Copie privée : pour l'industrie de l'informatique, la Sacem se trompe de débat

Sacem, dans le vent ?

Xavier Autexier, délégué général du Syndicat de l'industrie des technologies de l'information (SFIB) réagit dans nos colonnes aux récents propos de Jean-Noël Tronc. Après la démission des membres du collège des industriels en Commission copie privée, le numéro un de la Sacem estime que le débat est désormais politique. Il accuse le secteur de n'être qu'une armée d'importateurs, et milite en outre pour l'assujetissement des PC à la copie privée. Une pillule qui passe mal pour le syndicat qui compte Acer, Dell, Intel, Lenovo ou encore Lexmark dans ses rangs.

SFIB Xavier Autexier


Selon Jean-Noël Tronc, directeur général de la Sacem, « les importateurs sont dans une stratégie de sabotage de la copie privée. Ils ont décidé de mettre à mort le système ». Et Tronc de réclamer dans le même temps l’élargissement de la copie privée à l’ordinateur. « Les industriels doivent se battre pour son renforcement et son élargissement. En Allemagne, les ordinateurs sont taxés, en France non, pourquoi ? » se demande-t-il dans La Tribune. Ces propos font réagir aujourd'hui Xavier Autexier, délégué général du Syndicat de l'industrie des technologies de l'information (SFIB). Ce syndicat compte dans ses rangs des mastodontes comme Acer, Dell,  Intel, Lenovo, ou encore Lexmark. Il est l'un des cinq démissionnaires de la Commission copie privée

 

Comment  jugez-vous les déclarations de Jean-Noël Tronc (SACEM) à l’égard des importateurs ?

 

Pourtant ancien conseiller d'un Premier ministre, l’actuel dirigeant de la SACEM a tenu des propos qui dépassent la voie de tout entendement et la sagesse feutrée des cabinets ministériels. Il est vrai qu’il représente aujourd’hui un tout autre univers : celui des organismes percepteurs de droits.  

 

Comment ça ? 


Le SFIB soutient du coup les commentaires de M. Bernard Heger (Simavelec) qui, s'interrogeant sur la teneur de tels propos tenus par le président de la SACEM, pose la question du « pourquoi pas un passeport pour les importateurs ? ». Est-ce également une nouvelle proposition de définition de M. Tronc pour le Petit Robert sur le terme « importateur » ?

 

M. Tronc, vous vous trompez de débat. Certes nous sommes industriels et/ou importateurs. Mais derrière ces mots, que plusieurs dirigeants de sociétés de perceptions tentent d’affubler d’une connotation négative, il y a une réalité : un rôle moteur pour l’économie, l’innovation et la recherche française que notre industrie, dans son ensemble, joue depuis des années. Rien que pour le SFIB et son seul périmètre d’adhérents que je dirige, ce sont 30 000 emplois directs, 1 500 chercheurs, des réseaux français de revendeurs à valeur ajoutée, l’incubation de nombreuses starts-up (ETI, PME) françaises, des partenariats avec le secteur public, tout cela contribuant à faire de la France un pays leader en matière de technologie de l’information.


M. Tronc, vous vous rendrez compte que vos propos dénigrent l’ensemble de ces actions menées par des entreprises respectées et respectables basées depuis longtemps en France. Et le silence des pouvoirs publics à de tels propos nous donne un sentiment de cautionnement qui est pour le moins étonnant.


En tant que délégué général du SFIB, je ne peux laisser passer de tels propos. Si mes entreprises membres ne sont pas sources de valeur ajoutée pour la France, alors pourquoi s'étonner des propos de M. Cameron avec son « tapis rouge » et laisser faire ! En l'occurrence, la ligne rouge est franchie ! Une ligne franchie tant par les organismes percepteurs que par le silence des pouvoirs publics à cette démission collective. Étonnant et pourtant…  


Quels ont été vos échanges avec le gouvernement justement ?  


Depuis six mois nous avons participé à des dizaines d'entretiens au plus haut niveau, des dizaines de courriers ont été adressés aux cabinets et aux ministres dont le premier d'entre eux, pour signaler l’incohérence du système. Le silence absolu de leur part nous laisse réellement perplexes. Pourtant, les dossiers, courriers et communiqués sont détaillés et lisibles.  

 

Autre chose, le numéro un de la SACEM souhaite également l’assujettissement des PC à la copie privée… Et Free y est favorable.

 

L’idée resurgit comme par magie, c’est un serpent de mer qui n’a pour seule vocation que de noyer le poisson. Le cœur du débat c’est de savoir comment réformer le système pour qu’il soit enfin en conformité avec le droit européen. La rémunération ne doit pas servir à rémunérer un salaire prédéterminé par les ayants droit, elle doit venir compenser un préjudice réel et avéré.  

 

Nous pardonnons volontiers la naïveté de certains acteurs qui les poussent à croire qu’en élargissant l’assiette de rémunération ont obtiendrait une réduction des redevances sur les autres supports. Ce n’est pas en élargissant l’assiette que cela diminuera les taux ! L’expérience prouve qu’à chaque fois qu’on a fait entrer un produit dans l’assiette, loin de baisser, les taux continuent de grimper sur la majorité des supports de stockage. Il ne nous viendrait pas à l’idée, par exemple, de prôner la taxation des flux pour faire baisser les taux sur les tablettes. Nous savons que, dans le cadre du système actuel, scandaleux, en infraction avec le droit européen et contraire aux lois du marché, nous serons toujours plus perdants.


Mais qu'est-ce qui empêche cet assujettissement ?  


S’il faut vraiment répondre sur ce sujet de la taxation des PC, rappelons qu’ils sont le plus souvent à usages professionnels et qu’au regard du droit européen, l’usage professionnel ne doit pas être assujetti. Il s’agit en outre d’un marché fragile, qui décline quand celui d’autres produits explose. Rajouter des taxes dans un tel contexte n’est pas une idée extraordinairement bonne. Enfin, on a déjà tellement de supports assujettis qu’aujourd’hui, cet élargissement n’aurait aucun sens.

 

Sur un PC, il y a beaucoup de copies primaires. De plus, le système est biaisé puisque les copies sont taxées plusieurs fois pour un usage qui est le même. Ce n’est pas parce qu’on fait 14 copies d’un CD audio qu’on va l’écouter 14 fois plus, ou qu’on l’aurait acheté 14 fois ! On ne doit pas oublier les actes de copies qui n’ont que vocation à transférer des contenus que l’on utilise à partir d’autres appareils. Ceux-là ne génèrent aucun préjudice. Enfin, n’oublions pas que la licence iTunes permet plusieurs copies. C'est un droit accordé par contrat pour lequel la rémunération copie privée n’a pas lieu d’être.


Et puis, in fine, pour terminer sur les propos de Jean-Noël Tronc « ils ne sont même pas industriels » : à qui la faute si l'Europe depuis 20 ans a laissé filer ses acteurs informatiques industriels en les laissant déposer les bilans ? Oui, le débat est politique, mais où sont les politiques justement ?

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