« Le gouvernement est totalement défavorable au "domaine commun". Je vous envoie ci-dessous un argumentaire justifiant et expliquant cette position ». Voilà ce qu’a écrit le Cabinet de Fleur Pellerin, à un groupe de députés.
Alors que le projet de loi sur le numérique sera débattu cet après-midi à l’Assemblée nationale, le ministère de la Culture est revenu à la charge contre les amendements sur les communs (EELV, des élus PS, etc.). Pour mémoire, une telle disposition permettrait de tendre vers une définition positive du domaine public, mais aussi à une association agréée d’agir contre les revendications abusives exercées par un pseudo titulaire de droits sur une œuvre déjà élevée dans le domaine public, etc.
L'amendement sur les communs, la source de tous les maux pour la Rue de Valois
Le cabinet de Fleur Pellerin estime que la consécration d’un domaine commun informationnel est inutile au motif que « l'affirmation d'un développement croissant des pratiques de "copyfraud" n'a en aucune façon été démontrée, notamment lors de l'étude d'impact du projet de loi ». Le ministère en viendrait presque à nier en bloc cette difficulté... Autre chose, ce domaine commun serait dangereux car il ferait du droit d’auteur l’exception et le domaine public la règle. L’avis porté par la ministre a été puisé entre les murs du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, où se trouvent les principales sociétés du secteur (SACEM, SACD, etc.).
Le cabinet sort aussi l’artillerie lourde : il considère qu’un tel amendement pourrait menacer la recherche et le développement en France. De plus, « l’enregistrement d’un morceau de musique ou d’une chanson qui n’est plus couvert par le droit d’auteur, ne pourra donner lieu à la commercialisation d’un CD », au motif sans doute que l’amendement prohibe la mise en place de restriction de l’accès à une œuvre tombée dans le domaine commun informationnel...
Domaine commun consenti
Un autre amendement, qui permettrait cette fois à un auteur de renoncer à ses droits, est accueilli avec les mêmes ongles. « Aujourd’hui, un auteur peut décider de mettre à disposition ses œuvres à titre gratuit mais ce n’est jamais irrévocable. La disposition de l’avant-projet de loi permettrait une expropriation définitive des créateurs (dans le monde artistique mais aussi industriel puisque la disposition toucherait les logiciels et brevets). Au vu des rapports de force économiques sur Internet, il sera facile à un intermédiaire technique placé en position dominante (tels le magasin d’application Apple ou Youtube par exemple) de conditionner l’accès à leurs services à un abandon unilatéral et irrévocable des droits d’auteur. »
L'argumentaire adressé aux députés par le cabinet de Fleur Pellerin