Lancer une procédure CADA pour obtenir communication de la décision de retrait d’un tweet. C’est stupide. Mais nous l’avons tout de même fait à l’encontre du ministère de la Culture, lequel n’a pas assumé son hommage au roman de 1984 sur le réseau social, en plein vote du projet de loi Renseignement.
La semaine dernière, le ministre de la Culture postait un tweet afin de rendre hommage à la parution du roman de George Orwel, « 1984 ». Une « référence du roman d’anticipation et de science-fiction » dixit la Rue de Valois. Problème : ce tweet a depuis été supprimé. Impossible d’en retrouver trace sur le fil officiel de @MinistereCC.
Plusieurs titres de presse s’en sont faits évidemment l’écho. Il faut dire que ce vibrant hommage des services de Fleur Pellerin tombait au plus mal : comme a pu le lire la ministre, à tout le moins dans la fiche Wikipédia, sa figure principale, « Big Brother, est devenue une figure métaphorique du régime policier et totalitaire, de la société de la surveillance, ainsi que de la réduction des libertés ». Or, dans le cadre du projet de loi Renseignement, les références à Grand Frère ou plus généralement au roman d’Orwell ont arrosé les débats, spécialement chez les parlementaires qui s’opposaient bec et ongles aux mécanismes d’aspiration d’ampleur des métadonnées par algorithmes prédictifs et autres sondes… Il n'en fallait pas moins pour s’attirer quelques commentaires épicés parmi les maîtres du genre :
Est-ce que @MinistereCC regrette d'avoir posté ça au lendemain de #PJLRenseignement, puisqu'il l'a effacé depuis ? pic.twitter.com/har0GXEgsr
— Laurent Chemla (@laurentchemla) 10 Juin 2015
L'appel au bois dormant
Fallait-il pour autant déduire de la suppression du tweet et du vote du projet de loi, une relation de cause à effet ? Bon prince, nous avions décidé naïvement de temporiser la sortie de cette actualité, préférant attendre les riches explications officielles du ministère. Nous l’avons donc appelé le 10 juin. Une fois. Deux fois. De nombreuses fois. En vain.
Re-appels le lendemain. Dégun, comme on dit entre la Canebière et le Panier. Re-re-appel vendredi. Sans plus d’effet. Après ces spams, pas d’appel le lundi, histoire de laisser murir les esprits. Aujourd'hui, après une lente sédimentation de trois jours, re-re-re-appel. Nos demandes industrielles ont à chaque fois été bien prises en compte par le service presse, très réactif, qui les a faites remonter au plus haut niveau du tronc, mais jamais réponse ne fut tombée de l’arbre fleuri.
Aussi, pour pousser jusqu’à l’absurde le cloisonnement du cabinet, nous venons d’initier les premiers pas d’une procédure CADA (pour Commission d'accès aux documents administratifs). L'objectif ? Obtenir copie de la décision de retrait de ce tweet, si tant est qu’elle existe formellement. Stupide, absurde, bête, nous l’avouons en rougissant un petit peu, mais conservons cet espoir naïf que ce ministère de la Culture soit toujours celui de la communication.