À un député inquiet des bugs des données inscrites dans le « Système de traitement des infractions constatées » (STIC), le gouvernement promet un avenir radieux dans le nettoyage de ces fichiers.
Le député Daniel Goldberg avait saisi le ministère de l’Intérieur suite aux constats de la CNIL quant au « fort taux d'anomalies » relevées dans la mise à jour du fichier STIC. Ces anomalies ont été dénoncées dans un rapport 2009 de la CNIL selon qui « seulement 17 % des fiches étaient exactes, notamment suite à des défauts d'actualisation des fiches individuelles, en particulier lorsque les personnes sont mises hors de cause ». Problème, ajoute-t-il : « des administrations se fient pourtant à ce fichier dans le cadre de l'examen de demandes de naturalisation ou lors des enquêtes avant embauche dans certaines professions, par exemple pour la délivrance de badges d'accès aux zones aéroportuaires ». Comment du coup assurer la purge de ces erreurs ?
Une réponse définitive
Le ministère de l’Intérieur l’assure : un « plan de régularisation des fichiers de police et de gendarmerie se poursuit activement, en lien avec la CNIL, et devrait prochainement arriver à son terme ». Dans sa réponse, Manuel Valls promet que « l'action menée dans les services de police et de gendarmerie pour développer une véritable « culture informatique et libertés » sera également poursuivie, afin de garantir au quotidien, sur le terrain, un respect rigoureux du droit des fichiers. »
Au-delà des déclarations, la place Beauvau garantie qu’une « réponse définitive » sera apportée « dans les mois à venir » aux difficultés relevées par la CNIL dans le STIC de la police et le JUDEX, son équivalent auprès de la gendarmerie « notamment quant à l'exactitude des données qu'ils contiennent et à leur mise à jour. »
Pour l’actuel ministre, « ces deux fichiers sont placés sous le contrôle des parquets et la loi impose l'effacement des données en cas de décision de relaxe ou d'acquittement devenue définitive. L'exactitude des données de ces fichiers est donc largement tributaire des informations que doivent transmettre les parquets aux services de police et de gendarmerie. De ce fait, il arrive que des mentions subsistent dans les fichiers alors que, du fait d'une décision judiciaire favorable (notamment une relaxe ou un acquittement), elles devraient être effacées. » Et voilà comment des innocents ont pu se faire ficher comme potentiel délinquant malgré ces décisions favorables, avec les conséquences qu’on imagine sans mal pour l’accès à des postes à risque.
À l’avenir, jure Manuel Valls, ces bugs n’auront plus droit de cité « grâce à la mise en service prochaine de TAJ (traitement d'antécédents judiciaires) » qui fusionnera le STIC et JUDEX. Elle est donc là, la réponse « définitive » : le TAJ également désigné TPJ, acronyme de Traitements de Procédures Judiciaires, prévu par la LOPPSI 2. La clef de ce succès garanti ? « Ce fichier d'antécédents judiciaires unique sera relié au traitement CASSIOPEE du ministère de la Justice, qui indiquera automatiquement à TAJ les décisions judiciaires et permettra ainsi une mise à jour immédiate des données. »
Sauf exception
Valls veut rassurer le député sur la fiabilité des données qui y seront inscrites, d’autant, ajoute-t-il, que le fichier « sera placé sous le contrôle d'un magistrat spécialement désigné, qui exercera sa mission en plus des parquets, mais à plein temps ». C’est cette personne qui « sera chargée de veiller à la mise à jour des fichiers de police et veillera, d'office ou sur demande, à l'effacement des données lorsque celui-ci est prévu par la loi ». De même, « toutes les décisions de classement sans suite - quel que soit leur motif – [feront] l'objet d'une mention » de sorte que « les agents consultant le fichier sauront (…) que telle ou telle infraction n'a pas été poursuivie par l'autorité judiciaire ».
Enfin, les procédures judiciaires qui ont fait l'objet d'un classement sans suite « et qui ne donnent pas lieu, sauf exception, à effacement des données dans le fichier, ne seront pas consultables dans le cadre des enquêtes administratives préalables à certains recrutements, demandes d'autorisations ou agréments ».
Claude Guéant avait activé ce méga fichier en publiant son décret d’application quelques heures avant l’élection de François Hollande. Le fichier en question ne se contentera pas seulement d’être relié à CASSIOPEE, il contiendra aussi toute une série d’information sur les personnes qui y sont enregistrées, le tout sur finalité judiciaire ou administrative. Outre les données d’état civil, le fichier stockera aussi le « lierne générale visage », l’« aspect du visage », la « couleur des yeux », l’« abondance », l’« aspect », la « longueur des cheveux », la « coiffure », le « type de pilosité », l’« accent » ou un éventuel « défaut [de] prononciation ».
Si « aucun élément de signalement ne résultera d'une analyse automatisée des photographies enregistrées », la CNIL constatait dans un avis sur le TAJ ou TPJ dans le même temps l’existence d’un système de comparaison automatisée de photographies via les points biométriques du visage : «L'application TPJ permettra de comparer à la base des photographies signalétiques du traitement, les images du visage de personnes impliquées dans la commission d'infractions captées via des dispositifs de vidéoprotection. »
Les données seront enfin stockées par défaut durant vingt ans pour les majeurs et cinq ans pour les mineurs dès l’enregistrement. Selon les cas des durées dérogatoires plus courtes (cinq ans) ou plus longues sont prévues. Jusqu'à vingt ans pour les mineurs et quarante ans pour les majeurs.