La loi sur la santé de la ministre Marisol Touraine a été publiée ce matin au Journal officiel. La plupart de ses dispositions entreront donc en vigueur dès demain, à l’image des nouvelles interdictions concernant le vapotage (voir ci-dessous).
Définitivement adopté le 17 décembre 2015 par le Parlement, le projet de loi sur la santé contient de nombreuses mesures touchant de près aux nouvelles technologies : interdiction du vapotage dans certains lieux publics, Open Data pour les données de santé, obligation de mentionner qu'une photo de mannequin a été photoshopée, etc. On fait le point.
Depuis sa présentation devant l’Assemblée nationale, en octobre 2014, le texte porté par la ministre Marisol Touraine aura fait couler beaucoup d’encre. Ses dispositions relatives à la généralisation du tiers payant ont notamment suscité plusieurs mouvements de grève de la part des médecins. L’introduction du « paquet neutre » de cigarettes ou l’expérimentation de « salles de shoot » n’est pas non plus du goût de tout le monde...
Mais loin de se limiter à ces mesures phares, le projet de loi de modernisation de notre système de santé vient modifier des pans entiers du droit, avec plus de 220 articles. Next INpact vous propose une synthèse de ses principales mesures « numériques ».
Les cigarettes électroniques bannies de certains lieux publics. Le vapotage sera interdit dans « les établissements scolaires et les établissements destinés à l’accueil, à la formation et à l’hébergement des mineurs » (de type écoles et crèches), dans « les moyens de transport collectif fermés », ainsi que dans « les lieux de travail fermés et couverts à usage collectif ».
Mention spéciale pour les images photoshopées. Toutes les « photographies à usage commercial de mannequins » dont l’apparence corporelle aura été « modifiée par un logiciel de traitement d’image afin d’affiner ou d’épaissir la silhouette du mannequin » devront obligatoirement être accompagnées de la mention « Photographie retouchée », sous peine d’une amende de 37 500 euros (ou jusqu’à 30 % des dépenses consacrées à la publicité). Un décret viendra préciser ultérieurement les modalités d’application de ces dispositions, ainsi que leur date d’entrée en vigueur – fixée au 1er janvier 2017 au plus tard.
Les données du site « transparence-sante.gouv.fr » sur la voie de l’Open Data. Ce site, qui recense depuis l’année dernière les liens d’intérêts entre industriels du médicament et professionnels de santé, sera bientôt plus complet. Le montant des conventions signées devra désormais être rendu public, alors qu’il n’était jusqu’ici obligatoire que de mentionner leur existence. Dans le même temps, la loi Touraine précise que les informations publiées sur ce site officiel (où figurent aussi les montants des « avantages » accordés aux médecins) deviennent « réutilisables, à titre gratuit ». Restera maintenant à voir si les pouvoirs publics vont jusqu’à publier ces données en Open Data sur data.gouv.fr...

Transparence sur les dépenses en lobbying des professionnels du tabac. Sur le modèle de ce qui a été introduit en 2011 en matière de liens entre industriels du médicament et professionnels de santé, la loi Touraine impose aux fabricants, importateurs et distributeurs de produits issus du tabac d’adresser chaque année au ministre de la Santé « un rapport détaillant l’ensemble [de leurs] dépenses liées à des activités d’influence ou de représentation d’intérêts » : rémunération du personnel, avantages en nature ou en espèces aux parlementaires, membres de cabinets ministériels, etc. Rien ne dit toutefois que ces informations seront portées à la connaissance du public, comme sur le site transparence-sante.gouv.fr, puisque le texte renvoie à un décret le soin de préciser « le modèle du rapport, ses modalités de transmission, la nature des informations qui sont rendues publiques et les modalités selon lesquelles elles le sont »...
Relance du « dossier médical personnalisé ». Sous réserve du « consentement exprès » du patient, un « dossier médical partagé » pourra être créé pour chaque bénéficiaire de l’Assurance maladie. Il s’agira en quelque sorte d’un carnet de santé numérique puisque chaque professionnel de santé sera amené à y inscrire « à l’occasion de chaque acte ou consultation, les éléments diagnostiques et thérapeutiques nécessaires à la coordination des soins de la personne prise en charge ». Le DMP comportera également des volets relatifs au don d’organes ou de tissus, aux directives anticipées, à la désignation d’une personne de confiance, etc.
Le patient pourra le consulter librement sur Internet. Il aura à ce moment la faculté de modifier la liste des professionnels de santé autorisés à accéder à son dossier (hormis le médecin traitant, qui dispose d’un accès irrévocable). L’internaute sera également en mesure de prendre connaissance « des traces d’accès à son dossier ». Aucune date de déploiement n’est explicitement évoquée, plusieurs décrets – pris pour certains après avis de la CNIL – devant encore préciser ce dispositif censé faire oublier les ratés du « dossier médical personnalisé ».
Ouverture des données de santé. L’Assurance maladie se voit confier la gestion d’un « système national des données de santé » regroupant notamment les données issues des systèmes d’information des établissements de santé et de l’Assurance maladie, mais aussi des informations transmises par les mutuelles à propos des remboursements. Une fois anonymisées « de telle sorte que l’identification, directe ou indirecte, des personnes concernées y est impossible », ces données seront en principe « mises à disposition gratuitement ». Leur réutilisation sera possible sous couvert de n’avoir « ni pour objet ni pour effet d’identifier » un ou plusieurs patients. L’accès à certaines données personnelles sera possible pour répondre à des finalités précises – de recherche notamment, mais dans des conditions relativement strictes (nous y reviendrons ultérieurement).