Avec la crise, et plus rarement pour des raisons écologiques, certains politiciens n'hésitent pas à mettre en avant les produits fabriqués en France. À l'heure où l'industrie, notamment automobile, ferme usine sur usine, du côté de la high-tech, nous avons pris l'habitude des productions étrangères, et en particulier chinoises. Mais tout passe-t-il vraiment par la Chine ?
Pour beaucoup de gens, c'est un fait, la plupart des produits high-tech sont fabriqués en Chine. Il faut toutefois rectifier un point primordial : de nombreux produits sont assemblés en Chine, mais pas forcément produits. Des pays comme la Corée du Sud ou le Japon sont ainsi à l'origine de nombreuses pièces indispensables aux produits high-tech, les usines chinoises ne servant alors que pour monter le matériel, pour ensuite le livrer à travers le monde.
Néanmoins, passé cette précision, la Chine est bien aujourd'hui incontournable pour la très grande majorité des appareils high-tech. Le sous-traitant Foxconn en est ainsi le principal représentant, bien qu'il existe de très nombreux autres sous-traitants majeurs dans le pays le plus peuplé du monde. Bien entendu, certains noteront qu'il existe des usines de productions et/ou de montages ailleurs, notamment en Thaïlande, au Vietnam, en Inde, en Corée, au Japon, en Israël, et même en Europe (République Tchèque, Pologne, etc.) ainsi qu'en Amérique Latine (Brésil). D'autres feront remarquer qu'Intel et GlobalFoundries (ex AMD) sont aussi présents aux États-Unis et en Allemagne.
Certes, les produits high-tech ne sont pas exclusivement fabriqués et montés en Chine, ou même en Asie. Néanmoins, le temps donne raison globalement aux pays asiatiques. Nokia en est le parfait exemple. La firme finlandaise a ainsi fermé sa toute dernière usine en Europe, concentrant 100 % de la fabrication de ses téléphones en Asie.
L'industrie high-tech existe en France
Et la France ? Si retrouver du « made in France » en matière de nourriture ou de produits de luxe n'est pas rare, pour bien d'autres produits, et en particulier high-tech, cela ressemble à de la science-fiction pourriez-vous penser. Il est vrai que pour les produits d'entrée et moyen de gamme, le « made in France » est quasi inexistant.
Néanmoins, dans certains domaines bien précis, le montage local voire la production locale existent encore. C'est par exemple le cas des semiconducteurs. Ce marché, ultra dominé par Intel, Samsung, Texas Instrument, Toshiba, Renesas et Qualcomm, compte aussi un acteur franco-italien dans ses rangs du nom de STMicroelectronics. Basée à Genève, la société compte tout de même des usines dans l'Hexagone, précisément à Crolles (Isère) et à Rousset (PACA). Et si la concurrence est très rude pour ST, ce dernier n'en reste pas moins un acteur important du marché. La présence française de ST ne doit de plus pas faire oublier celle de son partenaire Soitec, qui travaille dans la même branche que ST, ainsi que dans la même région en Isère.
Continuons avec les grandes sociétés technologiques avec Safran (ex Sagem), société présente dans le CAC 40 depuis peu. Basée à Paris, l'entreprise est tournée vers des domaines majeurs comme l’aéronautique et l'astronautique. Présente en France, la société a même récemment investi 50 millions d'euros à Montluçon afin d'y produire des centrales inertielles de navigation.
Autre compagnie majeure, Thales, elle aussi spécialisée dans l'aéronautique et l'espace, fabrique encore en France certains de ses produits. C'est notamment le cas à Toulouse, où la firme construit des satellites, à Ymare (en Haute-Normandie), où elle réalise des radars, ou encore à Etrelles en Bretagne (électroniques d'aviation). Néanmoins, comme vous pouvez le voir ci-dessous, le site d'Ymare pourrait être menacé lors des années à venir selon certaines rumeurs.
Autre société incontournable, Gemalto. Pressentie pour rentrer dans le CAC 40 un jour prochain, la société spécialisée dans la sécurité numérique et la carte à puce est particulièrement tournée vers l'international. Cela ne l'empêche toutefois pas de compter quelques usines de production de cartes à puces en France, par exemple à Gémenos, près de Marseille.
Autre fleuron français, Bull, le fameux fabricant de supercalculateurs (entre autres), dispose encore de plusieurs usines en France, dont une à Angers. N'oublions pas non plus LaCie. Rachetée il y a peu par Seagate, le Français conserve toujours, tout du moins à l'heure actuelle, une usine d'assemblage située à Massy. Reste à savoir si le spécialiste du stockage haut de gamme gardera longtemps son usine francilienne.
La fibre optique se produit aussi en France
Si les FAI ont encore un peu de mal à développer la fibre sur tout le territoire, ce n'est pas faute d'approvisionnement. Le pays compte en effet quelques usines de production. C'est par exemple le cas de l'usine Draka, basée près de Lens et propriété de l'Italien Prysmian. N'oublions pas non plus le Français Acome, qui dispose de plusieurs usines dans le département de la Manche. En 2010, la France était même le leader de la production de fibre optique à en croire l'ARCEP.
