Les pistes du rapport parlementaire pour encadrer le sport électronique

Les pistes du rapport parlementaire pour encadrer le sport électronique

Feat. PEGI la caution

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Kevin Hottot

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Droit

25/03/2016 21 minutes
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Les pistes du rapport parlementaire pour encadrer le sport électronique

Jérôme Durain, sénateur PS de Saône et Loire et Rudy Salles, député UDI des Alpes-Maritimes ont remis cette semaine leur rapport préliminaire sur le sport électronique. Celui-ci émet 11 propositions destinées à encadrer la pratique professionnelle du sport électronique en France.

Le 26 septembre dernier, Axelle Lemaire, la secrétaire d'État au Numérique, donnait le coup d'envoi d'une consultation publique de trois semaines. Celle-ci devait permettre aux internautes de proposer des pistes pour le texte, de voter pour ou contre ces solutions et de publier des commentaires afin d'en débattre.  

La proposition ayant reçu le plus de votes favorables de la part des citoyens concerne un ajout proposé par le SELL, le Syndicat des Éditeurs de Logiciels de Loisirs. Celui-ci proposait de légiférer sur les compétitions de sport électronique afin de les exclure du champ des jeux de hasard. 

Le 18 janvier, Manuel Valls fera finalement parvenir une lettre de mission à Jérôme Durain, sénateur PS de Saône et Loire et à Rudy Salles, député UDI des Alpes-Maritimes. « La mission qui vous est confiée vise d'une part, à analyser les enjeux économiques et sociaux de ces compétitions de jeu vidéo et, d'autre part, à proposer un cadre législatif et réglementaire créant les conditions de leur développement en France », peut-on y lire.

Le cadre de la mission

Deux mois plus tard, un premier rapport intermédiaire est publié. Il regroupe 11 propositions destinées à poser un cadre légal permettant à la discipline d'exister et de prospérer en France, que l'on peut regrouper autour de six thèmes principaux. 

Le premier touche au statut des compétitions de jeu vidéo et de la nécessité de bien les distinguer des jeux d'argent et des loteries. L'objectif étant d'éviter de créer des brèches dans laquelle les opérateurs de jeux d'argent pourraient s'engouffrer. Autre question épineuse, celle du statut des joueurs professionnels et de leurs relations contractuelles avec les équipes qui les emploient, sans oublier le cas particulier des joueurs mineurs.

Bien évidemment, un long volet touche à la fiscalité du secteur, un point indispensable à sa légitimation auprès des autorités. Sont non seulement concernés les gains tirés des compétitions mais également les dons perçus par les streameurs sur Twitch. Ce dernier point est délicat, puisqu'il pourrait inscrire dans la loi la possibilité pour des particuliers d'effectuer des dons à une entreprise.

Il est également question de la création d'une mission dédiée au sport électronique au CNOSF (Comité National Olympique et Sportif Français). Les parlementaires se disent également favorables à la délivrance de « passeports-talents » pour faciliter le recrutement par les équipes françaises de joueurs étrangers réputés.

Dernier obstacle délicat à négocier : la diffusion des compétitions à la télévision. Si le CSA devrait plancher très prochainement sur la publicité (voir cette actualité), la classification PEGI des jeux va elle aussi donner du fil à retordre à l'autorité.

Loterie et e-sport, comment éviter l'amalgame ?

Aussi fort soit l’engouement pour le e-sport, l’activité se heurte en France à une difficulté lourde née du Code de la Sécurité Intérieure. L’article L322-1 interdit par défaut toutes les opérations de loterie, le L322-2 définissant comme telles toutes les opérations qui fait naitre l’espérance d’un gain dû, même pour très faible partie, au hasard. Il suffit alors d’un sacrifice financier exigé par l’organisateur de la part des participants pour tomber dans la prohibition.

Cette disposition est le fruit d’un amendement adopté en 2014 dans la loi sur la consommation (voir notre actualité). Porté par le député rapporteur Razzi Hammadi, il a revu et étendu le champ de cette interdiction. Dans la version antérieure, en effet, le critère du hasard prédominait sur l’habilité et les combinaisons de l’intelligence pour l’obtention d’un gain. Ainsi, depuis cette modification, les éditeurs de jeux d'adresse, et les professionnels de l'e-sport ne peuvent plus profiter du parapluie né du hasard significatif pour espérer échapper à l’interdiction.

