Deezer va entrer en bourse avant la fin de l'année. L'entreprise française vient de dévoiler les conditions de son introduction sur les marchés et souhaite lever 300 million d'euros, ce qui pourrait lui faire atteindre la barre du milliard d'euros de valorisation.
Deezer s'apprête à faire le grand saut. Le concurrent de Spotify a décidé de faire le pari osé d'une introduction en bourse, un défi que son principal concurrent, pourtant bien plus gros, n'a pas encore relevé, préférant s'en tenir à de simples tours de table. Pour Spotify le dernier en date remonte à juin dernier et lui a permis de lever 526 millions de dollars, valorisant la société à 8,5 milliards de dollars.
Deezer, six millions d'abonnés et des fantômes
Pour Deezer, les détails de l'opération ont été dévoilés ce matin et l'entreprise en a profité pour faire le point sur sa santé financière. Dans sa présentation, le champion français du streaming musical a annoncé compter une base de 6,5 millions d'utilisateurs abonnés à son service, qui lui assurent 92 % de ses revenus, auxquels viennent s'ajouter 5 millions d'utilisateurs gratuits, qui assurent le reste des rentrées d'argent grâce à la publicité.
Sur les 6,3 millions d'abonnés, il faut distinguer deux catégories de clients, avec d'un côté ceux qui se sont abonnés directement au service (ils sont 1,5 million) et rapportent la moitié des revenus de l'entreprise, et de l'autre les 4,8 millions de clients qui profitent d'une offre fournie en bundle avec d'autres produits (principalement des forfaits téléphoniques) et représentent 42 % du chiffre d'affaires. Sur ces 4,8 millions d'abonnés, seuls 1,5 million sont actifs, c'est-à-dire qu'ils ont écouté au moins 30 secondes de musique sur la plateforme lors des 30 derniers jours. Ces utilisateurs fantômes ne sont toutefois pas un problème pour l'entreprise, puisqu'ils génèrent tout de même des revenus, malgré leur inactivité.
Avec un nombre d'abonnés trois fois inférieur à celui de Spotify, Deezer estime tout de même être le deuxième plus grand acteur mondial (au 30 juin dernier) sur le marché du streaming musical en nombre d'abonnés payants, devant Rhapsody et ses 3 millions d'utilisateurs, et Tidal, quatrième avec 800 000 abonnés. Il sera néanmoins intéressant de voir comment les positions évolueront avec l'arrivée d'Apple Musique sur ce secteur.
La croissance est là, les pertes aussi
Malgré ses 6,3 millions d'abonnés, et un chiffre d'affaires de 142 millions d'euros en 2014, Deezer n'est pas encore dans le vert pour le moment. Présent dans 180 pays, le service n'est pas rentable partout. Si sur le marché français, qui compte pour 47 % de ses revenus, Deezer affiche une marge positive de 13 % et un EBITDA de 5,5 millions d'euros sur le premier semestre de 2015, dans le reste du monde l'entreprise n'est pas à la fête. Ainsi, globalement l'EBITDA du groupe était négatif à hauteur de 11 millions d'euros sur les six premiers mois de l'année.
L'entreprise estime être capable de mettre ses comptes à l'équilibre à partir de 2018 seulement et prévient donc ses futurs investisseurs que les premiers bénéfices n'arriveront probablement pas dans les deux prochaines années. Cela étant, Deezer estime reposer sur des bases saines, avec une trésorerie positive (de 38 millions d'euros) et en n'ayant souscrit aucune dette. Un fait assez rare pour être souligné.
Pour parvenir à cette rentabilité, Deezer veut répliquer le modèle employé en France partout dans le monde. Le principe est simple, la plateforme s'adosse à un gros opérateur téléphonique et mise sur les offres groupées. Pour séduire les magnats des télécoms, le français table sur la richesse de son catalogue musical, qui avec 35 millions de titre est plus garni que celui de Spotify (34 millions de titres) ou d'Apple Musique (30 millions).
Le milliard, le milliard, le milliard !
Pour ce qui est de l'introduction en bourse à proprement parler, elle aura lieu à la fin du mois. À cette occasion, Deezer veut lever 300 millions d'euros en émettant de nouvelles actions. Le nombre d'action produites dépendra du cours d'introduction que l'entreprise estime entre 36,40 et 49,24 euros par action. Cela correspondrait à une valorisation après injection des fonds récoltés comprise entre 900 millions et 1,1 milliard d'euros, de quoi faire naître une nouvelle licorne made in France.
Deezer veut utiliser ces fonds pour accroitre sa présence à l'international, notamment sur certains marchés clés comme le Brésil, ou la demande pour ce type de service est assez forte. Une étape indispensable pour se payer une bonne part du gâteau que représente le streaming musical, et qui selon l'entreprise, génèrera plus de revenus que la distribution de musique sur support physique d'ici quelques années.