Vous reprendrez bien un peu de tablettes ?
Nous ne parlerons pas ici du Français Archos, qui fabrique et assemble ses tablettes en Asie. Mais quitte à parler des tablettes, nous pourrions mettre en avant la Qooq d'Unowhy, montée à Montceau-les-Mines, ou encore la Bic Tab, qui devrait être montée dans la même région, si ce n'est la même usine.
Un PC français ? Ça existe, mais pas pour toutes les bourses
Ces tablettes sont cependant des produits de niche, à l'instar des PC de luxe à 10 000 euros pièce fabriqués en France par Cottin, l'entreprise de François Cottin. Ce dernier a eu la riche idée d'inventer un PC qui n'a rien de jetable, à l'opposé de nos PC portables d'aujourd'hui, et plutôt destiné aux entreprises.
Vous pouvez sur sa boutique personnaliser le PC, du boitier (alu, argent et même or) en passant par le type de cuir (alligator, autruche, iguane), en passant par la teinte du cuir et le décor. Et outre le l'ordinateur de luxe Cottin 413, l'entreprise propose aussi une clé USB en platine ou en or, ainsi qu'un iPad personnalisé.
Restons dans les objets peu abordables avec les robots humanoïdes d'Aldebaran Robotics, fabriqués en France. Nao, son principal produit, coûte cependant plus de 10 000 euros et est destiné aux entreprises ou aux grands établissements publics.
Le son haut de gamme made in France
Toujours dans le luxe, n'oublions pas non plus la récente entreprise Devialet, qui fabrique en Normandie l'amplificateur audio très haut de gamme D-Premier, pour, là encore, une dizaine de milliers d'euros. La société souhaite cependant toucher un plus grand public et diminuer fortement ses prix à l'avenir. Il y a quelques jours à peine, des personnalités comme Marc Simoncini (Meetic), Xavier Niel (Free), Bernard Arnault (LVMH) et Jacques-Antoine Granjon ont même mis sur la table 15 millions d'euros pour financer Devialet, qui exporte 90 % de ses produits.
Et toujours dans le domaine du son, notez que le fameuse entreprise Focal JMlab, spécialisée dans les enceintes (automobile, hi-fi, etc.), dispose d'usines en France, à Saint-Etienne précisément. Quant à Cabasse, aussi spécialisé dans les enceintes, si une partie de sa production est réalisée en Asie, une autre l'est tout de même encore en France, en Bretagne précisément.
N'oublions pas non plus, toujours dans ce domaine, Atoll-Electronique, présent dans la Manche, ainsi qu'Atohm, qui assemble certains de ses produits à Besançon, et Davis Acoustics, qui dispose d'une usine à Troyes. Et cette liste n'est pas exhaustive.
Revenons aux ordinateurs et aux serveurs avec la société Splitted-Desktop Systems (SDS), qui ne fabrique rien en France, mais qui monte bien ses produits dans l'Hexagone. Sa gamme grand public, Quietty, vend des ordinateurs tout-en-un ainsi que des serveurs, disponibles sur GrosBill. Nous pouvons aussi citer Carri Systems, qui conçoit et assemble ses configurations à Noisy-le-Sec, en Île-de-France.
Enfin, du côté des claviers de luxe, l'ébénisterie Della Signora, basée à Castelnaudary (Aude), a récemment lancé la marque Orée. On y trouve pour l'instant qu'un clavier en bois fait main à base de noyer ou d'érable. Mais d'autres produits devraient être proposés à l'avenir.
Bien entendu, nous n'avons pas lister dans cet édito l'intégralité des sociétés qui assemblent voire fabriquent des produits high-tech en France, néanmoins, cela démontre que l'Hexagone ne peut lutter à armes égales avec les pays à la main-d'œuvre bien plus faible, il est encore possible de monter et même de fabriquer des produits high-tech. Remarquons que certaines de ces entreprises sont détenues en partie par l'État, ce qui explique aussi leur présence importante sur le territoire. Il n'y a pas de hasard.
Ces Français de la high-tech qui n'ont pas (ou plus) d'usines en France
Terminons cet édito en lisant quelques entreprises high-tech qui pensent les produits en France, mais qui les fabriquent et montent à l'étranger (liste non exhaustive) :
- Archos : tablettes tactiles.
- Bookeen : liseuses.
- Parrot : équipements audio et musique sans fil pour la maison et la voiture, mini hélicoptère, etc.
- Withings : objets connectés (balance, tensiomètres, etc.).
- Technicolor (ex-Thomson) : produits pour le marché audiovisuel.
- Dane-Elec : mémoire.
Rajoutons que si certaines box Internet des FAI français étaient auparavant fabriquées dans l'Hexagone ce n'est plus le cas aujourd'hui, sauf certains modèles bien précis.
Notez que nous nous sommes concentrés dans cet édito sur les produits. Nous avons bien entendu exclu tout ce qui concerne le développement logiciel ou Web, ainsi que les sociétés de services.