Désormais, quatre critères cumulatifs sont résumés par le rapport :

  • Une offre publique
  • La naissance de l’espérance d’un gain chez le joueur
  • Le sacrifice financier du joueur
  • La présence, même infime du hasard

Le seuil d’interdiction est très rapidement franchi : « tous les jeux vidéo compétitifs comportent une part de hasard ou d’aléa, généralement infime » note le rapport. Du coup, tout s’enchaîne : « pour peu qu’elles présentent l’espérance d’un gain pour les participants victorieux, un droit d’entrée même minime, et qu’elles soient organisées au dehors du cercle strictement privé, les compétitions de jeux vidéo remplissent manifestement ces quatre conditions ». Même si les autorités font preuves d’une certaine souplesse, l’univers est donc un foyer à contentieux. Le rapport imagine le cas d’un joueur déçu ou un parent insatisfait qui viendrait porter plainte sur ces fondements.

Le projet de loi sur la République numérique

L’article 42 du projet de loi sur la République numérique a pour ambition de réguler ce secteur pour l’autoriser en France. En l’état du texte, désormais au Sénat, le ministère chargé de la Jeunesse délivrerait des agréments « aux organisateurs de compétitions de jeux vidéo, notamment à dominante sportive, requérant la présence physique des joueurs », agréments comportant des exigences en termes de transparence des compétitions, de protection des mineurs, de prévention des atteintes à la santé publique... Surtout, ce document administratif devrait dresser la liste des jeux faisant « prédominer, dans l’issue de la compétition, les combinaisons de l’intelligence et l’habilité des joueurs (...) et visant à la recherche de performances physiques virtuelles ou intellectuelles ».

Mais cette hypothèse d’une fixation par arrêté ministériel « se heurte à des obstacles pratiques » pour les auteurs du rapport, qui se demandent : « quels critères objectifs retenir ? Comment maintenir à jour une liste alors que de nouveaux jeux apparaissent continuellement ? Quelle administration charger de cette tâche ? » Pas simple !

Les pistes pragmatiques imaginées par le rapport

Pour trouver un autre angle, la mission préconise d’agir avec grande prudence, en raison des risques d’addiction, de déscolarisation des jeunes, voire des cas de dopage. Plusieurs pistes sont néanmoins ouvertes. Elles viseraient à autoriser des compétitions tenues hors ligne, donc dans l’univers physique, « dès lors que les droits d’entrée des joueurs correspondent bien à une participation à des frais d’organisation ».

Par pragmatisme, elle propose que « des phases qualificatives » puissent être organisées en ligne, mais à condition « qu’aucun droit d’inscription ne soit demandé aux joueurs ». Enfin, elle envisage des compétitions tenues exclusivement en ligne, mais là encore « dès lors qu’aucun droit d’inscription n’est demandé aux joueurs, au-delà de l’acquisition du logiciel de jeu ».

Cette notion de sacrifice doit dans tous les cas exclure les frais de connexion Internet et le coût éventuel d’achat du matériel de jeu, donc la licence. Il reviendrait au besoin à un juge le soin de détecter d’éventuelles tentatives de contournement. C’est l’hypothèse où un éditeur lié à l’organisateur, en profiterait pour facturer des licences à un tarif plus élevées dès lors que celles-ci permettent de participer à des compétitions de jeux.

Associer la puissance publique dans une démarche de corégulation

Ces nuances posées, on pourrait donc faire sortir les compétitions de jeux vidéo des griffes de l’interdiction. Les auteurs suggèrent également d’associer la puissance publique avec les acteurs. Plutôt qu’une confiance aveugle dans l’autorégulation, une mission de régulation pourrait être dévolue à une autorité administrative, à l’instar de l’ARJEL pour les jeux d’argent en ligne, sans exclure des échanges avec l’univers dans une démarche de coparticipation.

La grande interrogation reste l’agenda. Le projet de loi sur la République numérique est la fenêtre de tir parfaite, mais le temps presse puisque les débats en séance sont programmés dans quelques jours. Autre chose, il faudra sans doute compter sur un passage devant la Commission européenne pour voir si cet encadrement est bien conforme aux normes communautaires. Une procédure qui devrait prendre, en principe, trois mois à elle seule.

