Après Myriam El-Khomri, c’est au tour du ministre des Finances, Michel Sapin, de faire comprendre qu’il est opposé à l’instauration d’un « revenu de base » à l’heure du numérique. Le locataire de Bercy estime que verser une aide sans condition reviendrait à envoyer un mauvais signe, synonyme d’assistanat.
De retour sur le devant de la scène depuis quelques mois, notamment après que le Conseil national du numérique ait préconisé d’en évaluer l’impact, l’hypothèse d’un « revenu de base » auquel aurait droit chaque citoyen tout au long de sa vie, qu’il travaille ou non, a de nouveau été évoquée ce matin sur les antennes de France Info – comme l’a remarqué Numerama. Interrogé à ce sujet, Michel Sapin a donné sa position : « Je comprends tout à fait cette proposition » a déclaré le ministre des Finances. « Mais il faut toujours bien équilibrer les choses, entre la solidarité qui est nécessaire de la part de la société vis-à-vis de gens qui sont en difficulté (...) et l’activité, l’incitation à l’activité. »
Alors que les défenseurs de cette réforme estiment qu’elle permettrait de lutter contre l’injustice de notre système de protection sociale (personnes qui ne réclament pas les aides auxquelles elles ont droit, individus qui ne touchent rien faute de dépasser un seuil de quelques euros...), le locataire de Bercy préfère quant à lui une autre forme de justice : « J'aime bien qu'il y ait en face de la formation, j'aime bien qu'il y ait en face une activité – parfois même une activité au service des autres – mais qu'il y ait une contrepartie. S'il n'y a pas cette contrepartie, on risque d'être dans une société de l'assistance, et ça, ça ne passerait pas chez une majorité de Français » a-t-il soutenu.
L’idée fait pourtant son chemin chez certains parlementaires, transcendant d’ailleurs les lignes partisanes. On a par exemple vu la députée socialiste Delphine Batho soutenir cette piste lors des récents débats sur le projet de loi Numérique, aux côtés de Frédéric Lefebvre (Les Républicains). Au Sénat, le groupe écologiste a déposé une proposition de résolution à ce sujet, qui pourrait être débattue le 19 mai prochain. Tous estiment que les mutations technologiques, et notamment la robotisation, rendent l’instauration d’un revenu universel de plus en plus pertinente.
D’un montant qui pourrait avoisiner les 750 euros mensuels, cette prestation sociale remplacerait de nombreuses aides actuelles (chômage, RSA, retraite...), dont les lourds coûts de gestion disparaîtraient par la même occasion. « Les effets bénéfiques du revenu de base sont connus : meilleure scolarisation, diminution du nombre d’arrêts maladie et, surtout, développement de l’entrepreneuriat » avait par ailleurs soutenu la députée Isabelle Attard le mois dernier face à la ministre du Travail. Façon d’éluder le débat, Myriam El-Khomri avait déclaré que la « réflexion » devait « se poursuivre » sur le sujet, au travers notamment des travaux menés par le député Christophe Sirugue à propos des minima sociaux. Ses conclusions sont d'ailleurs attendues pour la fin du mois.