Le Conseil d’État a annulé hier l’un des décrets d’application de la législation sur les VTC, celle leur interdisant d’informer les clients de la localisation et de la disponibilité d’un de leurs véhicules. Une gifle procédurale pour le gouvernement.
La loi Thévenoud du 1er octobre 2014 sur les taxis et VTC avait entrepris un curieux mouvement de balancier : freiner le déploiement des nouvelles technologies dans les véhicules de transport avec chauffeur, pour l’insuffler dans les taxis. Spécialement, le Parlement avait fait interdiction aux véhicules qui ne sont pas des taxis « d’informer un client, avant la réservation (...) à la fois de la localisation et de la disponibilité d’un véhicule (...) quand il est situé sur la voie ouverte à la circulation publique ».
Seulement, le gouvernement a oublié un point de procédure pourtant inévitable : lorsqu’un État membre institue une règle technique dans la société de l’information, comme ici, il a l’obligation de la notifier à Bruxelles. Pourquoi ? Car ces règles peuvent pourrir le principe de libre circulation des biens et services, l’un des socles européens. Une fois la disposition notifiée, la Commission et les autres pays européens peuvent ainsi émettre des remarques, voire des avis circonstanciés, afin que le texte soit éventuellement corrigé.
Un défaut de notification touchant la loi et le décret
Les États membres n’ont pas beaucoup de choix. Lorsqu’un texte n’a pas fait l’objet d’une telle procédure d’information, en application de la directive du 22 juin 1998, la conséquence est douloureuse : il est inapplicable, inopposable aux tiers. Et c’est très exactement ce qui s’est produit avec l’article « géolocalisation » de la loi Thévenoud.
Hier, saisi notamment par Uber, le Conseil d’État a sèchement constaté que le point III de l’article L. 3120-2 du Code des transports « est affecté d’un vice de procédure » faute d'avoir été notifié préalablement. Ce vice est grave : il contamine également le décret d’application mettant en musique cet article, décret « qui n’a d’ailleurs lui-même pas fait l’objet de cette procédure d’information » constate la haute juridiction administrative.
Pour corriger le tir, le gouvernement devra donc notifier ces deux textes à Bruxelles, attendre un délai de trois mois et surtout croiser les doigts, lui qui a déjà l’amère expérience des critiques adressées à l’encontre du projet de loi sur la République numérique.
Signalons enfin que d’autres dispositions réglementaires ont été annulées par la même juridiction. Pour comprendre pourquoi, il faut remonter à la décision du 22 mai 2015 où le Conseil constitutionnel a jugé contraire à la Constitution l’article L. 3122-2 du Code des transports, disposition qui interdisait aux VTC de pratiquer certaines méthodes de tarification (dont la tarification horokilométrique utilisée par les taxis). Seul souci : le gouvernement n’avait pas nettoyé les scories de cette annulation dans la partie réglementaire du Code des transports.