Le blocage administratif des sites racistes et antisémites, envisagé un temps par Christiane Taubira, ne sera pas au programme du projet de loi numérique d’Axelle Lemaire. La secrétaire d’État au Numérique, qui devrait dévoiler son texte avant la fin du mois, nous a confié ne pas être favorable à un tel dispositif.
Le 16 janvier dernier, quelques jours seulement après les attentats de Charlie Hebdo, la ministre de la Justice Christiane Taubira proposait de « confier à l’autorité administrative la possibilité de bloquer les sites et messages de haine raciste ou antisémite ». L’idée ? Étendre le dispositif qui permet depuis quelques mois aux forces de l’ordre de contraindre les fournisseurs d’accès à Internet français à bloquer des sites pédopornographiques ou faisant l’apologie du terrorisme, sans qu’un quelconque juge n’intervienne. Un système qui avait pourtant suscité l'ire du PS lorsque la droite était aux manettes (voir notre piqûre de rappel).
À l’époque, un véhicule législatif semblait déjà tout trouvé : le futur projet de loi numérique d’Axelle Lemaire. Le texte, promis depuis 2013, devrait être présenté à l'automne devant le Parlement.

Jeudi, lors de la présentation de la stratégie numérique du gouvernement, nous avons pu demander à la locataire de Bercy si cette proposition était inscrite – ou non – dans son projet de loi. Réponse de l’intéressée : « À l'heure d'aujourd'hui, ces dispositions ne sont pas présentes dans le projet de loi numérique ». Axelle Lemaire a expliqué s’en être entretenue avec Christiane Taubira, la Garde des Sceaux. « Elle a peut-être évoqué à un moment cette possibilité, mais elle n'est pas revenue dessus. »
« Personnellement, je n'y suis pas favorable » a très clairement affirmé la secrétaire d’État au Numérique. Selon elle, le blocage administratif des sites terroristes « a été un terrain d'expérimentation pour l'État », mais en ce qui concerne le racisme et l’antisémitisme, « nous sommes là dans une interprétation de contenus, qui est protégée par la loi sur la presse ». Or « il est délicat de ne pas faire intervenir le juge pour analyser ces contenus », estime Axelle Lemaire.
« C'est mon point de vue » a conclu l’intéressée. Une façon de faire comprendre que rien n’empêchera à certains de porter cette mesure devant le Parlement, par exemple par voie d’amendement.