Jeu vidéo, fédérations et olympisme

Autre point : aujourd'hui on dénombre trois entités différentes dont aucune ne peut prétendre avoir une représentativité suffisante de l'ensemble de l'écosystème. On retrouve ainsi la « Fédération Française de Jeu Vidéo » la « Fédération Française de Jeu Vidéo en Réseau » (dont la dernière communication officielle semble remonter à 2013) et l'association Lan Alliance qui délivre le label « Masters du jeu vidéo ».

En attendant qu'une véritable fédération française émerge d'un univers associatif plus que fragmenté, la France pourrait s'inspirer du modèle coréen. Les rapporteurs préconisent ainsi la formation « d'une commission spécialisée constituée au sein du comité national olympique du sport français (CNOSF) » qui occuperait les pouvoirs habituellement confiés à une fédération. Celle-ci aurait par exemple le monopole quant à la possibilité d'autoriser un organisateur de compétition à employer les expressions « championnat de France de... » ou « coupe de France de... ». 

Il ne s'agirait pas d'une première puisque selon Rudy Salles et Jérôme Durain, « de telles commissions spécialisées ont été dans le passé utilisées pour pallier la défaillance d’une fédération délégataire (cas de l’équitation), mais également pour permettre l’émergence progressive de nouvelles disciplines non immédiatement rattachables à une fédération existante (par exemple, le triathlon : une commission spécialisée, comprenant des représentants des fédérations de natation, de cyclisme, et d’athlétisme, avait alors été constituée). ». 

Cette solution permettrait de créer un lien institutionnel entre le monde sportif et celui du sport électronique, confirmant une tendance déjà observée par ailleurs. La FIFA organise par exemple des tournois en partenariat avec Electronic Arts sur les jeux de sport de l'éditeur, tandis que quelques clubs sportifs commencent à recruter des joueurs de jeux vidéo. Au Vfl Wolfsburg on peut ainsi trouver un champion du monde du jeu FIFA 14, tandis qu'en Turquie le Beskitas a embauché une équipe sur... League of Legends

À ceux opposant que la pratique compétitive du jeu vidéo ne constitue objectivement pas un sport, la mission rétorque que « le ministère des sports et plus généralement la loi et le règlement, ne retiennent pas de définition univoque du sport ». Elle précise en outre que « figurent parmi les disciplines gérées par des fédérations agréées ou délégataires : la pétanque, le tir à l’arbalète, à la carabine ou au pistolet, la danse country, le tir à l’arc, le jeu d’échec, le sport boules, le modélisme automobile radioguidé, le cerf-volant, l’aéromodélisme, le curling, le billard (français, anglais, américain, snooker), la pêche (en mer, à la mouche ou en eau douce) ou encore l’aérostation (vol en montgolfière) » qui ne sont pas nécessairement des activités très intenses en effort, mais réclamant une certaine dextérité physique et mentale.

Des visas pour attirer les talents étrangers

La mission propose également de « mettre en place une politique de visa adaptée pour les e-sportifs professionnels ». Cela passe notamment par la non-opposition du marché local de l'emploi pour le recrutement de joueurs professionnels, qui alourdit inutilement la phase de recrutement pour les équipes. 

Les parlementaires citent ainsi le cas d'une équipe « basée à Marseille en 2012 » (comprendre Millenium) ayant voulu recruter un joueur coréen de Starcraft II (Jeon « Dragon » Yong Soo). Pour que les autorités valident cette procédure, il aura d'abord fallu que l'entreprise dépose une offre sur Pôle Emploi pour un « consultant coréen en jeu vidéo ». Elle a reçu environ 300 réponses et a dû démontrer que ces réponses ne remplissaient pas ces besoins afin que Dragon puisse obtenir un visa de travail pour une durée d'un an. Passé ce délai, il a dû passer un test de langue française pour voir son visa renouvelé. Test auquel il a échoué, mettant ainsi un terme à sa carrière dans l'Hexagone.

Pour éviter ce genre de déconvenue aux équipes, les rapporteurs préconisent de faire appel, dans le cas de « joueurs compétitifs étrangers bénéficiant d’une renommée nationale ou internationale » à la délivrance de cartes de séjour pluriannuelles portant la mention « Passeport talent ». Il s'agit d'un dispositif qui entrera en vigueur le 1er novembre prochain permettant à un travailleur étranger de profiter d'un titre de séjour pour une durée de 4 ans renouvelables, dispensant d'autorisation de travail par l'UT DIRECCTE, de visite médicale et de la signature d'un « contrat d'intégration républicaine ».

