On ne s'y attendait pas vraiment, mais cette édition de l'E3 aura été plutôt riche, constructeurs et éditeurs ayant réussi à garder le secret sur certaines de leurs annonces dont quelques-unes étaient attendues ou espérées depuis de très nombreuses années. Mais au final, que faut-il en retirer ?
Quelques tentatives intéressantes entre deux « AAA »
Une fois n'est pas coutume, les grands éditeurs ont cherché à se démarquer en proposant autre chose que leurs titres « AAA » ultra formatés et ce n'est pas plus mal. Electronic Arts a été le premier à dégainer avec Unravel, un jeu de plateforme que l'on imagine à mi-chemin entre un Yoshi's Wooly World et Pikmin sur le plan artistique. Un terrain sur lequel nous étions loin de nous attendre à voir débarquer l'éditeur de Need For Speed et de Battlefield.
Dévelopé par Coldwood, un petit studio suédois, Unravel vous propose d'incarner un personnage né d'une pelote de laine tombée du sac d'une grand-mère. Il peut utiliser sa propre laine afin de traverser certains obstacles ou de créer des plateformes, mais ses ressources sont limitées. Si quelques pelotes rouges disséminées dans les niveaux lui permettront de faire le plein, faire un geste de trop sera synonyme de « Game Over ».
Unravel, la surprise d'Electronic Arts
Même Square Enix qui est davantage réputé pour ses portages de jeux SNES sur mobiles, ses remakes à répétitions et ses suites à rallonge a réussi à sortir de son carcan habituel. Le géant nippon a en effet levé le voile sur son Project Setsuna, un RPG développé par un nouveau studio : Tokyo RPG Factory. Pour l'instant peu de détails sont connus à son sujet si ce n'est qu'il se basera sur une nouvelle licence, un point sur lequel Yosuke Matsuda, le PDG de l'éditeur, a lourdement insisté sur scène, comme pour rappeler que parfois, Square-Enix sait se faire violence.
La nostalgie, c'est vendeur
L'autre enseignement que l'on peut tirer de cet E3 est que les éditeurs ont tous l'intention de jouer sur la corde de la nostalgie, à grands renforts de reboots, remakes et autres remastérisations. Trois mots en « R » pour expliquer que l'industrie tourne un peu en rond ces derniers temps. Jugez plutôt.
Rien que chez Electronic Arts, le « nouveau » Need For Speed est en fait un retour de la franchise à l'époque de Need For Speed Underground, sorti en 2003 sur GameCube, PC, PlayStation 2 et Xbox. Star Wars Battlefront est une tentative de faire renaître une licence enterrée depuis 2005, date de lancement de son dernier opus, afin de combler le vide laissé par l'abandon de la franchise Medal of Honor du côté des jeux de tir. Rebelote avec Mirror's Edge : Catalyst qui fait ressortir un nom mis au placard depuis plus de sept ans.
Chez Square Enix, même chanson. Les joueurs sur PlayStation 4 n'auront pas le doit à un mais à deux remakes de Final Fantasy VII, le premier basé sur la version PC sortie courant 2012, le second développé « from scratch » dans les locaux de l'éditeur et qui devrait se détacher sur plusieurs points de la version originale. Qu'importe, les fans l'attendent déjà de pied ferme, même s'il ne sera certainement pas prêt avant plusieurs années, l'éditeur ayant la réputation de prendre son temps quand il développe un nouveau Final Fantasy.
Il en est de même avec DOOM 4, qui prendra la suite du troisième épisode de la série... 12 ans après sa sortie et 9 ans après sa première annonce par John Carmack « himself ». Là encore la carte de la nostalgie semble avoir eu son petit effet, mais il faut tout de même reconnaître que les premières images du titre qui sont plus que convaincantes.
N'oublions pas non plus Nintendo qui a subitement décidé de ressortir Star Fox du placard avec une suite dont les premières images n'ont pas encore convaincu les adeptes de la Wii U. Pire encore, les premiers retours des journalistes présents sur place font état d'un rythme de jeu trop lent, alors que la vitesse faisait justement partie de ce qui fait le sel d'un bon Star Fox. Comme quoi, une bonne bande-annonce ne suffit pas toujours.
Mais c'est probablement à Sony que revient la palme quand vient le moment de jouer sur la nostalgie. Le constructeur n'y est pas allé par quatre chemins et a tout simplement laissé le studio YsNet donner sur scène le coup d'envoi d'une campagne Kickstarter pour le développement de Shenmue III Sur PlayStation 4 et PC. Et force est de constater que cela fonctionne. En trois jours, 3,3 millions de dollars ont été collectés pour cet opus, de quoi lui permettre de profiter de quelques bonus comme des sous-titres en français, qui n'étaient pas prévus initialement. Il est à noter que si officiellement Sony n'est pas l'éditeur du titre, le géant nippon est un « partenaire à part entière » du projet.
Peu de nouveautés sur les consoles
Si les deux éditions précédentes de l'E3 avaient été très centrées sur les nouvelles consoles de salon, cette fois-ci le matériel n'était pas vraiment mis en avant, et la place a plutôt été faite aux jeux. Toutefois, quelques annonces sont à retenir.
