Brendan Eich, anciennement PDG de Mozilla durant un temps très court, revient sur le devant de la scène avec un nouveau navigateur. Basé sur Chromium, il ambitionne de bloquer les publicités intrusives pour les remplacer par d’autres, plus légères. Une initiative qui soulève bien des questions.
Brendan Eich est le créateur du JavaScript et est, à ce titre, une figure emblématique du développement web. Il a longtemps été le directeur technique de Mozilla, avant de devenir PDG. Il est cependant resté peu de temps en poste : sa participation financière à une campagne de promotion pour la Proposition 8 – qui visait à bloquer le mariage entre personnes du même sexe – lui avait attiré les foudres de la communauté.
Remplacer les publicités intrusives par d'autres, plus respectueuses
Eich revient aujourd’hui sur le devant de la scène avec un projet de navigateur. Nommé Brave, il est basé sur Chromium et fonctionnera sur Windows, OS X, Linux, Android et iOS, même si sur ce dernier il devra obligatoirement utiliser Webkit. Il n’est pas encore prêt et n’arrivera que plus tard dans l’année, mais sa présentation et son site officiel font déjà beaucoup parler de lui, à cause de son orientation principale : bloquer les publicités et les trackers.
Le navigateur ambitionne effectivement de bloquer les contenus jugés intrusifs, qu’il s’agisse de publicités ou de trackers. Cependant, ce blocage n’est pas une finalité : Brave veut remplacer les publicités bloquées par d’autres, plus respectueuses et légères. Le site officiel s’étend largement sur les temps de chargement catastrophiques de certains sites sur smartphones et tablettes, à cause du nombre trop important d’éléments à charger. Une problématique déjà abordée lors de l’arrivée, sur iOS 9, de bloqueurs de contenus, au point que même Mozilla s'est lancé sur ce créneau.
Hold-up publicitaire ou volonté de faire évoluer une situation ?
Mais plutôt que d’être une solution de blocage parmi d’autres, Brave veut devenir le relai des bonnes pratiques. C’est ici bien entendu que le débat aura lieu car d’autres, Adblock en tête, tentent déjà de s’interposer entre l’internaute et les publicitaires pour définir ce qu’est une publicité acceptable. Mais il y a une différence nette entre laisser passer une publicité, et en remplacer certaines par d’autres. Se posent immanquablement les questions de la régie publicitaire en arrière-plan et des critères de sélection. Eich estime en tout cas qu'il lui faudra un minimum de sept millions d'utilisateurs pour que l'aventure soit rentable.
La méthode interroge également sur la philosophie générale derrière le projet : s’agit-il d’un hold-up des publicités pour mieux les remplacer par d’autres, rémunératrices pour Brave ? Brendan Eich indique de son côté que le navigateur s’occupera plutôt de bloquer les éléments abusifs, sans pour autant provoquer une asphyxie du web, dans laquelle la publicité joue encore un rôle difficilement remplaçable. Les contenus de remplacement ne seront ajoutés que dans certains espaces de taille standard, détectés via un bot distant pour ne pas retarder l’affichage de la page.
Micro-paiements et sécurité
Brave se propose d’ailleurs de compléter ce mécanisme par une autre manière de venir en aide aux sites : les micro-paiements. Selon Eich, le web a manqué une importante occasion en ne s’accordant pas sur la manière dont les internautes pouvaient rétribuer directement les éditeurs de contenus qu’ils apprécient. Brave doit permettre de le faire, mais les détails manquent, là encore, sur la mécanique précise qui sera mise en place.
Les développeurs semblent surtout intéressés par l’expérience de navigation, signalant que 60 % du temps de chargement peut être consacré à celui des publicités, et que 20 % de ce contenu correspond à des éléments dont la seule mission est d’en apprendre davantage sur l’internaute. Brave, lui, ne s’appuiera sur aucun identifiant permanent ni cookie réutilisable. Par ailleurs, Brave aura une mission de sécurité, en se posant comme filtre contre le « malvertising » (transmission de malwares via les publicités) et en intégrant directement l’extension HTTPS Everywhere, pour forcer les sites à utiliser une connexion sécurisée quand elle est disponible.
Un code open source et une bêta pour bientôt
Signalons enfin que Brave compte montrer patte blanche sur sa mécanique interne puisque le code est open source, sous Mozilla Public License 2.0. Il existe actuellement trois codes différents, selon que l’on parle de la version pour ordinateur, pour Android ou pour iOS. Les trois sont stockés sur le dépôt GitHub de l’éditeur.
Dans tous les cas, Brave n’est pas prêt et les réponses devront encore un peu attendre. Une phase bêta va cependant bientôt commencer, et on peut s’enregistrer sur le site officiel pour être prévenu de la disponibilité. On indique alors un nom, une adresse email et les plateformes que l’on possède, avant de se retrouver dans une file d’attente.