Bruxelles veut assécher le financement du terrorisme en surveillant bitcoins et cartes prépayées

Gib euromonies
Economie 5 min
Bruxelles veut assécher le financement du terrorisme en surveillant bitcoins et cartes prépayées
Crédits : PaulGrecaud/iStock/Thinkstock

La Commission européenne a présenté hier un « plan d’action destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme ». Plusieurs volets sont au programme, mais Bruxelles s'attarde particulièrement sur l'utilisation de moyens de paiement anonymes. Crypto-monnaies, cartes de paiement prépayées et espèces sont ainsi visées.

Alors qu'en France, l'état d'urgence est toujours d'actualité, près de trois mois après les attentats de Paris, la Commission européenne cherche des moyens de lutter contre le terrorisme. L'objectif pour les autorités européennes est de couper le robinet du financement des organisations terroristes, grâce à une série de mesures dont la mise en application s'étalerait sur 2016 et 2017.

Surveiller les plateformes d'échange de crypto-monnaies

Pour parvenir à cet objectif, Bruxelles voudrait agir simultanément sur plusieurs leviers. Outre le renforcement de la vigilance concernant « les flux financiers en provenance de pays tiers à risque » la Commission aimerait garder un œil sur « les risques de financement du terrorisme, liés aux monnaies virtuelles ».

Les crypto-monnaies permettent en effet d'effectuer des transactions financières de manière quasi instantanée d'un bout du monde à l'autre, dans un anonymat relatif. Si la Commission ne peut agir directement sur ces flux, elle peut cependant aller frapper à la porte des plateformes de change proposant de troquer ses bitcoins contre des euros, des dollars ou toute autre monnaie classique.

Bruxelles propose ainsi dans son « plan d’action destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme » d'inclure les plateformes de change de crypto-monnaies dans le champ d’application de la directive anti-blanchiment « de manière à ce que ces plateformes doivent appliquer des mesures de vigilance à l’égard de la clientèle lors de l’échange de monnaies virtuelles contre des monnaies réelles ». L'objectif affiché des autorités est de « mettre fin à l'anonymat associé à ce type d'échange » d'ici « la fin du deuxième trimestre ».

En France, les plateformes d'échange doivent déjà se déclarer auprès de l'ACPR. Le Rapport Tracfin sur les crypto-monnaies publié en juillet 2014 suggérait déjà quant à lui la nécessité d'identifier les clients de ces plateformes, à partir du moment où ils effectuent des échanges entre euros et monnaies virtuelles.

Pas de bannissement des crypto-monnaies

Si Bruxelles souhaite réguler les échanges entre crypto-monnaies et monnaies fiduciaires, il n'est pas prévu de bannir leur utilisation. Si les plateformes d'échange seront soumises à de nouvelles obligations, via la quatrième directive anti-blanchiment, les fournisseurs de portefeuilles numériques pour les monnaies virtuelles (type Electrum, MultiBit) ne devraient quant à eux pas avoir à changer leurs habitudes.

Cependant, la Commission note que les monnaies virtuelles « sont souvent considérées comme un outil intéressant pour les transferts internationaux d'argent » et qu'elles « représentent un marché innovant mais petit ». Elle rappelle également que la Banque centrale européenne (BCE) avait jugé qu'elles ne représentaient pas une menace du point de vue de la stabilité financière de la zone euro. Aucune raison donc d'interdire leur utilisation, pour le moment.

Les cartes de paiement prépayées dans le collimateur de l'Europe

Bruxelles veut aussi « s’attaquer aux risques liés aux instruments prépayés anonymes », type TransCash ou PCS, qui permettent à n'importe qui de profiter d'une solution de paiement avec un plafond de 2 500 euros par carte, sans vérification d'identité au moment de l'ouverture du service. Ce type de carte ont notamment été utilisées pour la préparation des attentats de Paris, note la Commission Européenne dans une FAQ.

Les mesures autour de ces cartes n'ont pas encore été précisées, mais l'Europe voudrait abaisser le plafond à partir duquel il devient nécessaire de vérifier l'identité du futur détenteur de la carte avant de lui fournir le service. La Commission précise « qu'il sera veillé à la proportionnalité de ces mesures, eu égard en particulier à l’utilisation de ces cartes par des citoyens vulnérables sur le plan financier ». Là encore, il est question d'une application d'ici mi-2016.

Les solutions de type Compte Nickel ne devraient quant à elles pas subir de contrecoup particulier, puisqu'elles nécessitent déjà une vérification de l'identité du client avant même l'ouverture du service. 

Les espèces posent également problème

Il y a un dernier mode de paiement anonyme qui pose problème à Bruxelles et des centaines de millions de citoyens l'utilisent quotidiennement : les espèces. Intraçables elles sont pourtant omniprésentes dans la vie courante et il est encore impensable de les faire disparaître.

L'Europe voudrait néanmoins émettre une « proposition législative relative aux mouvements illicites d’argent liquide », dans laquelle la Commission « étendra le champ d’application du règlement existant afin d’y inclure l’argent liquide envoyé par fret ou par la poste et de permettre aux autorités d’agir à l’égard de montants plus faibles d’argent liquide en cas de soupçons d’activité illicite ».

On rappellera que le plafond pour les achats en espèces est passé de 3 000 à 1 000 euros en France le 1er septembre dernier, et que depuis le 1er janvier, les français doivent présenter une pièce d'identité pour toute opération de change d'une valeur de plus de 1 000 euros. Depuis le 1er janvier, les banques doivent également signaler à Tracfin tout dépôt ou retrait d'espèces d'un montant supérieur à 10 000 euros par mois.

Le cas épineux du billet de 500 euros

La Commission, la Banque centrale européenne et Europol vont également travailler de concert pour évaluer la nécessité d'un retrait de la circulation des billets de 500 euros. Ceux-ci représentent un tiers de la valeur de l'ensemble des billets en circulation, alors même qu'ils ne sont que très peu utilisés lors de paiements. 

« Ces billets sont très demandés au sein des groupes criminels qui s'en servent pour transporter leur argent, en raison de leur grande valeur et de leur faible volume ». Il est en effet plus facile de transporter clandestinement un seul billet de 500 euros qu'une liasse de 50 billets de 10 euros. Il reste encore à voir si cette mesure sera vraiment efficace, les billets de 100 et 200 euros n'étant pas beaucoup plus difficiles à camoufler.

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