Pour les joueurs à la « renommée modérée » (un terme qui reste encore à définir avec précision), la mission estime qu'un assouplissement des règles serait également bienvenue, mais avec des conditions un peu plus serrées que dans le cas précédent. L'autorisation serait d'abord d'un an grâce à une carte de travailleur temporaire, avec la signature d'un contrat d'intégration républicaine dans le cas où l'e-sportif souhaite exercer son activité en France pour une durée plus longue.

Quid du statut des joueurs professionnels ?

Les rapporteurs pensent également qu'il est nécessaire de sécuriser le statut des « joueurs compétitifs ». Actuellement, et selon les observations des parlementaires, leur rémunération est « assise sur un statut de travailleur salarié ». Concrètement, les joueurs établissent une structure commerciale quelconque, généralement une auto-entreprise ou une SAS quand leur chiffre d'affaires dépasse les 32 000 euros par an, et facturent leurs services à la structure qui les emploie.

Problème, pareil montage ne permet pas aux équipes d'avoir le moindre lien de subordination. Impossibles donc pour elles d'imposer un rythme d'entrainement particulier à leurs joueurs ou même de leur imposer une séance quelconque. Leurs contrats ne couvrent donc pas la participation aux compétitions, mais plutôt des prestations annexes (participation à des interviews, mise en avant de sponsors etc.). Une situation floue qui ne profite pas au développement du secteur.

Craignant de voir les contrats requalifiés en CDI, les équipes se disent obligées d'agir ainsi, même si dans l'état actuel des choses, la jurisprudence pourrait dans certains cas déjà leur donner tort, notamment parce que les entreprises des joueurs n'ont bien souvent que leur équipe comme client. Or, l'exclusivité des relations commerciales est un indice suffisant pour déclencher une requalification en CDI. 

Le CDD de droit commun ne peut pas non plus être employé dans ce contexte, puisqu'il ne répond ni à un accroissement d'activité temporaire, ni au remplacement d'un salarié absent. Les rapporteurs notent donc que « l’absence de conclusion d’un contrat de travail adapté est défavorable tant aux joueurs (faible sécurité de l’emploi, faible protection sociale, difficultés dans la vie courante pour l’obtention de prêts ou la location d’un logement), qu’aux équipes (impossibilité d’organiser un entraînement complètement professionnel et d’éviter des transferts anarchiques de joueurs vers d’autres équipes) ». Ce dernier point a notamment pu s'observer lors du départ des membres de l'équipe Counter-Strike de LDLC, partis rejoindre la structure américaine EnvyUS, sans le moindre versement d'une indemnité de transfert. 

Une des solutions poussées et déjà utilisées par quelques équipes consiste à faire appel à l'usage du régime d'intermittent du spectacle pour les joueurs. Une option dont les deux parlementaires ne veulent pas entendre parler, car elle fait appel à un régime dérogatoire « très défavorable pour les finances publiques » et inadapté, du fait que l'activité des joueurs n'est pas intermittente. Les structures concernées sont ainsi face à « de réels risques juridiques de requalification en CDI du contrat d’intermittent qu’ils seraient amenés à conclure ». 

Les rapporteurs sont plutôt favorables à l'établissement de contrats à durée déterminée spécifiques pour les e-sportifs professionnels, en étendant le régime prévu aux articles L222-2 à L222-6 du code du sport au cas de l'e-sport. Cela permettrait aux structures d'établir des CDD d'un à cinq ans renouvelables autant de fois que nécessaire en offrant « un bon niveau de sécurité juridique » aux joueurs.

Ce régime n'est pas dérogatoire au niveau de la sécurité sociale et des droits au chômage. Il pourrait éventuellement donner droit à des aides spécifiques et à une couverture sociale mise à la charge de l'État, mais uniquement dans le cas de sportifs de haut niveau, inscrits sur une liste ministérielle sur proposition d'une fédération sportive délégataire. À l'heure actuelle, aucune fédération ne peut prétendre à ce statut.

