Alors qu'Opera tente de se relancer, l'équipe a décidé de proposer une nouvelle fonctionnalité native à ses utilisateurs : un bloqueur de publicité. Une décision qui pourrait bien durcir la position des éditeurs, qui bloquent de plus en plus l'accès à leur site.
Alors que les bloqueurs de publicité étaient un sujet largement évoqués cette semaine en France, tant par l'IAB que l'UDECAM (nous y reviendrons), un nouvel acteur du monde des navigateurs vient d'annoncer sa volonté d'introduire un tel outil de manière native : Opera.
Quand les bloqueurs deviennent navigateurs
C'est en effet loin d'être le premier à suivre cette tendance, qui s'explique de trois manières. La première est qu'en intégrant directement les navigateurs, les développeurs de bloqueurs de publicité s'ouvrent plus de portes au niveau technique. Les extensions ont en effet de grandes possibilités, mais plus limitées.
La deuxième est que cela permet à certains acteurs de réellement fidéliser leur audience, alors que la concurrence devient assez forte sur ce marché. La marque n'est ainsi plus celle d'un outil secondaire mais celle d'une application que l'on est amené à utiliser au quotidien.
Le troisième est l'attraction du public et le grappillage des parts de marché. On se souvient de la manière dont Firefox a bénéficié à ses débuts de ses solutions anti-popup ou de la possibilité d'installer AdBlock comme une extension. Lorsque vous êtes un acteur secondaire face à Google, Microsoft ou Mozilla, cela peut faire la différence.
Cette stratégie a notamment été utilisée sur le mobile par ASUS ou encore Samsung (même si celui-ci se défausse de la pratique sur des applications tierces). Apple profite aussi de sa mainmise sur iOS pour forcer l'utilisation de Safari à ceux qui voudraient bloquer la publicité. Une manière de contrer la montée en puissance de Chrome notamment.
Opera : un test via le canal « Developer »
Opera, qui n'a jamais vraiment réussi à percer sur le marché malgré de vrais atouts sur ses versions antérieures, a multiplié les changements de cap ces dernières années. La société mise donc sur une fonctionnalité de blocage de la publicité pour attirer à nouveau des utilisateurs. Une solution qu'elle est pour le moment la seule à proposer, celle de Firefox étant plutôt réservée à la navigation privée.
Bien entendu, l'équipe souhaite limiter notamment les problématiques de vie privée et accélérer la navigation. Mais elle ne cache pas non plus son objectif en rappelant que « les utilisateurs veulent une technologie de blocage de la publicité ».
Cet outil est pour le moment seulement proposé dans la version distribuée dans le canal « Developer ». Il est désactivé par défaut, mais si des publicités peuvent être bloquées sur une page, l'utilisateur sera incité à le faire. Comme souvent, des statistiques seront affichées, et une liste blanche pourra être utilisée afin d'épargner certains sites. Certains y sont même nativement inclus comme CNet ou TechCrunch (les autres apprécieront).
Un test de rapidité, mais pas vraiment d'innovation
Un test de rapidité de chargement, comparant le résultat avec et sans blocage fait aussi son apparition. Il ne se fait par contre que sur un chargement de page pour chaque cas, ses résultats pouvant donc évoluer de manière importante d'un test à l'autre. Néanmoins, on peut déjà s'attendre à ce que certains sites en entendent parler, cette question devenant un problème pour leurs lecteurs.
On regrettera au passage qu'Opera n'en profite pas pour plutôt mettre en avant une fonctionnalité permettant de ne bloquer que certains sites par défaut, ce qui éviterait de tous les pénaliser pour les pratiques de certains. On aurait aussi pu imaginer une fonctionnalité proposant de désactiver le bloqueur pour un site où l'utilisateur se rend souvent. Mais l'innovation par rapport à la concurrence ne semblait pas ici la préoccupation première.
Dans le discours de la société, la question du financement des éditeurs semble aussi relativement absente. Elle évoque bien sa volonté de chercher à faire changer leurs mentalités, mais quid de ceux qui ont déjà une pratique responsable de la publicité, ou de ceux qui pourraient s'y mettre ? Ils seront bloqués de la même manière. Dès lors, on ne s'étonnera pas de voir un nombre croissant d'acteurs miser pour un blocage systématique, qui commence à être recommandé par des organismes comme l'IAB (ou le GESTE qui prépare d'ailleurs une campagne en ce sens).
L'équipe préfère donc préciser que son outil est plus rapide qu'Adblock Plus, mais en oubliant les autres bloqueurs du genre. Reste à voir si cela suffira à faire la différence, et à inciter les internautes à utiliser Opera en masse, plutôt que l'un de ses nombreux concurrents.