Le projet de loi sur la réforme pénale, porté par Jean-Jacques Urvoas, a été adopté par la commission des lois du Sénat. Là, plusieurs dispositions ont été ajoutées pour doper les moyens des services pénitentiaires, notamment pour le brouillage des téléphones ou l’accès aux données.
À l'Assemblée nationale, les députés avaient choisi d'intégrer les services pénitentiaires dans la communauté du renseignement. L'idée a déplu au Sénat qui préfère mettre en avant une meilleure collaboration avec les cercles du renseignement. En commission des lois, les parlementaires ont avant tout prévu le déploiement de toute une série d’outils technologiques pour prévenir l'usage des nouvelles technologies entre les barreaux.
Détection, brouillage et interruption des échanges depuis ou vers les prisons
Suite à un amendement de Michel Mercier, rapporteur, les services sont désormais autorisés à « prendre toute mesure de détection, brouillage et interruption des correspondances émises ou reçues par la voie des communications électroniques ou radioélectriques par une personne détenue au moyen de matériel non autorisé ».
L’administration pénitentiaire pouvait déjà installer tout dispositif destiné « à rendre inopérants des appareils de communications électroniques de tous types, tant pour l'émission que pour la réception », dixit l’article L33-3-1 du CPCE. Le texte adopté est néanmoins plus précis, puisqu’il évoque outre le brouillage, la détection et l’interruption des correspondances.
La précédente Garde des Sceaux avait souligné plusieurs limites au déploiement des brouilleurs de téléphone : voilà un univers où les évolutions technologies rendent rapidement obsolètes les matériels existants, de plus les contraintes sanitaires peuvent être lourdes et le risque de brouiller l’environnement proche de la prison n’est pas négligeable. Enfin le volet financier n’est pas à minorer puisque ces outils sont qualifiés de « très couteux ». Mais ces considérations n’ont visiblement pas pesé au Sénat. D'ailleurs l'an passé Christiane Taubira avait pu obtenir 3 millions d'euros pour l'arrivée des nouveaux modèles de brouilleurs...
Des ISMI catchers proches des prisons, outre l'accès aux données de connexion
La Commission des lois a également confirmé la capacité pour le pénitentiaire d’installer des IMSI catcher dans l’environnement des prisons afin de glaner « les données techniques de connexion permettant l'identification d'un équipement terminal ou du numéro d'abonnement de son utilisateur », en plus des données GPS.
Ses agents pourront aussi accéder aux données contenues dans les systèmes informatiques (ordinateurs, téléphones, tablettes, etc.) que possèderaient les personnes détenues pour tenter de détecter toute connexion à un réseau non autorisé.
Toutes ces opérations se feront sous le contrôle du procureur de la République, avec plusieurs finalités : prévenir les évasions et assurer la sécurité et le bon ordre des établissements pénitentiaires ou des établissements de santé destinés à recevoir des personnes détenues. En théorie, donc, ces mécanismes pourront aussi être installés dans les environs d’un hôpital.
Faire collaborer le pénitentiaire avec le renseignement
Contrairement aux députés, Michel Mercier a refusé que le pénitentiaire soit intégré dans le second cercle de la communauté du renseignement. La Commission a privilégié une autre solution : faciliter les échanges d'informations entre l'administration pénitentiaire et les services du premier et du second cercle.
Cette administration ne serait cependant pas dépourvue d'action : elle pourrait par exemple signaler, aux services du renseignement, les personnes qui méritent de faire l'objet d'une technique de recueil de renseignements.
Pour figurer dans le texte publié au Journal officiel, toutes ces dispositions devront surtout survivre au long des débats parlementaires. La question de l'intégration - ou non - de l'administration pénitentiaire devrait diviser députés et sénateurs, au profit des premiers, le ministre de la Justice étant clairement pour.