« Cash-prizes », dons et fiscalité

Les rapporteurs se sont également penchés sur la fiscalité des revenus issus des compétitions. Celles-ci proposent bien souvent des récompenses monétaires, parfois importantes mais les parlementaires estiment que le secteur « bénéficierait d’une clarification de l’application du droit, qui pourrait passer par une prise de position opposable de l’administration (instruction fiscale) ».

Du point de vue de la direction de la législation fiscale (DLF) il n'y a pas vraiment de débat : « tous les revenus issus de gains en compétition sont imposables ». Il existe cependant une forme de tolérance quand ces gains ne sont pas habituels. Une dérogation pratique qui selon le rapport pourrait être due à la difficulté des contrôles fiscaux. Seule certitude, ces gains ne sont par contre pas soumis à la TVA, puisqu'ils ne relèvent pas de la fourniture d'une prestation de service.

Les gains en compétition sont donc soumis « aux règles de droit commun en fonction des montants concernés et du statut adopté ». Ainsi selon les cas les joueurs doivent opter pour le régime des bénéfices non commerciaux (BNC) sur leur déclaration d'impôt sur le revenu, ou régler l'impôt sur les sociétés. Dans le cas de pratiquants intervenant dans le cas d'un contrat de travail ou assimilés, les rémunérations complémentaires (type prime de match) sont soumises aux mêmes cotisations sociales et prélèvements obligatoires que pour les rémunérations du travail.

Autre cas particulier, celui des dons effectués par les spectateurs sur les plateformes de streaming. Généralement, les streameurs permettent à leur public de leur faire des dons d'un montant libre, et souvent faible (quelques euros) afin de les soutenir dans leur activité. Selon les rapporteurs, ces dons qui viennent en complément des revenus publicitaires peuvent représenter jusqu'à un quart des revenus des diffuseurs. Seulement, au niveau fiscal, on se trouve ici dans un brouillard à couper au couteau.

L'administration fiscale hésite en effet entre deux régimes. Dans le cas où la transaction permet d'obtenir « un avantage individualisé et non symbolique ou dérisoire » elle doit être assujettie à la TVA. Dans le cas contraire, il se pourrait que les autorités doivent regarder du côté des « droits de mutation à titre gratuit ». Or, ceux-ci s'appliqueraient à un taux de 60 % puisque la transaction a lieu entre personnes non-parentes, ce qui semble un brin excessif dans le cas présent.

Il reste donc à définir dans quelles conditions l'un ou l'autre des régimes doit s'appliquer, notamment afin de savoir si le fait de prononcer un pseudonyme avec de l'eau dans la bouche est un « avantage individualisé et non symbolique ou dérisoire », ou pas.

TVA à 5,5 % pour la billetterie 

Du côté des organisateurs de compétitions, le rapport prévoit l'application d'un taux de TVA réduit (5,5 %) sur les droits d'entrée des spectateurs de compétitions. Pour justifier cette mesure, les parlementaires expliquent que ce taux s'applique déjà aux compétitions sportives et aux manifestations culturelles.

Aux yeux de la DLF, cette disposition ne serait toutefois envisageable que si et seulement si l'organisation de compétitions de jeux vidéo fait l'objet d'un agrément du ministère des sports. Une étape qui ne pourra être franchie que si l'e-sport parvient à se frayer un chemin jusqu'au comité national olympique.

Protection des joueurs mineurs et consignation des gains

Les rapporteurs se sont également penchés sur le cas des mineurs participant aux compétitions et de leur protection au sens large. Ils estiment ainsi que la participation des mineurs doit être conditionnée à une autorisation parentale « dument éclairée par la classification PEGI du jeu utilisé ». L'usage de cette condition pourrait être également étendue aux spectateurs, ce afin d'éviter que des têtes blondes un peu trop jeunes ne viennent assister à des compétitions de Counter-Strike ou de Call of Duty, tous deux classés PEGI 16 ou 18.

Vient ensuite la question des tournois avec des dotations financières. Les parlementaires estiment qu'afin « d'éviter les dérives comportementales lors de la période du collège » la participation des mineurs de 14 ans doit être restreinte aux compétitions dotées de lots en nature d'une valeur individuelle inférieure à 100 euros. Pour les mineurs de 16 ans, le plafond serait levé à 2 000 euros.