La plus notable concerne la possibilité de lire les jeux de la Xbox 360 sur Xbox One, que Microsoft appelle « rétrocompatibilité » mais qui se rapproche davantage de l'émulation. Pour l'instant, la fonctionnalité n'est proposée qu'aux personnes faisant partie du programme Preview sur la console et ne concerne qu'une poignée de jeux, mais son lancement officiel est déjà prévu pour la fin de l'année.
Son fonctionnement est plutôt simple. Pour les jeux physiques, il suffit de glisser le disque dans la console et de laisser la machine faire le reste. Elle téléchargera une version dématérialisée du jeu (qui nécessitera tout de même la présence du disque dans le lecteur) prévue pour fonctionner sur Xbox One. Pour les titres dématérialisés, la manœuvre est transparente.
Autre nouvelle sur Xbox One, l'arrivée cet automne d'une nouvelle interface pour la console, qui laissera de côté les tuiles style Windows 8 pour quelque chose d'un peu plus sobre. Cette mise à jour s'accompagnera de l'arrivée de l'assistant vocal Cortana sur la console, qui sera par exemple capable de donner des renseignements au joueur au cours d'une partie. Enfin, une nouvelle version de la Xbox One, avec un carénage mat et un disque dur de 1 To doit également faire son arrivée dans les boutiques.
Chez Sony, c'est l'arrivée d'un lecteur multimédia complet sur PlayStation 4 qu'il faut signaler. Jusqu'ici la console nipponne faisait pale figure face à sa rivale américaine, et même face à la PS3 qu'elle n'égalait pas sur ce plan. Désormais, la PS4 est capable de lire des fichiers MKV stockés sur un disque dur externe ou sur un serveur local. Il était également question du Service PlayStation Vue, mais celui-ci n'est accessible que dans quelques grandes villes américaines, nous passons donc notre tour.
Quant à Nintendo... rien à signaler côté matériel, on se contentera donc de nouveaux Amiibo, dont deux pouvant également être utilisés comme figurines Skylanders dans le prochain opus de la série.
Réalité virtuelle, produits presque réels
Les réalités virtuelle et augmentée ont également eu une place importante lors de cet E3 et pas seulement parce qu'Oculus VR a tenu sa toute première conférence à cette occasion. La jeune filiale de Facebook y a présenté la version commerciale de son casque : le Rift. Rien de neuf ou presque du côté des caractéristiques techniques, qui sont déjà connues depuis un mois. Si vous avez loupé ces informations, sachez donc qu'il est équipé de deux écrans OLED affichant une définition totale de 2160 x 1200 pixels (soit 1080 x 1200 pixels par œil), avec une fréquence de rafraichissement maximale de 90 Hz.
La détection des mouvements est assurée par un lot de capteurs embarqués sur le casque, mais également par un autre qui vient s'installer face à l'utilisateur, sur son bureau par exemple. Du côté des contrôleurs de jeux, le Rift sera livré par défaut avec une manette de Xbox One, mais Oculus VR travaille aussi sur sa propre solution maison : Oculus Touch. Sur le principe, ce périphérique se rapproche fortement du duo Nunchuck + Wiimote de Nintendo, en plus perfectionné. Il peut en effet détecter certains gestes, comme lorsque l'on pointe un objet du doigt.
Chez Sony Morpheus a également eu droit à sa petite démonstration sur scène, tout comme les lunettes HoloLens de Microsoft. Dans le premier cas, le lancement du casque est toujours prévu pour le début de l'année prochaine à un tarif non communiqué, dans le second, on ne sait toujours rien, mais les démos sont toujours aussi impressionnantes, presques trop belles pour être vraies, un peu comme celles de Kinect en 2009.
Mais pour le moment, rien ne dit que tout cela sera un véritable succès commercial et il faudra attendre quelques mois encore avant de voir si toutes ces tentatives se transforment en succès ou virent au drame pour l'ensemble du secteur.
Les grands absents : Kinect et la PS VIta
En parlant de Kinect, le capteur de Microsoft était aux abonnés absents cette année que ce soit lors de la conférence Microsoft que chez les éditeurs tiers. L'appareil ne semble plus faire partie des priorités de la marque depuis que la Xbox One est vendue sans, et la tendance se confirme cette année. Un seul titre compatible avec le capteur a été montré sur scéne : Just Dance 2016.
Pour la PlayStation Vita, le bilan n'est pas beaucoup plus reluisant, la console portable de Sony n'ayant pas été mentionnée une seule fois pendant la conférence de son constructeur. Il faut dire qu'avec seulement 10,5 millions d'exemplaires vendus depuis son lancement en 2011, elle se vend moins bien que la Wii U, et ce n'est pas peu dire. Pourtant Sony avait bien tenté de relancer les ventes en proposant une nouvelle version de la Vita... en vain.
Shuhei Yoshida, le président de Sony Worldwide Studios avoue même à demi-mots que le constructeur ne compte plus soutenir sa machine. À nos confrères d'IGN il a ainsi confié « Pour être honnête, je ne dirais pas que nous aurons des titres AAA sur PlayStation Vita de la part de nos studios internes ». Il faudra donc se contenter de ce que proposeront les éditeurs tiers sur la console et ils ne se bousculent pas au portillon. Le discours optimiste de septembre dernier selon lequel « La Vita résiste remarquablement bien » est désormais bien loin.