Le fait de diffuser sur la Toile photos ou vidéos d’une personne en position sexuellement explicite sans son consentement – ou « revenge porn » – pourrait bientôt être plus facilement poursuivi en France. Et ce, grâce à un amendement EELV adopté dans le projet de loi Lemaire.
Depuis des années, l’article 226-1 du Code pénal permet de réprimer certaines formes de revenge porn en France. Le fait de porter volontairement atteinte à l'intimité de la vie privée d'autrui « en fixant, enregistrant ou transmettant, sans le consentement de celle-ci, l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé » est sanctionné d’une peine maximale d’un an de prison et de 45 000 euros d’amende.
Cette disposition, déjà appliquée par exemple par le tribunal correctionnel de Metz (voir notre article), est cependant jugée inadaptée pour couvrir l’ensemble de ces faits. Le Code pénal prévoit en effet plusieurs conditions cumulatives pour sanctionner une telle infraction : il faut principalement l’absence de consentement de la victime et la volonté de porter atteinte à sa vie privée. Il faut aussi que le lieu où sont captées les images soit un lieu « privé », dont l’accès en conséquence n’est pas ouvert au public, exigeant une autorisation de l’occupant.
Porn to be wild
La délégation aux droits de la femme avait regretté pareilles restrictions dans son rapport sur le projet de loi Lemaire : une « victime ne peut engager de poursuites contre son ex-compagnon qui aurait pris des photos d’elle dénudée sur une plage par exemple, y compris à son insu ou si personne ne se trouvait sur cette plage ». De même, l’utilisation d’un logiciel de traitement d’images pour changer le décor de fond peut occasionner quelques tracasseries juridiques pour déterminer s’il y a bien ou non « lieu privé ».
Ce n’est pas tout : le Code pénal prévoit encore que « lorsque les actes mentionnés au présent article ont été accomplis au vu et au su des intéressés sans qu'ils s'y soient opposés, alors qu'ils étaient en mesure de le faire, le consentement de ceux-ci est présumé ». Pour certains magistrats, le fait qu’une personne donne son consentement à la prise d’une photo (en regardant l’objectif par exemple) vaudrait consentement à sa diffusion. Une interprétation dénoncée par la délégation.
Colmater les brèches du Code pénal
Hier, en commission des lois, contre l'avis du gouvernement et du rapporteur, les élus écologistes ont fait adopter un amendement visant à corriger ces brèches. Alors qu'Axelle Lemaire avait dénoncé ses difficultés juridiques, souhaitant aussi des sanctions plus dissuasives, le texte EELV laisse la revanche pornographique dans le Code pénal, mais l’isole dans un alinéa à part, histoire de sortir de ces carcans.
Serait ainsi puni des mêmes peines – un an de prison et 45 000 euros d'amende, « le fait de transmettre ou diffuser, sans le consentement de celle-ci, l’image ou la voix d’une personne, quand l’enregistrement, l’image ou la vidéo sont sexuellement explicites ». On le voit : le consentement n’est plus présumé, la notion de lieu privé/lieu public n’a plus d’emprise et les photos-montages éventuels ne passent plus entre les gouttes.