Quoi qu'il en soit, ces revenus dégagés de la pratique professionnelle du jeu vidéo devront être soumis à une obligation de consignation à la Caisse des dépôts pour les mineurs de 16 ans. Par ailleurs, l'embauche des mineurs de 16 ans par une structure professionnelle devra être soumise à une autorisation individuelle

Pour accompagner les jeunes joueurs les plus talentueux, le rapport souhaite également que des dispositions soient trouvées afin d'adapter leur cursus scolaire à leurs volumes d'entrainement. « Sans aller à ce stade jusqu’à la mise en place de pôles de formation espoirs semblables à ceux existant pour le sport, l’accès à des aménagements du temps scolaire ou universitaire pourrait être facilité (sur le modèle des sections sportives ou musicales), pour leur permettre de suivre un cursus de formation classique en parallèle de leur activité de compétiteur » estiment les parlementaires.

E-sport et télévision, une équation compliquée

Dernier obstacle à lever : la régulation autour de la diffusion à la télévision des compétitions. Nous avions pu déjà voir dans cet article qu'à l'heure actuelle le simple fait de citer le nom du jeu affiché à l'écran pouvait poser problème aux chaînes, sans parler des logos présents sur les maillots des joueurs ou de la publicité faite aux sponsors des compétitions.

Le CSA ayant la possibilité de réprimander la « publicité clandestine », les diffuseurs préfèrent jouer la prudence. Le rapport propose de résoudre ce problème en étendant la « politique de tolérance particulière », mise en place par le CSA dans le cadre de la retransmission d'évènements sportifs, aux compétitions de jeux vidéo.

Ce n'est pas le seul problème. Actuellement, les chaînes de télévision s'appuient sur la classification PEGI des jeux pour déterminer l'heure à laquelle il est possible d'en diffuser les images. Une compétition basée sur un titre classé PEGI 16 ne pourrait ainsi n'être diffusée qu'à partir de 22h30. 

Le rapport signale que la classification des jeux se fait le plus souvent sur la base des éléments présents dans leur partie scénarisée. Or les compétitions se déroulent sur le mode multijoueur qui peut dans certains cas ne pas intégrer les éléments (langage ordurier, présence de drogue à l'écran ou de scènes sexuellement explicites...). L'idée serait alors de demander au CSA d'analyser au cas par cas chaque titre afin de déterminer quelle classification adopter, plutôt que de simplement transposer l'avis du PEGI. 

Rappelons enfin qu'il ne s'agit que d'un rapport intermédiaire et que d'ici la publication de sa version finale le 15 avril prochain, de nombreuses modifications peuvent encore être apportées. Il n'est également pas garanti que l'ensemble de ces propositions sera intégré dans le texte de loi sur la république numérique, ni même que l'Assemblée nationale et le Sénat au complet valideront le texte.

Écrit par Kevin Hottot

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Sommaire de l'article

Introduction

Le cadre de la mission

Loterie et e-sport, comment éviter l'amalgame ?

Le projet de loi sur la République numérique

Les pistes pragmatiques imaginées par le rapport

Associer la puissance publique dans une démarche de corégulation

Jeu vidéo, fédérations et olympisme

Des visas pour attirer les talents étrangers

Quid du statut des joueurs professionnels ?

« Cash-prizes », dons et fiscalité

TVA à 5,5 % pour la billetterie 

Protection des joueurs mineurs et consignation des gains

E-sport et télévision, une équation compliquée

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Commentaires (6)


Ce sous titre de champion.


Clair, vous avez un rédacteur spécialisé pour les sous titres ?



En tout cas, y’a du boulot pour avoir un truc carré pour l’esport.








oldchap a écrit :



Clair, vous avez un rédacteur spécialisé pour les sous titres ?



En tout cas, y’a du boulot pour avoir un truc carré pour l’esport.



 

Je suis bien d’accord, ça fait des années que je suis régulièrement impressionné par la qualité des sous-titres.



Ca commençait bien. Ensuite :

 … encadrer … sport … taxe.

 

Plus d’une taxe par jour, et ce ne sont que celles remontées par NXI.



Excellent article autrement <img data-src=" />


Une nouvelle taxe… Comme c’est surprenant ! <img data-src=" />


Merci pour cet article!



Oui ce serait assez hypocrite de s’attacher au PEGI (genre CS ou CoD interdits au moins de 16 ou 18 ans… quand tu vois les films -10 voire sans aucune restriction où ça se tire dessus à longueur de temps…)