Depuis quelques semaines, Guénaël s'est entiché pour un jeu plutôt étrange. Vissé sur son smartphone, il donne des pelotes de laine à des chats virtuels, et apparemment il aime ça. Nous avons donc enquêté pour essayer de comprendre ce phénomène presque surnaturel.
Oubliez Pokémon et tous les autres titres où il est question de collecter des monstres, la nouvelle coqueluche du moment s'appelle Neko Atsume : Kitty Collector. C'est en tout cas ce que Guénaël essaye de nous faire croire. Si vous n'avez pas vu passer un seul de ses innombrables tweets sur le sujet, sachez qu'il s'agit d'un jeu mobile japonais, disponible sur Android et iOS depuis octobre 2014. Il dispose d'une version anglaise depuis quelques mois.
Au Japon, le titre a rencontré un succès plutôt inattendu avec plus de 4 millions de téléchargements entre son lancement et mai 2015. Son débarquement en occident semble également s'être très bien passé puisque la barre des 10 millions de copies a été franchie au début du mois de décembre. Google Play Japan est même allé jusqu'à organiser un stream d'une dizaine d'heures dans une reconstitution des décors du jeu, avec de véritables chats. La rediffusion de cet évènement frôle le million de vues.
Un principe enfantin
Le titre, développé par Hit-point, un petit éditeur nippon totalement inconnu sous nos latitudes, repose sur un principe très simple : le joueur est face à un jardin, sur lequel il peut installer des jouets. Ces jouets, couplés au remplissage régulier d'une gamelle de nourriture, permettent d'attirer des chats sur son terrain.
Le félin ainsi attiré vient alors s'amuser avec l'un des jouets mis à sa disposition. Si plusieurs objets sont disposés au sol, plusieurs matous pourront venir s'en servir, et ainsi régaler vos rétines par la même occasion. Quand un chat vient chez vous pour jouer, il vous laisse un petit cadeau en repartant : des « niboshi », une sorte de petite sardine séchée, qui existe en deux couleurs : gris et or. Toutes deux permettent d'acheter de la nourriture et d'autres objets qui attireront d'autres animaux et ainsi de suite.

Au total une cinquantaine de chats différents sont inclus dans le jeu, et chacun d'eux a ses caractéristiques particulières. Certains préfèrent jouer à la balle, d'autres veulent des coussins mœlleux tandis que les boites en carton arriveront peut-être à en divertir quelques-uns. 17 chats sont également considérés comme « rares » et n'apparaissent que dans certaines conditions.
Les plus motivés chercheront quant à eux à collectionner les « mementos », des souvenirs que les chats vous offrent lorsqu'ils ont utilisé un objet particulier un certain nombre de fois. Chaque matou dispose d'un unique memento, on peut donc tenter de trouver les bonnes combinaisons, et de parvenir à les reproduire assez souvent pour qu'ils daignent tous vous offrir leur petit cadeau.
Parfois, les probabilités d'apparition sont si faibles, que notre cher Guénaël exulte comme un supporter un soir de finale de coupe du monde, quand il s'aperçoit qu'un chaton a préparé un sorbet dans une coupe à fruits. Un comportement qu'il réserve habituellement à l'arrivée des communiqués de l'ARCEP sur le plan Très Haut Débit ou les Réseaux d'Initiative Publique, le vendredi à 18h.
De la contemplation plutôt que de la compétition
Neko Atsume : Kitty Collector n'a pas de fin. Il n'y a pas vraiment de but non plus. Tant que l'on remplit la gamelle et que l'on laisse des jouets dans le jardin, les chats affluent à chaque fois que l'on lance le jeu. Le titre ne réclame d'ailleurs que très peu de temps au joueur.
Le laisser allumé ne sert à rien, les chats apparaissent plus ou moins aléatoirement et le calcul ne se fait qu'au lancement du jeu. Une fois que vous voyez un matou rare dans votre jardin, vous avez alors tout le temps que vous voulez pour le prendre en photo et remplir son petit album personnel.
Il n'y a pas vraiment de notion de compétition dans ce jeu, il n'y a pas de classement afin de savoir qui a reçu le plus de sardines séchées, ni même de trophées à débloquer en débloquant un certain nombre de chats ou d'objets. Tout est une affaire de patience, mais surtout de contemplation.
La clé, c'est de bien choisir son angle - Crédits : ehardy2013 - Reddit
On s'amuse à essayer de découvrir les combinaisons permettant d'attirer les matous les plus rares à soi, on peste quand Tubbs (un gros chat blanc) vient dévorer l'ensemble du contenu des gamelles en ne laissant qu'une pauvre sardine en remerciement, et parfois, on se vante (comme Guénaël) sur Twitter quand on réussit à attirer une bestiole rare dans son jardin.
À partir de là, il est difficile de déterminer la durée de vie d'un tel titre. Les plus irréductibles arriveront sans doute à jouer pendant des mois et à s'attendrir en voyant pour la soixante-douzième fois Smokey (un chat noir) camper dans la cheminée d'un arbre à chat en forme de train. D'autres tourneront la page en se demandant bien ce que les fans peuvent trouver à un inclassable pareil.
Une monétisation bien calibrée
Basé sur un modèle free-to-play, Neko Atsume : Kitty Collector compte sur ses micro-transactions pour subsister. Certains objets ne peuvent ainsi n'être achetés qu'avec des sardines dorées. Celles-ci peuvent être achetées avec des sardines grises ou bien moyennant de l'argent réel.
L'éditeur a toutefois été très raisonnable sur la tarification des poissons. Les options d'achat s'échelonnent ainsi entre 0,99 et 3,99 euros, une attitude qui tranche nettement avec celle des King et autres EA qui n'hésitent pas à vendre des packs à 99,99 euros. Avec 4 euros, il est ici possible d'acheter une extension à son jardin, et de s'offrir quelques meubles et jouets rares, susceptibles d'amener de nouveaux chats chez vous.
Dans l'absolu, il n'est pas nécessaire de passer à la caisse pour profiter pleinement du titre. Notre Guénaël National™ nous a ainsi expliqué n'avoir jamais eu à débourser le moindre centime pour recueillir les 180 poissons dorés nécessaires à l'agrandissement de son jardin. Il lui a quand même fallu une semaine de jeu pour réunir cette somme.
Faut-il vraiment chercher à comprendre ?
Après avoir essayé le titre, il nous est toujours aussi difficile de comprendre les raisons son succès. Il a bien sur des qualités évidentes, comme ses graphismes « mignons » avec ses chats aux allures de Pusheen et sa monétisation peu oppressante, mais est-ce que cela suffit à justifier de l'effet hypnotique que le titre que peut avoir sur notre cobaye collègue adoré ?
Quand on lui pose la question, il nous explique tout sourire, que les petits chats sont mignons et que ce n'est pas une façon pire qu'une autre de passer le temps. Finalement, c'est peut-être ça le secret. Il ne faut pas se poser de questions existentielles et seulement contempler le paysage que nous offre Neko Atsume : Kitty Collector. Une pause de détente, de calme et de naïveté qui peut s'avérer parfois nécessaire dans un monde ou tout va toujours plus vite.