Bientôt une consultation en ligne pour chaque loi ?

Des hauts débats
Droit 4 min
Bientôt une consultation en ligne pour chaque loi ?
Crédits : Digital Vision/Thinkstock

L’Assemblée nationale a adopté hier un amendement en vertu duquel le gouvernement devra préparer un rapport ouvrant la voie à une consultation systématique des internautes avant la présentation de textes de loi, à l’image de ce qui a été fait pour le projet de loi Numérique. Certains députés ont cependant invités leurs collègues à commencer par regarder devant leur porte.

Si ces dispositions sont maintenues en l’état d’ici la fin des débats parlementaires, l’exécutif devra remettre aux assemblées « au plus tard le 30 juin 2016 » un rapport portant « sur la nécessité de créer une consultation publique en ligne pour tout projet de loi ou proposition de loi avant son inscription à l’ordre du jour au Parlement ». Les élus du Palais Bourbon ont manifestement tellement apprécié l’opération de « co-construction de la loi » – dixit le gouvernement – qui a précédé le dépôt du projet de loi Lemaire que ceux-ci en redemandent...

Pour rappel, les participants (particuliers, entreprises, associations, institutions publiques...) ont été invités pendant trois semaines à dire s’ils étaient « d’accord » ou « pas d’accord » avec chacun des articles contenus dans l’avant-projet de loi du gouvernement. Il était également possible de proposer des amendements, voire l’introduction de nouvelles mesures. À la fin de l’opération, Bercy a répondu à la plupart des internautes, expliquant pourquoi telle suggestion avait été retenue ou, au contraire, écartée.

« Je pense que [la consultation systématique des citoyens sur Internet] doit être un nouveau modèle démocratique et une nouvelle approche du Parlement » a défendu dans l’hémicycle le député Frédéric Lefebvre, auteur de l’amendement, avant de recueillir le soutien de parlementaires de tous bords : la socialiste Delphine Batho, le communiste André Chassaigne, l’écologiste Sergio Coronado. Le rapporteur Luc Belot (PS) a cependant émis de fortes réserves sur la démarche, les demandes de rapport étant légion – et assez rarement suivies d’effets...

« C’est encore prématuré » estime Axelle Lemaire

Sur le banc du gouvernement, Axelle Lemaire a tout d’abord rappelé qu'un premier bilan de la consultation sur le projet de loi numérique avait été mis en ligne le mois dernier (voir ici). La secrétaire d’État au Numérique a ensuite soutenu que cette démarche participative était « déjà approuvée au plus haut niveau de l'État puisque le Premier ministre comme le président de la République souhaitent aller plus loin ». Le ministre de la Ville, de la jeunesse et des sports, Patrick Kanner envisagerait d’ailleurs de « reprendre cet exercice pour son projet de loi sur la lutte contre les discriminations ».

Bref, « la réplique est déjà là. Faut-il la généraliser ? » s’est faussement interrogée Axelle Lemaire. « Je crois que c'est encore prématuré puisque nous avons conçu cette consultation comme une expérimentation, que cela a été très compliqué – je ne vous cache pas la réalité – et qu'il faut vraiment en tirer en interne, au sein du gouvernement, tous les enseignements. » La question des délais (pour la consultation des citoyens, des autorités administratives...) resterait notamment à résoudre avant d'envisager une généralisation. « Mais vous aurez compris que vous pouvez en tout point compter sur moi pour promouvoir très activement ce chantier au sein du gouvernement » a néanmoins conclu la secrétaire d’État au Numérique.

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Crédits : Assemblée nationale

L’ancienne ministre Delphine Batho a enfin souligné que la procédure parlementaire offrait d’ores et déjà quelques outils aux députés (possibilité de nommer un deuxième rapporteur, référent de la consultation citoyenne), d’autant que certains élus proposent aux internautes de participer à l’élaboration de loi via des plateformes telles que Parlement & Citoyens. Un groupe de travail a en outre été mis en place par le groupe socialiste il y a quelques mois à propos des « amendements citoyens » (voir notre article).

Aucun des orateurs n’a en revanche évoqué la délicate question de la pertinence de ces opérations de consultation des internautes, comme nous l’expliquait en 2013 l’anthropologue Jonathan Chibois lors d’une interview : « On a beau tout faire pour donner les moyens aux citoyens de prendre part au débat public, le fait est que peu s'intéressent au point de s'investir, et que les rares qui le font sont toujours un peu les mêmes, et sont donc peu représentatifs de la population. (...) Les résultats qui sortent de ce type d’expériences ne sont par conséquent pas du tout représentatifs de ce qu’auraient voté les gens par référendum par exemple. »

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