Afin de faciliter la mise en Open Data de données publiques, le gouvernement s'intéresse de près à l'instauration d'un principe de « freemium » en vertu duquel seuls les plus gros réutilisateurs payeraient des redevances.
Le projet de loi Valter sur la gratuité des données publiques n’est pas encore adopté définitivement (ce devrait être le cas demain suite à un dernier vote du Sénat) que ce sujet s’invite déjà à l’Assemblée nationale. Il faut dire que la secrétaire d’État en charge de la Réforme de l’État s’était montrée guère favorable aux propositions du rapporteur socialiste Luc Belot, préférant alors renvoyer une éventuelle réforme d’ampleur au projet de loi numérique porté par sa collègue Axelle Lemaire.
Ce matin, devant la commission des lois, la secrétaire d’État au Numérique a justement laissé entendre que la piste du freemium (un accès gratuit aux données publiques pour ceux qui ont un usage restreint, mais payant pour les gros réutilisateurs) pourrait être retenue. Il s’agit selon Axelle Lemaire de « la solution vers laquelle se dirige le gouvernement » :
« Plus précisément, ce serait gratuit à condition que l'on reverse à la communauté (...) les données telles que les développeurs, les informaticiens les auraient modifiées, sous forme d'une licence qui s'appelle « Share Alike ». Selon cette licence, si les données sont ensuite reversées de manière libre et ouverte à la communauté, notamment sur le portail du gouvernement qui est organisé par Etalab [« data.gouv.fr », ndlr], alors c'est gratuit. Et s'il y a un refus de reverser les données telles qu'elles ont pu être exploitées et modifiées notamment par une entreprise, alors à ce moment-là on tombe dans le modèle des redevances payantes – donc à partir d'un certain volume de données consommées. »
Ce type de licence de réutilisation a notamment été choisie cette année lors de l’ouverture de la Base d’Adresses Nationale, constituée en grande partie des informations de La Poste et des données de géolocalisation de l’IGN (voir notre article). Il faudra cependant attendre de voir ce que propose juridiquement l’exécutif pour mieux appréhender l’ampleur du dispositif ainsi imaginé.
Pour rappel, lors des débats relatifs au projet de loi Valter, le député Belot avait vainement proposé que les administrations « dont les missions principales incluent la diffusion d’informations publiques » (INSEE, Météo-France, IGN, SHOM...) mettent gratuitement leur données en Open Data tous les six mois. Des redevances auraient ainsi été maintenues pour les utilisateurs ayant besoin de données actualisées quotidiennement ou mensuellement. Il n’était toutefois aucunement question de licences de réutilisation prédéterminées.
La fusion CNIL/CADA, une « piste » suivie par le gouvernement
Autre sujet en lien avec l’Open Data : le rapprochement entre la CNIL et la CADA, engagé par le projet de loi Lemaire (les deux institutions pourront discuter de sujets communs au travers d’un collège unique). « Il ne faut pas forcer le cours des choses : une fusion, ce n'est pas anodin, a déclaré Axelle Lemaire. Il faut donc avancer progressivement sur ce terrain, mais c'est une piste qui est poursuivie par le gouvernement, notamment par le lancement d'une mission sur le sujet, qui pourrait éventuellement aboutir à des conclusions en cours de débats parlementaires. » De nouveaux ajustements sont donc susceptibles d’être proposés dans les prochains mois, sous forme d’amendements, en vue d’un rapprochement plus poussé.
De nombreux amendements attendus
L’audition de ce matin a d’ailleurs permis de confirmer que les amendements au projet de loi numérique risquent d’être particulièrement nombreux, tant les parlementaires se montrent préoccupés par différents problèmes en lien avec le numérique. Un député a annoncé qu’il ferait des propositions relatives au cyber-harcèlement, d’autres ont évoqué la lisibilité des conditions générales d’utilisation des plateformes (que tout le monde accepte mais ne lit jamais), l’accès des détenus à Internet, etc.
Le rapporteur Luc Belot aurait d’ores et déjà 60 amendements dans ses tiroirs. Leur examen en commission des lois est prévu pour le 13 janvier 2016, avant que le texte n'arrive en séance publique, le 19 janvier.