La Commission européenne a ouvert cette semaine deux enquêtes formelles visant Qualcomm. Elles concernent un éventuel abus de position dominante sur les marchés des puces mobiles aux normes 3G et 4G.
Décidément, les autorités du monde entier semblent en vouloir aux pratiques commerciales de Qualcomm. Après avoir écopé d'une amende record en Chine (de 975 millions de dollars) pour une sombre histoire de licences et de ventes liées le géant américain des semi-conducteurs fait maintenant face aux regards accusateurs des membres de la Commission européenne qui soupçonne la société de profiter d'un abus de position dominante.
Des puces et des rabais
Deux enquêtes formelles ont été ouvertes simultanément. La première concerne « certains chipsets conformes aux normes 3G (UMTS) et 4G (LTE) utilisés [...] dans des smartphones et des tablettes » et pour lesquels Qualcom aurait accordé « des paiements, des rabais ou d’autres incitations financières à ses clients à la condition qu’ils se fournissent en totalité ou principalement en chipsets de bande de base auprès de Qualcomm ».
La seconde enquête cherchera à déterminer si Qualcomm a vendu à perte « certains chipsets conformes aux normes 3G (UMTS) et utilisés pour assurer la connectivité mobile cellulaire [...] dans l’intention d’empêcher ses concurrents de rester sur le marché et de lui livrer concurrence ».
Si la Commission précise que l'ouverture de ces procédures ne préjuge en rien de leur issue, il convient de rappeler qu'en 2009, Intel avait déjà subi les foudres des autorités européennes pour des infractions du même ordre. Les juges européens avaient alors insisté sur « la responsabilité particulière qui incombe à l’entreprise en position dominante de ne pas porter atteinte à une concurrence effective et non faussée dans le marché commun et par le fait que, lorsqu’un opérateur dispose d’une forte position sur le marché, des conditions de fourniture exclusive concernant une proportion importante des achats d’un client constituent une entrave inacceptable à l’accès au marché ».
Après cinq années de procédure, la Cour de justice de l'Union européenne avait validé l'amende record infligée par la commission : 1,06 milliard d'euros, soit 4,15 % du chiffre d'affaires du fondeur. Si Qualcomm se fait prendre la main dans le sac pour les mêmes raisons, la sanction infligée pourra atteindre 10 % du chiffre d'affaires annuel de l'entreprise sur le marché européen. En 2014, et en dehors de ses quatre marchés principaux (Chine, Corée du Sud, États-Unis et Taiwan), il était de 3,87 milliards de dollars (voir page F-26). L'équipementier américain risque donc une amende de quelques centaines de millions de dollars.
Qualcomm sur la défensive
Dans un communiqué, l'entreprise se dit « déçue » d'apprendre que les autorités européennes s'intéressent à ses activités. Elle assure qu'elle « a coopéré et continuera de coopérer avec la Commission », tout en affirmant qu'elle reste convaincue que cette enquête est « sans fondement ». L'ambiance promet donc d'être tendue dans les mois à venir.
Une telle enquête demandera sans aucun doute plusieurs mois avant d'aboutir, à moins que la Commission européenne ne dispose déjà d'éléments très sérieux en sa possession, ce que Qualcomm ne semble pas penser. D'ici là, la patience reste de mise et l'on surveillera si le géant américain mentionne une quelconque provision en vue d'une amende lors de la présentation de ses prochains résultats financiers d'ici deux semaines.