Nous diffusons ci-dessous la lettre de mission signée par Fleur Pellerin. Celle-ci veut bien relancer cette instance administrative avec l'aide de l'ancienne directrice de cabinet de Christiane Taubira, Christine Maugüé. L'actualité a été mise à jour en conséquence.
Comment garantir le retour de la Commission copie privée ? La médiation initiée au ministère de la Culture, destinée à proposer une feuille de route, suscite déjà des vagues alors qu’elle est à peine amorcée. Retour sur le sujet, au vu des nouveaux éléments qui nous sont depuis parvenus.
Le 1er avril dernier, le ministère de la Culture a réuni l’ensemble des parties prenantes au dossier, ayants droit, industriels et consommateurs. Objectif ? Définir un programme de travail pour préparer le retour de la commission copie privée v.2. Celle-ci a en effet volé en éclats fin 2013 avec le départ de la quasi-totalité des industriels.
Comme évoqués dans nos colonnes, ce 1er avril, onze points ont été définis par le cabinet de Fleur Pellerin afin d’aiguiller ces travaux. Nous en avons désormais le détail :
- Déterminer le programme de travail, prévoir les nouveaux matériels à assujettir (console de jeux, liseuse…)
- Définir la capacité de la commission à prendre des délibérations interprétatives de ses décisions
- Le formalisme des décisions (partage d’informations entre les collèges, règlement intérieur, etc.)
- La question du cloud
- Le calendrier et les modalités de réalisation des études d’usages
- La question des usages professionnels
- La question de la TVA lors du remboursement de la redevance
- La simplification du remboursement du réexport
- Le régime de l’exonération
- Les actions artistiques et culturelles financées par la redevance
- Le diagnostic des perceptions effectives entre 2011 et 2015
Consoles, cloud et liseuses
Si elle n'évoque pas la question de l'impression 3D, il a donc déjà été entendu que la mission envisage l’extension de la redevance aux liseuses. Une telle cible fait déjà sursauter les industriels : « ils ont envie de tuer le marché alors que le livre numérique n’arrive pas à percer ! Déjà qu’avec un téléphone ou une tablette on peut lire des livres électroniques, si en plus ils grèvent ce segment avec la redevance pour copie privée, ils vont le tuer avant qu’il ne naisse. À force de traire la vache, elle n’aura plus de lait ! ».
Ce n’est pas tout. Au ministère, on lorgne aussi le marché des consoles vidéo et celui du cloud, mais cet objectif est moins neuf. Dans ce programme, figure aussi en bonne place la question des professionnels, problème récurrent en France alors que leur exclusion du système doit être effective selon la Cour européenne de Justice de l’Union européenne.
Un agenda qui bouchonne
Cette mission durera 60 jours. Un tel délai fait tiquer : « Si le médiateur arrive à faire en deux mois ce que d’autres ne sont pas parvenus à atteindre en plusieurs années, chapeau ! » nous confie un des participants.
En tout cas, sans évoquer une stratégie calendaire, un tel agenda est parfait pour les ayants droit. En effet une autre mission sur la copie privée a été lancée en 2014 par la Commission des affaires culturelles. Un joli doublon de moyens publics… Cette fois, le rapport des députés sera publié en juin prochain, à l’occasion des 30 ans du prélèvement, soit grosso modo en même temps que la mission de la Rue de Valois.
Conclusion : face aux éventuelles critiques qui y seront adressées, les ayants droit pourront toujours se servir de la première mission Rue de Valois en guise de parapluie. Ils témoigneront de leur bonne volonté à ouvrir le dialogue, à chercher des pistes constructives et à tendre la main aux industriels et consommateurs.
Au ministère, deux autres sujets centraux ont cependant d’ores et déjà été écartés « d’un revers de main », selon un témoin : l’évaluation du préjudice et la gouvernance de la commission copie privée. Ces écueils avaient pourtant provoqué le départ fracassant des industriels et suscitent aujourd’hui une pluie de critiques communes chez tous les représentants des consommateurs. Heureusement pour les uns, malheureusement pour les autres, la commission des affaires culturelles a bien ces deux thèmes parmi ses pistes de réflexion.
La lettre de mission signée par Fleur Pellerin
Nous avons eu aujourd'hui (17 avril) communication de la lettre de mission signée par Fleur Pellerin, le 14 avril dernier.
Commentaire d'une de nos sources, qui constate « la totale absence de la feuille de route des seuls deux sujets réellement cruciaux : la gouvernance de la commission et la détermination du préjudice. En revanche tous les sujets qui intéressent les ayants droit (comme le système d’exploitation des tablettes ou la soumission du cloud), sont bien pris en compte ainsi que des sujets sur lesquels on les sait prêts à faire des concessions ».