Le combat entre Google et Oracle autour de l'usage de 37 API Java dans Android reprend de plus belle. Alors qu'un nouveau procès doit débuter en mai, Oracle compte réclamer jusqu'à 9,3 milliards de dollars à Google, dont près de 9 milliards au titre des bénéfices tirés du système mobile. Au coeur du combat, la propriété intellectuelle du code.
Oracle veut des gains substantiels dans le combat qui l'oppose à Google, selon des documents déposés devant la justice californienne, repris par PCWorld. Dans le cadre d'un nouveau procès qui débutera le 9 mai, après une audience préliminaire le 27 avril, le groupe réclame jusqu'à 9,3 milliards de dollars à Google pour l'usage de 37 API Java dans Android. Pour calculer ce montant, Oracle se fonde sur l'évaluation d'une banque d'affaires qu'il a mandatée.
Un calcul déjà contesté par Google
Selon cette banque, si Google n'avait pas conçu Android sur les bases de Java, Oracle aurait pu obtenir 475 millions de dollars de licence sur son langage. De l'autre côté, Google aurait gagné 8,829 milliards de dollars grâce à Android, publicité et ventes d'applications comprises... Des gains indus selon les experts engagés par Oracle, qui demande leur rétribution.
La somme représente environ 10 fois ce que le groupe avait réclamé lors d'un premier procès, en 2012. L'augmentation reflèterait la progression d'Android sur le marché mobile, en incluant les versions du système jusqu'à Lollipop. En clair, seul Marshmallow (Android 6.0) ne serait pas concerné, soit 2,3 % du parc en activité. Google vide d'ailleurs les prochaines versions de l'OS de toute trace de code pouvant s'approcher de celui d'Oracle, entre autres via le passage à OpenJDK.
Dans une réponse déposée la semaine dernière, Google conteste le calcul de ces experts. Pour le groupe de Mountain View, il ne tient pas pour plusieurs raisons, dont le fait que les API empruntées à Oracle ne sont qu'une fraction du code d'Android. Google placerait la barre au maximum à 100 millions de dollars, pour tout ou partie des dommages.
Une affaire vieille de six ans
Il y a six ans, Oracle attaquait donc Google. La raison de son ire : la copie « de la structure, de la séquence et de l'organisation » de 37 API Java lui appartenant. En première instance, Google avait obtenu gain de cause, la cour estimant que des API ne peuvent pas être protégées par le droit d'auteur.
Google et ses employés interrogés avaient bien admis la copie d'éléments protégés d'Oracle, entre autres pour des raisons de praticité, mais estimaient que leur usage était couvert par le « fair use ». Pour les géniteurs d'Android, le système mobile était une œuvre transformative, assez différente de ce que proposait Oracle lui-même. Le problème réside avant tout dans Dalvik, l'ancien moteur derrière les applications Android, totalement évincé du système depuis Lollipop, qui l'a remplacé par ART (Android Runtime). La question du « fair use » n'a jamais pu être tranchée par le jury.
En appel en 2014, le destin a basculé en faveur d'Oracle, qui réclamait un milliard de dollars en dommages et intérêts. La cour a bien estimé que certains codes informatiques peuvent être protégés par le copyright, et que Google avait bien contrefait des API d'Oracle. Google a soumis l'affaire devant la Cour suprême, qui a refusé de contredire le jugement en cour d'appel, notamment parce que le sujet du « fair use » reste encore en suspens.
Le dossier revient donc entre les mains du juge William Alsup, qui a tranché la première bataille entre les deux géants du logiciel en 2012, qui risquent de partir pour un nouveau procès-fleuve dans quelques semaines.