L’April défend les vertus du logiciel libre dans l'Éducation nationale

L'impulsion du libre de l'école au lycée

Dans un échange de courrier avec le ministère de l’Éducation nationale, l’Association pour la promotion du logiciel libre (April) réclame une série de règles pour le numérique à l’école, collège et lycée. Toutes reposent sur les principes des licences libres.

école ordinateur
En juin 2012, Vincent Peillon adressait une lettre à tous les personnels de l’Éducation nationale. Il disait notamment vouloir veiller « à ce que les outils, contenus et services numériques soient mis à la disposition des enseignants et plus largement des équipes éducatives, pour enrichir leurs pratiques afin de les aider à répondre aux besoins de leurs élèves ». Le nouveau ministre de l’Éducation évoque alors également les besoins de lutter contre les inégalités dans le domaine de l’apprentissage aux usages du numérique et parle de diffusion large des ressources pédagogiques numériques et de mutualisation.


Ce petit bout de texte était suffisamment prometteur pour inciter l’April, association de promotion du logiciel libre, à questionner le ministre.

Un marché majoritairement local

Dans une lettre adressée début septembre, l’association estime que le libre est finalement le meilleur atout pour répondre à ces besoins. « Des professeurs, de nombreuses associations et entreprises françaises (TPE, PME) développent des ressources et des logiciels libres pour l'éducation ». Des solutions pérennes, à moindre coût qui ont en plus l’opportune aptitude à favoriser l'emploi local. « Le marché des licences propriétaires en France est très majoritairement un marché d'importation. Celui du libre est majoritairement local, il s'agit là d'un important gisement d'emplois qu'il convient de favoriser dans la commande publique ». L‘April enchaîne les exemples, notamment les projets portés par l'association Sésamath. « Forte d'une communauté de centaines de professeurs de mathématiques, elle diffuse sous une licence libre des documents et des logiciels éducatifs de mathématiques. Sous ce modèle de mutualisation, elle a pu réaliser un laboratoire de travail mathématique (labomep) et un éditeur vend ses manuels scolaires libres. »

Dépoussiérer le droit d'auteur

L’April réclame du coup un soutien à ce secteur mais également des décharges horaires pour les personnels de l'Éducation nationale qui développent des logiciels ou des ressources libres. Elle milite aussi pour des évolutions juridiques afin que le professeur puisse, à l’aide de licence adaptée, « s'approprier ces oeuvres, qu'elles soient textuelles, sonores ou visuelles. Il doit pouvoir les modifier et les adapter à sa pratique pédagogique ainsi qu'à son public, avant de les distribuer à ses élèves ou collègues ». Or, à ce jour, « l'essentiel des créations du siècle dernier à aujourd'hui fait l'objet d'une appropriation exclusive. Ces œuvres ne pourront rejoindre le patrimoine immatériel commun qu'à expiration du droit d'auteur et des droits voisins, soit dans le meilleur des cas, 70 ans après la mort de l'auteur. C'est pourquoi l'Éducation nationale doit soutenir une révision du droit d'auteur, pour qu'il encourage la connaissance et la solidarité autour de la réalisation d'œuvres communes. »

Enseigner l'informatique, non l'outil

Ce n’est pas tout. L’association estime qu’il est désormais temps de cesser de considérer l’informatique comme un simple outil, comme ce qui est enseigné via le B2i. Il faudrait au contraire « introduire un enseignement de l'informatique pour tous dès le collège ». Et au ministre qui souhaite « garantir plus efficacement la maintenance des équipements mis à la disposition des établissements », l’April répond surtout que « certaines académies basent la gestion de leurs réseaux pédagogiques sur des solutions propriétaires, fermées, de faible pérennité qui de plus rendent ces académies technologiquement dépendantes », alors que « d'autres utilisent des modules libres développés par le Pôle de Compétence EOLE » du ministère de l'Éducation nationale.


Dans sa liste des voeux, l’association veut aussi que, par principe, « les logiciels et ressources utilisés dans le service public de l'éducation soient sous licence libre. » Elle réclame par ailleurs « un cahier des charges de l'édition numérique scolaire » conforme aux impératifs de la transmission du savoir. Elle ne manque pas de dégommer à ce titre les manuels actuellement numérisés, protégés par des DRM. « Est-il normal qu'un professeur ne puisse pas matériellement et légalement réutiliser, modifier une carte d'un manuel d'histoire, un énoncé d'exercice d'un livre ou une photo d'un manuel de SVT pour simplement exercer son métier ? »

La réponse du cabinet Peillon

Dans sa réponse, Benoit Pichard, directeur du cabinet de Vincent Peillon, esquisse plusieurs pistes déjà empruntées. Il rappelle l’existence de la circulaire Jean-Marc Ayrault, qui place le logiciel libre au-devant de l’administration. Il note aussi que « le cœur de l'infrastructure du ministère et de ses applications "métier" est ainsi totalement indépendant de tout éditeur ». Ainsi, « la quasi-totalité du parc de serveurs du ministère de l'Éducation nationale fonctionne déjà sous logiciel libre », tout comme le socle technique de « la totalité des applications nationales administratives ». Enfin, « dans le domaine des logiciels pédagogiques, le ministère soutient la production de ressources numériques pédagogiques libres et donne l'information sur l'offre disponible via le portail Sialle (site du ministère sur les logiciels libres et éducatifs : cndp.fr/sialle ».

Projet caution et vraie impulsion 

Contactée, l’April reste sur sa faim et milite maintenant pour une entrevue avec le ministre. Pourquoi ? Selon Frédéric Couchet, « La plateforme Sialle était utilisée par le précédent gouvernement comme un leurre pour faire croire à son soutien au logiciel libre alors que ce n'est qu'une imposture : certaines versions des logiciels proposés ont deux ou trois ans de retard, le site n'est ni connu ni promu par les instances éducatives, le service éducatif rendu est très insuffisant. Plutôt qu'un projet-caution inutile voué à disparaitre, le ministère devrait proposer de vrais projets libres pertinents pour l'éducation ».

 

Rémi Bulle, vice-président de l'April embraye : « nos actions en faveur du libre pour l'éducation sont légitimées. Cependant, nous attendions une réelle impulsion qui va au-delà de généralités et de dispositifs en place depuis longtemps. Il est temps de favoriser clairement les ressources et logiciels libres pour l'éducation, enseigner l'informatique dès le collège, définir un cahier des charges pour des manuels numériques libres, faire évoluer un droit d'auteur qui est plus une entrave qu'au service de l'École. Avec la généralisation d'un l'enseignement de l'informatique, nous avons proposé une règle pour le "numérique" à l'école et attendons des avancées claires sur ce plan en cohérence avec la circulaire Ayrault. » 

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