèle de monsieur Tout le monde.